Boniface (Jean-Joseph) MOITROUX – 1886-1959

Lisieux, 1957.
« Mon séjour à Lisieux où j’ai remplacé l’aumônier, s’achève. C’est pour
moi un temps providentiel. Chez sainte Thérèse qui s’est attribué le rôle
de prier pour les prêtres, j’ai intéressé le Carmel à notre cas, celui de
notre confrère Brancart qui s’est laissé
enrôler chez les Protestants pour y prêcher des missions populaires dont
ils tirent le meilleur parti. L’année
dernière pendant la semaine de prières pour l’Unité, j’ai fait
une tentative de rapprochement avec lui à l’Hôtel de Ville de Charleroi.
Nous y étions à trois et nous nous sommes tous adressés, catholiques,
orthodoxes,
protestants, au même Père des cieux. Mais les orateurs se
sont laissé largement dépasser, malgré le magnifique exposé
de la doctrine, par tout ce qui est extérieur, la mise en scène. J’ai passé
une journée entière dans la maison qui fut celle de la famille Martin à
Alençon, là où Thérèse est venue au monde et où sa mère est morte. Après,
elle a vécu aux Buissonnets. Je suis allé aussi chez l’horloger du Pont
Neuf à Alençon, cité dans une édition de Histoire d’une âme. Raison de plus
pour continuer de faire violence au ciel. La prieure d’Alençon a connu M.
Grant qu’elle a soigné à ses derniers moments ».

Religieux hollandais de la Province de Belgique.

Gardien à Jérusalem.

Né à Ruremonde (Hollande) le 25 juillet 1886, Jean- Joseph Moitroux fait ses études secondaires dans les alumnats de Saint-Trond (19011904) et de Taintegnies (1904-1906) en Belgique. Il entre au noviciat de Louvain, le 11 septembre 1906, sous le nom de Frère Boniface et y fait profession le 11 septembre 1907. Après deux ans de professorat à Zepperen (1908-1910), il étudie la philosophie à Louvain (1911-1913). Profès perpétuel le 11 septembre 1908, il est envoyé à Jérusalem en 1913 pour commencer ses études de théologie. Mais en 1914, les Turcs entrent en guerre aux côtés de l’Allemagne. Professeurs et étudiants sont expulsés, sauf le Frère Boniface, de nationalité allemande depuis peu. Quelque temps avant la guerre en effet, ses parents sont venus s’établir en Allemagne, à Aix-la-Chapelle et se sont fait naturaliser, leur fils bénéficiant du même droit. Il est établi gardien de la maison de Notre-Dame de France, évitant ainsi la spoliation du lieu mais ne pouvant empêcher son occupation par l’Etat-Major turc. Quand les officiers prennent leur repas dans le jardin, le Frère Boniface sauve ce qu’il peut en fait de tables, de nappes, de couverts et de serviettes. Il veille aussi sur la propriété de Saint-Pierre en Gallicante, tout en continuant ses études de théologie chez les bénédictins allemands du couvent de la Dormition au mont Sion. Il est ordonné prêtre le 18 février 1917. Le 8 décembre, les Turcs sont chassés de la ville par les Anglais. Le P. Léopold Dressaire reprend possession des lieux. Le P. Boniface quitte Jérusalem en 1920.

De poste en poste, un serviteur méthodique et délicat.

Les supérieurs envoient le P. Boniface à l’alumnat de Boxtel. Il reprend sa nationalité hollandaise.

Il y est dix ans professeur d’allemand et trois ans supérieur (1920-1933). En quittant Boxtel, le P. Boniface passe deux ans à la résidence bruxelloise de Marie-la-Misérable (Woluwe), de 1933 à 1935. Après un nouveau séjour de deux ans à Jérusalem (1935-1937), le P. Boniface est nommé aumônier des Oblates à Froyennes (1937-1940) où il vit les deux événements de la mort du P. Norbert Claes et l’exode de 1940. Puis il devient aumônier des malades mentaux chez les Frères de la Charité à Manage (1940-1955). Homme bon, délicat et sensible, il remplit son ministère avec régularité et minutie, établissant une fiche sur chaque malade, enseignant, confessant, donnant des conférences de spiritualité aux Frères. Il y connaît aussi la contradiction et l’incompréhension. On lui reproche parfois de ‘célébrer la messe comme un évêque’: son souci du détail et de la minutie le pousse à tout noter dans de petits carnets et cette habitude est parfois perçue comme un signe de petitesse d’esprit ou d’inadaptation. En 1955, le P. Boniface quitte Manage pour Jumet (1955-1958). En 1958, il est mis au repos à Putte, avec cependant la charge d’économe pour la petite communauté de 4 membres qu’il remplit consciencieusement, avec l’esprit méthodique qu’on lui connaît. Un examen médical révèle alors qu’il est atteint d’un cancer au péritoine. Le Père Boniface est administré le lundi 24 août 1959. Il n’oublie pas de régaler ses confrères d’une bonne bouteille, car ce jour est pour lui un jour de joie. Il meurt le jeudi 2 septembre 1959 dans l’après-midi, dans sa 74ème année, non sans avoir brûlé tous ses petits carnets. Les obsèques ont lieu dans l’église de Putte avec le concours de nombreux religieux de Belgique et de Hollande. Le Père Boniface est inhumé à Putte-Kapelle. On rappelle ses qualités de religieux pieux et sensible, très porté à la perfection du détail. On reconnaît aussi ses travers humains: homme gauche, peu psychologue, très austère, sans que cela puisse diminuer l’attachement qui lui est porté et l’admiration que l’on a ressentie à vivre en sa compagnie.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: B.O.A. juin 1960, p. 97-98. Lettre à la Famille, 1960, no 281, p. 299-300. Contacts, octobre 1959, no 102. Lettre du P. Boniface Moitroux, Lisieux, 1er septembre 1957. Du P. Boniface Moitroux, dans les ACR, rapports sur Notre-Dame de France à Jérusalem pendant la guerre 1914-1918, sur Boxtel (1929-1932), Woluwe (1932-1933), sur Manage (1942- 1946), sur Jumet-Hamendes (1955-1958), correspondances (1912- 1957).