Elisée (Joseph-Marie-Désiré) RATHOIN – 1896-1977

Worcester, 1933.
« Nous n’aimions guère, de ce côté de l’Océan, les arguties spéculatives
des Européens, nous n’y entendons goutte, nous préférons ce qui est
tangible, réel, pratique comme dirait Victor Hugo, les Choses Vues. Nous
préférons l’illustration des idées par les photos. Voici la description de
la Villa d’Alzon à Baker Lake: serait-ce la maison de repos d’un descendant
de ces fiers colons du XVIème siècle ou la résidence d’été d’un de ces
capitaines d’industrie
moderne? Ni l’une ni l’autre. C’est le nom d’un cottage de la Faculté du
collège de l’Assomption. Où se trouve-t- il? Roulez rapidement en voiture
au sud de Worcester, sur la belle route de Webster, tournez à Oxford et
nous voici dans les bois de Baker Pond. Quelle senteur et quelle fraîcheur!
Dilatez vos poumons, aspirez cet air pur,
et malgré les cahots de l’auto, rêvez aux charmes des bois ensoleillés. Un
dernier détour et vous arrivez à une petite
prairie bordée de deux ou trois antiques bungalows qui semblent se baigner
dans les eaux profondes d’un lac argenté. A travers des pins et des
bouleaux, se jouent à vos yeux les couleurs claires d’une élégante maison
de bois. Elle paraît bien grande, assise sur ses fondations de pierre …
».

Notices Biographiques A.A

Religieux de la Province de Paris. Une formation en temps de guerre. Joseph, Marie, Désiré Rathoin est né le 27 avril 1896 à Fleury-les-Aubrais (Loiret). Il fait ses études primaires à l’école des Frères d’Olivet et à l’école Saint-Léon de La Ferté. C’est le P. Didier Nègre qui le recrute dans un orphelinat tenu par des religieuses et qui le conduit à Zepperen (Belgique) en septembre 1908. Les classes de grammaire terminées, Joseph, en 1911, gagne pour les deux années d’humanités les bords enchanteurs du Lac Majeur à Ascona (Suisse). Sa rhétorique achevée, il décide d’entrer à l’Assomption et, le 14 août 1913, à Limpertsberg, avec 34 compagnons, il reçoit l’habit religieux des mains du P. Emmanuel Bailly, sous le nom de Frère Elisée. La guerre survient, le Luxembourg est envahi début août 1914. Toutes les relations sont coupées entre le noviciat et les autres maisons de la Congrégation. Le Frère Elisée ne peut prononcer ses premiers vœux que le 19 mai 1918 à Louvain, après avoir connu les conditions de vie qui obligent les religieux du noviciat à travailler dans des fermes et à étudier vaille que vaille la philosophie. En 1919, il passe quelques mois à la caserne à Montargis. Le 6 novembre 1921, il peut prononcer ses vœux perpétuels et le 5 août 1923 être ordonné prêtre par Mgr de Wachter, auxiliaire de Malines. Une carrière professorale mouvementée (1923- 1947). En septembre 1923, le P. Elisée est envoyé au collège de l’Assomption à Nîmes (Gard). Le collège à l’époque vit à l’étroit, Boulevard Jean-Jaurès, dans les locaux d’un ancien pensionnat. Il y est professeur de 6ème, puis de 5ème, sous le supériorat du P. Arthur Deprez. Compétent, méthodique, dévoué, il est apprécié de ses élèves: il est libéral, indulgent et conciliant, A.A le P. Elisée n’est pas toujours maître de ces petits méridionaux que doit reprendre l’autorité sans défaillance des préfets de discipline. En 1927, il rejoint la maison de vocations tardives de Saint-Denis, au Nord de Paris, que dirige le P. Didier Nègre. En août 1929, le P. Clodoald Sérieix, nouveau Provincial de Paris, le désigne pour le collège de Worcester (U.S.A.) où une classe de 3ème réclame un titulaire pour le français et le latin. Le Père Elisée s’insère avec bonheur dans le corps professoral et la nombreuse communauté d’alors. Lorsqu’en 1936, de jeunes religieux de citoyenneté américaine peuvent prendre la relève, il rentre en France. Il est affecté à l’alumnat de Vérargues (Hérault) où on lui confie les cours d’histoire et de géographie. Il a la charge également de deux petites communautés paroissiales des environs, Saturargues et Villetelle (1936-1947). Le professeur pâtit malgré son indignation véhémente devant l’indiscipline et les facéties de son jeune auditoire qui sait pouvoir compter sur la bonté paterne du P. Elisée. En 1936, il est victime d’une chute à vélo qui lui laisse une légère boiterie. Cela ne l’empêche pas d’être mobilisé en 1939-1940 dans un service de santé. Religieux serviable, brusque sans méchanceté, au franc-parler vif, prompt à l’emportement mais vite apaisé, il se montre toujours prêt dans son ministère à sortir quelqu’un de l’embarras. En communauté, c’est un confrère charmant, pétillant d’esprit et de saillies, bon vivant. Vicaire à Saint-Christophe de javel et à Arras. En 1947, le P. Elisée est nommé à la paroisse parisienne de javel, à Paris où il reste 17 ans (1947-1964). Il est vicaire, économe et factotum. Le P. Raymond Bourré qui y est son confrère, le compare volontiers aux trois apôtres, Nathanaël, Pierre et Thomas. De Nathanaël, il a la naïveté, le caractère puéril et même naïf, acceptant d’emblée ce qui lui est dit, mais aussi franc jusqu’à l’impertinence. De Pierre, il a la totale générosité et le zèle parfois intempestif. Grâce à sa complaisance, son bureau et l’église sont devenus le déambulatoire des clochards, le P. Elisée se fait leur généreux aumônier et leur ardent défenseur. Fougueux, emporté par son élan, il lui arrive dans ses homélies de laisser échapper quelques impairs ou formules approximatives. De Thomas, il a aussi l’incrédulité tenace devant certaines évidences. Comment lui faire comprendre qu’une chaudière réglée à 30′ condamne le logis au froid, tout en consumant inefficacement du charbon, ou qu’installer un clochard à la crypte avec paillasse et couvertures, c’est risquer l’incendie? En septembre 1964, le P. Elisée est transféré à la communauté de la maison du P. Halluin à Arras (Pas-de-Calais), en qualité d’aumônier de la chapelle Saint-Antoine. Il y est un confesseur éclairé et un chapelain exemplaire. Il a le don d’attirer, se laisse déranger à toute heure. Il arpente les rues de la ville, de son pas rapide et saccadé, pour visiter malades et infirmes. Il aime fleurir la chapelle en toute saison et rehausse les célébrations de chants pour les cérémonies. Un jour de mars 1972, il est littéralement terrassé par la maladie. On le conduit à Chanac (Lozère) le 29 mars 1972 pour lui faire prendre un peu de repos. Il est hospitalisé à plusieurs reprises à Mende. Il meurt dans la nuit, le 23 janvier 1977. Il est inhumé le mardi 25 janvier à Chanac, au cimetière des Vals.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Documents Assomption, Nécrologe (1) 1975-1980, p. 40-41. Paris-Assomption, juin 1977, n° 151, p. 1-IV. Lettre du P. Elisée Rathoin, Worcester, 28 septembre 1933. Dans les ACR, du P. Elisée Rathoin, correspondances (1909-1933). Le P. Elisée a donné des chroniques dans la revue L’Assomption (Worcester, 1930-1936). Notices Biographiques