Arcade (Fortuné Joseph) MULLER – 1882-1975

D’un jubilé à l’autre.
« Je vous envoie un grand merci pour vos chaleureuses félicitations à
l’occasion de mon jubilé du 19 mars [1962]. Ce fut une fête grandiose pour
ce pauvre vieux que je suis de
80 ans. Cette même année, je vais célébrer, en plus de mon jubilé d’or
sacerdotal, mes noces de diamant de profession religieuse. Ici à
Scherwiller on m’a confié un petit travail que je peux encore faire:
surveiller les études des alumnistes en plus de ma charge d’organiste et de
la formation de quelques élèves pour l’harmonium. Je compte aller faire un
tour au village natal de Robecq à l’occasion des grandes vacances et donner
ainsi à mes parents les
plus proches et aux paroissiens l’occasion de fêter un enfant
du pays. Si ce n’est pas abuser, je vous demanderais de bien vouloir
m’accorder un mois de congé, y compris les jours de retraite que je compte
faire à Clairmarais qui n’est pas loin. Ce sont peut-être mes
dernières vacances en famille. A mon âge, on peut s’attendre à tout. Je
vous redis, mon Père, tout mon attachement affectueux en l’Assomption ».

P. Arcade, au P. Wilfrid
Dufault, 5 avril 1962.

Religieux de la Province de Lyon.

Au Proche Orient.

Fortuné Joseph Muller est né le 12 janvier 1882 à Robecq (Pas-de-Calais). Il entre en 1896 à l’alumnat de Taintegnies en Belgique et passe en 1898 à celui de Clairmarais (Pas-de-Calais). Il doit quitter le sol national pour faire son noviciat, la première année à Gemert aux Pays-Bas où il prend l’habit le 18 septembre 1900 sous le nom de Frère Arcade, et la seconde année à Phanaraki en Turquie où il prononce ses vœux perpétuels le 18 septembre 1902. Le Proche Orient va être longtemps son champ d’action. Le Frère Arcade y fait tout d’abord ses premières armes de professeur à Konia (1902- 1905) et à Koum-Kapou (1905-1906). Ce n’est qu’après ces 4 années d’enseignement qu’il peut commencer ses études philosophiques et théologiques, à Louvain en Belgique d’abord (1906- 1910), puis à Jérusalem où il est ordonné prêtre le 2 mars 1912. À nouveau et pour longtemps, le P. Arcade est affecté à l’enseignement (Varna 1912- 1913; Ismidt 1913-1914) qu’interrompent seulement les années de guerre 1914-1918. Le Père, dispensé jusque-là du service militaire parce que résidant à l’étranger, est incorporé et versé dans un service sanitaire. Démobilisé, il rejoint lsmidt d’où il est parti et y demeure cinq ans (1918-1923). Puis se succèdent de brefs séjours à Eski-Chéïr (1923- 1925), Zongouldak (1925-1926), Plovdiv (1926- 1929), Koum-Kapou (1929) et Varna qu’il quitte en 1934 pour rentrer en France.

A Scherwiller.

Ce sont les alumnats de Scherwiller (Bas-Rhin) et de Saint-Sigismond (Savoie) qui désormais vont bénéficier de l’enseignement et de l’expérience pédagogique du P. Arcade. Il commence par Scherwiller où il fera deux séjours, l’un de 1934 à 1939, et l’autre de 1961 à 1966. Entouré de sa famille, de ses frères religieux et des alumnistes, il y célèbre dans l’allégresse et l’action de grâce

son jubilé d’argent en 1937 et son jubilé d’or en 1962. Le Père Arcade est d’un caractère gai et bon, avec un brin de malice. Aussi gagne-t-il l’affection des élèves avec qui il s’entretient volontiers en récréation. Sa surveillance en étude n’a rien de redoutable. Il reste le religieux compréhensif et bon. Beaucoup d’élèves se confessent à lui: il sait réconforter et donner courage parce qu’il se sait un ministre du Dieu de toute miséricorde et de toute clémence. Parmi les fonctions qui lui reviennent, il faut compter celle d’organiste qui lui plaît entre toutes. Le Père aime la musique et le plain-chant et dans les années où il n’enseigne plus, il passe de longs moments à l’harmonium. Faut-il chercher là le secret de la bonne humeur qu’il a toujours su garder et qui partout l’a fait apprécier? A Scherwiller, le Père Arcade connaît comme supérieur le P. Nicolas Rauscher. Il est son sous-prieur, ne cherchant nullement à s’imposer, en homme effacé et discret qu’il sait être. Il parle peu, aime plutôt écouter d’un air bienveillant avant de donner son opinion. Comme les gens de son pays natal, il aime le café, le buvant sans sucre.

A Saint-Sigismond.

Au début de la seconde guerre mondiale, le P. Arcade se retrouve à Saint-Sigismond (1940- 1947). Titulaire de la classe de sixième, il dirige aussi les classes de chant et tient l’harmonium à tous les offices. La vie de communauté est celle d’une ruche bourdonnante, comportant heures de prière, de cours, de surveillance et aussi des moments de détente. On y connaît le P. Arcade comme à son habitude, homme discret, modéré, calme, qui fait contrepoids à des confrères plus jeunes et volontiers plus turbulents. Moins frileux que beaucoup, il n’a pas de poêle dans sa chambre et ne veut pas de feu. A 65 ans, il quitte la Savoie. Il est affecté d’abord un an à Menton (Alpes-Maritimes), puis deux années à Villette (Isère), près de Saint-Laurent du Pont. En 1950, il est nommé à Tunis (Tunisie) où, dix ans durant, il assure l’aumônerie de l’hôpital de la Libération, tout en apportant un concours à la paroisse de Dubosville. Il y assure les chants, préparés avec la chorale et il enseigne le catéchisme aux plus petits. Frère sans histoire, il aime ériger la règle en absolu, en faisant parfois un but et non un moyen. Il rentre en France en 1960, est envoyé à Menton, puis à Florence et gagne Scherwiller (1961-1966). En septembre 1966, il gagne la maison de Lorgues (Var) à 84 ans. Il n’est pas le plus âgé ni le moins valide. De sa grande taille, il n’a perdu un pouce et ses cheveux n’ont pas blanchi. Il se promène quotidiennement, prend part à tous les exercices de la vie commune. Lorgues a le privilège de pouvoir fêter en 1972 ses 90 ans d’âge et ses 60 ans de sacerdoce. Le 6 février 1973, quand dix religieux de la maison reçoivent l’onction des malades des mains de Mgr Brand, il ne veut pas se joindre à eux en rétorquant qu’il n’en est pas encore là! Au Père Pellegrin qui un jour s’inquiète de sa santé et d’une menace de phlébite, il répond qu’il croit commencer à vieillir! Il meurt doucement le 8 janvier 1975, à 4 jours de son 93ème anniversaire. Il est inhumé à Lorgues le lendemain. Le Provincial, le P. Morand Kleiber, retenu à une réunion d’évêques et de supérieurs majeurs, s’est fait représenter par le P. Albert Heckel.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Documents Assomption, Nécrologe (I) 1975-1980, p. 4. Lyon-Assomption, avril 1975, p.17-19. Dans les ACR, du Père Arcade Muller, correspondances (1907-1962).