Emiliano MINO – 1881-1937

De Livry à Rome.
« A Mâcon, dès que le train se remit en marche, nous nous enveloppons tous
les quatre de nos couvertures afin de dormir un peu. Mais ce ne fut pas
pour longtemps, du moins pour le Frère Albert Garot et moi. Nous avions
tous les deux le nez à la fenêtre, car il faisait un beau clair de lune. A
tout moment le Frère Albert
me demandait en regardant ces maigres collines. ‘Sont-ce les montagnes de
la savoie?’ Et moi de rire, vous le comprenez bien. Enfin apparaît le lac
du Bourget. Le Frère Garot s’extasiait en considérant le lac et les hautes
collines qui l’environnent couvertes de neige. Pour moi j’attendais
avec impatience que la Maurienne arrivât. Parvenu à Chambéry, je me disais:
‘Je puis dormir un pets. Aussitôt dit, aussitôt fait. Je m’enveloppe et me
voilà parti en me disant: ‘Je me réveillerai bien pour voir ma maison’. Les
gares passent, ma maison de Maurienne passe. A Modane on me secoue:’Viens
vite on change de train’. Je
n’en revenais pas, j’avais laissé passer la Savoie sans la saluer. A Turin
nous nous sommes arrêtés chez les Pères
Salésiens et nous sommes ensuite allés prier à l’église de la Consolata
pour toutes les intentions du P. Picard ».

Religieux italo-français de la Province de Lyon.

Une vie bien remplie.

Ernillano naît à Camandona, au diocèse de Biella, au Piémont italien, le 23 janvier 1881. A deux ans, il devient orphelin de mère. Son père s’établit maçon en Savoie, à La Chambre. Admis à l’alumnat de Notre-Dame des Châteaux (Savoie), le 11 septembre 1893, il y étudie pendant 4 ans (1893- 1897). Il entre comme postulant en août 1897 au noviciat de Livry (Seine-Saint-Denis) où il prend l’habit, l’année suivante, sous le nom de Frère Emilien, le 4 septembre 1898, demandant à vivre la vie religieuse de Frère convers. Il est envoyé de septembre 1897 à juin 1898 à la maison de Rome pour des travaux de dactylographie. A Livry, il passe sous la direction du P. Michaël Lebigot, chargé du noviciat des 18 religieux convers de la communauté (1898-1900). Au moment de expulsions, il part pour Phanaraki (Turquie), mais très vite il est employé pour des services intérieurs à la communauté de Kadi-Keuï, se faisant commissionnaire universel. Il apprend très rapidement le turc et le parle avec une facilité désarmante pour dédouaner et expédier les colis. Il prononce ses premiers vœux le 8 septembre 1901 et ses vœux perpétuels le 4 septembre 1907. Le Frère Emilien reste à Kadi-Keuï jusqu’à la première guerre mondiale. Il est au service de l’économat général des maisons d’Orient organisé à Kadi-Keui: il obtient passeports et teskérés, cherche et conduit les voyageurs de passage, se fait tour à tour menuisier, infirmier, dactylographe, comptable. Rien ne le rebute. Adroit de ses mains, il tond les cheveux et désarme toutes les tracasseries de l’administration turque par son sourire. A la douane, il faut passer par pas moins de 17 bureaux pour arriver à être en possession du colis attendu. A la déclaration de guerre en 1914, il connaît le sort de tous les religieux étrangers:

il est expulsé et gagne le collège de Philippopoli. En novembre 1915, nouvel exil, la Bulgarie ayant choisi le camp des Puissances Centrales. Il faut gagner la Russie par la Roumanie et, après trois semaines d’un voyage épuisant par Kiev et Moscou, subir le froid sibérien à Saint- Pétersbourg, par -44′. De la Russie, la Finlande est atteinte en janvier 1916 et gagner Stockholm en Suède. De là le groupe parvient en Norvège au port de Bergen d’où il est possible de S’embarquer pour l’Angleterre. Les voyageurs arrivent à Newcastle le 10 janvier par une mer démontée qui met tout le monde sur le flanc mais protège des sous-marins ennemis. Le Frère Emilien arrive avec quelques confrères sur le sol français, le 31 janvier. Il est destiné à Marseille où l’accompagne le 12 février le P. Félicien Vandenkoornhuyse. Il rend service à tous les religieux soldats qui transitent par Marseille, résidant à la Procure du Boulevard Périer. Il y est victime d’une intoxication au gaz pendant son sommeil. Le 17 décembre 1919, le Frère Emilien peut regagner l’Orient et se met à reconstituer les biens des maisons assomptionnistes pillées ou dévastées pendant la guerre. Peuvent être remises sur pied les missions de Koum- Kapou, de KadiKeffl et de Haïdar-Pacha (Oblates). En 1923, le P. Gervais Quenard est nommé supérieur général, il prend avec lui le Frère Emillen pour la maison de Rome. Ce dernier est chargé en 1928 du déménagement de l’ancienne résidence, le palazzo Flippani de l’Ara Caeli, au profit d’une nouvelle construction sur les bords du Tibre, Tor du Nona. Chaque année il peut bénéficier du pèlerinage à Jérusalem. grâce à sa connaissance de l’Orient, à son savoir-faire, à son caractère joyeux et débrouillard, il arrive à bout de toute situation, contente tout le monde et sait mettre de l’harmonie dans les groupes. En 1934, il est attaché à Paris à l’œuvre de Notre- Dame de Salut. En 1932 il a la joie d’accompagner le P. Gervais Quenard pour la visite des maisons du Sud-Ouest de la France (février) et pour la visite des communautés en Orient (avril- juin). il meurt encore jeune, à l’aube de sa 58ème, le 7 mars 1937. Les obsèques sont célébrées à Paris, en la paroisse Saint-Pierre du Gros-Caillou, le mardi 9 mars. Le corps du Frère Emilien est inhumé dans le caveau de famille à Camandona au Piémont (14 mars), selon la demande exprimée par la famille.

Bibliographies

Bibliographie et documentation; Lettre à la Dispersion 1937, n° 687, P. 77; n° 689, P. 93-96; n° 691, p. 109-116; n° 693, P. 125-152; n° 696, P. 149-156; n° 702, p. 197-208. L’Assomption et ses OEuvres, 1937, n° 429, p. 49; n° 432, p. 100-103; n° 433, p. 114-116; n° 434, p. 139-142; n° 435, p. 154-158; n° 436, p. 170-173; n° 437, p. 197-199. Notice biographique du Frère Emiliano Mino par le P. Marie-Alexis Gaudefroy. Récit de voyage par le Frère Emilien Mino dans La Croix des novices, n° 19, 28 septembre 1897. Dans les ACR, du Frère Emiliano Mino, correspondances (1906-1933)