Bernardino (Cayo) DELGADO PENA – 1912-1994

Nouvelles de Layrac.
« On s’est enfin décidé pour la date de mon jubilé le 6 avril
[1964], pendant le Chapitre. Je vous invite mais je sais que vous ne
pourrez y assister. J’ai la joie de vous faire savoir que tout espoir de
récupérer la vue n’est pas perdue, je vais rentrer en clinique pour la 4ème
fois. Des choses me tracassent: le prochain chapitre général, la nomination
du provincial [de Bordeaux]. A mon avis, les Constitutions actuelles sont
très bien et je pense qu’au lieu de penser à les adapter aux temps
modernes, il vaudrait mieux les approfondir dans l’esprit du P. d’Alzon. Ce
serait mieux de faire tous ensemble notre retraite annuelle. Je ne veux pas
participer à toutes
ces sortes de réunions inutiles, tant de Pères que de Frères. En les
supprimant, je pense que
les directives des supérieurs seront plus obéies. On se réunit trop souvent
sous prétexte de renseignements. Il faut supprimer cet esprit de tolérance.
Je demande au chapitre 6 ans de profession temporaire et un mois de
noviciat avant la profession perpétuelle… ».

Fr. Bernardino au P. Picot, le mars 1964.

Bernardino (Cayo) DELGADO PENA

1912-1994

Religieux espagnol de la Province de France.

Un religieux espagnol en France.

Benjamin d’une famille de 6 enfants, Cayo Delgado Pena naît le 29 février 1912 à Caleruega, au diocèse d’Osma, en Vieille-Castille. Particularité d’une date qui ne lui reconnaît qu’un anniversaire tous les quatre ans et particularité d’un lieu dont il est fier à cause de son illustre compatriote Saint Dominique! Malgré une malformation de la main droite, il apprend et exerce le métier de tailleur. Il connaît l’Assomption par un prêtre ami de sa famille lequel a étudié à Bordeaux. Après un temps de postulat à l’alumnat d’Elorrio en Biscaye, dont le P. Fortuné Badaroux est le supérieur, il prend l’habit à Pont-l’abbé d’Arnoult (Charente- Maritime) le 30 septembre 1934 et le nom de Frère Bernardino. Il devient profès le 1er octobre 1935, reste un an au noviciat et retourne à Elorrio en 1936. Il doit repasser la frontière en 1937, chassé par les Rouges, les Républicains. Le Frère Bernardino passe d’abord sept ans à Bordeaux-Caudéran (Gironde), au 22 avenue de Mirande. Il collabore avec le Frère Pierre Moisan aux services de la maison provinciale de Bordeaux et de la paroisse Notre-Dame de Salut. Il fait sa profession perpétuelle le 1er octobre 1938. De 1944 à 1947, il retourne à Elorrio, au service de l’alumnat reconstitué. A la demande du P. Régis Escoubas Provincial de Bordeaux, il vient à la maison d’études de Layrac (Lot-et-Garonne). C’est sa dernière et plus longue affectation (1947-1994). Dans son atelier de couture infatigablement, il produit soutanes et camails pour les religieux de la maison et ceux de la Province, recoud et rapièce les vêtements usagés. Les jeunes frères étudiants se souviennent de ce religieux au parler typique, accrochant ses interlocuteurs dans le grand cloître ou dans un couloir avec ses doigts en forme de pince,

alors qu’il est déjà fortement handicapé par une mauvaise vue et qu’il se cogne aux portes. Le Frère Bernardino est un sage qui ne tient pas rancune des tours espiègles que cette jeunesse lui a parfois joués. En février 1970, il est affilié à la Province de Bordeaux comme à une seconde patrie, sans oublier ni la première d’origine ni sa nombreuse famille castillane.

Apaisé et apaisant, avec les misères de l’âge.

L’âge peu à peu aggrave les infirmités du Frère Bernardino: cécité et surdité. Il reste néanmoins actif le plus possible se promène en tâtonnant au-dessus du vallon, écoute la radio, s’intéresse à la vie des frères, prie beaucoup, est habité par une grande joie. Comme son existence, discrète est sa mort, le vendredi 4 mars vers 23 heures, après une demi-heure d’agonie. Pris d’un soudain malaise, il appelle, reçoit les sacrements et s’éteint en priant avec ceux qui l’entourent. Ses obsèques sont célébrées le lundi 7 mars. Le P. François Rumeau prononce l’homélie: « Pendant toute votre vie et spécialement au cours de ces dernières années, vous avez été un modèle de vie religieuse assomptionniste. Nous gardons de vous le souvenir d’un religieux rayonnant de paix, d’un religieux fraternel ». Autre témoignage qui est rappelé, celui du Frère Bernard Holzer, assistant général, en visite quelque temps auparavant à Layrac: « J’ai rencontré le Frère Bernardino, il y à peine quinze jours et je l’ai trouvé en pleine forme, ne se plaignant d’aucun mal particulier, même pas de sa cécité. Il me dit alors le lundi 21 février en fin d’après-midi: je me repose, j’écoute la radio et je prie. Toute ma vie, tout mon programme est celui des moines: ora et labora. Je n’ai aucune maladie. Si je ne dors pas, je prie’. Il me dit aussi qu’il a été visité par la grâce et qu’il a fait l’expérience d’un Dieu de bonté. Témoignage impressionnant de simplicité et même de naïveté évangéliques ». Le Frère Bernardino est inhumé dans le cimetière de Layrac, au caveau des religieux.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Documents Assomption, Nécrologe (VI) 1994-1995 p. 10-11. Nécrologie France 1994, p. 303-304. Boletin de los Asuncianistas de Espana, marzo 1994, p. 6-7. Les ACR contiennent 6 lettres du Frère Bernardino Delgado. Notices Biographiques