Religieux belge. Une vie brève, achevée dans la misère et la détresse. Pierre-Louis Struyf est né à Anvers (Belgique), le 31 janvier 1878. Il fait ses études secondaires à l’alumnat de Taintegnies (1891-1894), achevées en France à Clairmarais (Pas-de-Calais), de 1894 à 1896. Le 6 septembre 1896, il reçoit, sous le nom de Frère Floribert, l’habit religieux au noviciat de Livry (Seine-Saint-Denis) où il devient profès temporaire l’année suivante et profès perpétuel le 6 septembre 1898, après un temps passé au scolasticat du Breuil (Deux-Sèvres) pour les études de philosophie qu’il y termine en 1899. Au moment des perquisitions, des expulsions et du ‘procès des Douze’, le Frère Floribert se trouve à Paris qu’il quitte pour Louvain en vue de ses études de théologie, sous la direction du P. Merklen auquel le lie une profonde amitié (1900-1906). Il est ordonné prêtre le 25 juillet 1904 et est attaché à l’équipe enseignante. Il est envoyé ensuite à la mission assomptionniste du Chili, à Rengo (1907-1909) où son père, Pierre-Jean, postulant déjà âgé, vient le rejoindre. Sans doute atteint par les événements qui frappent la communauté de Louvain, décapitée de son équipe formatrice, il prend la décision de quitter la Congrégation et de se seculariser, refusant de regagner l’Europe comme le lui demande fortement le P. Emmanuel Bailly. Ce dernier est informé de la maladie mortelle qui frappe le P. Floribert dans la nuit du 19 mai 1909, se trouvant en situation irrégulière de religieux fugitif, fixé à Buenos-Aires (Argentine). Le P. Bailly rend compte de la situation difficile qu’a vécue le P. Floribert, en publiant dans une lettre-circulaire les différentes correspondances que ce dernier, repentant, lui a adressées in fine. Ces correspondances inspirent un sentiment de compassion devant une telle détresse matérielle et morale. Le nom du P. Floribert a figuré dans les colonnes du Nécrologe de la Congrégation. A.A Un fils prodigue. « C’est de mon lit que je vous écris ce petit mot. comme je vous le disais hier, 18, j’ai mis ordre à mes affaires; maintenant je suis prêt à partir! Je ne me fais plus illusion; ce matin, mercredi, j’ai eu, me dit-on, un long évanouissement; je l’avais senti venir, et, croyant que c’était la mort, j’ai fait appeler le prêtre. Il a bien tardé à venir! si bien que j’étais évanoui quand il m’a donné l’Extrême-Onction. Il m’a donné aussi l’absolution, m’a-t-on dit. J’en suis heureux, mais, bien que je ne me sente coupable de nulle faute, j’aurai bien voulu recevoir tous les sacrements en pleine connaissance. C’est une nouvelle épreuve, Dieu en soit béni. je me sens presque bien ce soir; on dit que le médecin m’a injecté quelque chose dans les jambes, et cela me fait du bien. Si je suis ainsi demain, je fais venir une voiture pour aller communier dans l’église, car, pour recevoir le bon Dieu en chambre, il n’y faut pas penser! Les curés disent quels ont trop à faire! Hier soir, j’ai fait demander par mon infirmier allemand la grâce de recevoir le bon Dieu en chambre. On lui a répondu que le quartier était trop loin et trop dangereux par ce temps de grèves! Et moi qui aurais pu dire la messe tous les jours, si je n’avais été si orgueilleux et si mauvais! Malgré la -fatigue, je me suis fait conduire à l’église de la Merci et j’ai communié. Mais j’avais présumé de ma force; à peine de retour, je me suis senti si faible que j’ai pensé mourir. Cependant aujourd’hui je n’ai pas eu de crachements de sang. Qui sait si la sainte Extrême-Onction ne va pas aussi fortifier un peu mon pauvre corps. Je le voudrais, car autour de moi je pourrais encore faire un peu de bien. L’Allemand qui me soigne me paraît être un protestant. Je lui ai demandé s’il était catholique, il m’a répondu qu’il était mon ami, y nada mas. Pauvre jeune homme! Et il paraît si bon! Il m’a promis de n’ouvrir pour personne la valise dans laquelle j’ai mis mes habits religieux, avec ce qui pourrait faire parler si je venais à mourir, et si je ne dois plus guérir, il la portera au Recteur des jésuites, auquel j’écris un mot pour expliquer ma situation. J’ai écrit hier soir un petit mot à ma famille et au Chili, tout cela, avec cette lettre, je J’enfermerai dans la valise. Car si je devais mourir d’une façon inattendue, je veux du moins que vous sachiez, mon bien-aimé Père, que les derniers instants de ma vie seront ceux d’un vrai enfant de l’Assomption (dont je me suis rendu si indigne hélas!) que je meurs cependant repentant et soumis en tout à la volonté de Dieu et de mes supérieurs de la terre. Demain, si je suis un peu plus vaillant, je vous écrirai une autre lettre que j’enverrai immédiatement. Si je ne devais plus pouvoir vous écrire et que ce mot soit le dernier, oh! alors, mon Père, jusqu’au ciel! Pardonnez-moi mes égarements, priez et faites prier pour moi… Comme le P. Fourier avait raison quand il me disait que mes emportements et mon orgueil pourraient un jour m’être très préjudiciables! Je demande pardon à tous de tous les scandales que j’ai donnés et je supplie mes frères qu’ils pilent pour moi, car je sens que j’aurai tant de Purgatoire à faire … ». Lettre du 19 mai 1909 au soir.
Bibliographies
Bibliographie et documentation: Registre du Personnel n° 392. Circulaire du P. Emmanuel Bailly, Rome 24 juin 1909. Du P. Floribert Struyf, correspondances (1902-1909). Lettre du P. Floribert Struyf au P. Merklen, Rengo, le 20 juin 1907. Notices Biographiques