Gabriel (Gustave-Alexis) JACQUEMIER – 1862-1924

Archéologue amateur.
« Le P. Athanase [Vanhove] vous a dit un mot des fouilles pratiquées au
lieu où doit s’élever le nouveau couvent de Saint-Pierre en Gallicante.
Permettez-moi d’ajouter quelques détails et veuillez vous reporter aux
photographies et croquis joints à cette lettre. Sur une étendue de 32 m. X
12m., on a enlevé toute la terre jusqu’au rocher:
1690 m3 ont été transportés à dos d’âne au fond du terrain. Le rocher mis à
découvert est très accidenté. On aurait pu croire qu’il se relevait vers le
sud. C’est le contraire qui a lieu. Le P. Athanase vous a déjà dit que
l’escalier n’a pas été retrouvé. On n’a découvert que l’égout, taillé dans
le roc, et recouvert de dalles par endroits. Nous espérions que l’escalier
serait conservé au moins sous le chemin, endroit non encore fouillé quand
le P. Athanase vous a écrit. L’enlèvement de la terre ne nous a révélé
aucune marche. Nous avons continué le sondage à travers les pins sur une
longueur de quelques mètres et là encore nous n’avons découvert que
l’égout… Tout l’ensemble semble faire partie de la porte du Qorban juif,
ce que croit une élève de Robinson et conteste le P. Lagrange ». Au
P. Germer-Durand, Jérusalem,
31 juillet 1914.

Religieux français.

Une vocation avancée.

Gustave-Alexis Jacquemier est né le 23 mars 1862 à Viry, dans le canton de Saint-Julien (Haute-Savoie). Son père instituteur, Gabriel, l’a déjà initié à la culture lorsque Gustave se présente, âgé de 16 ans, à l’alumnat de Notre-Dame des Châteaux (Savoie) en 1878. En 1880, il passe à l’alumnat d’humanités d’Alès (Gard) où il ne reste qu’un an (1880-1881). Le P. François Picard lui donne l’habit religieux au noviciat d’Osma (Espagne), le 2 octobre 1881, où selon la coutume de l’époque, sous le nom de Frère Gabriel -prénom de son père déjà décédé-le jeune Gustave prononce ses vœux perpétuels, le 2 octobre 1883. Il collabore aussi à la rédaction des Vies de saints, publié en supplément au Pèlerin. Jeune professeur à l’alumnat de Mauville (Pas-de-Calais) de 1883 à 1884, il se rend ensuite à Rome pour les études de philosophie et de théologie (1884-1888). Elève studieux et doué des PP. Buonpensiere et Lepidi, il y décroche un double doctorat de philosophie et de théologie. Il assimile de façon personnelle la doctrine de saint Thomas d’Aquin et se révèle à sa manière un modèle de précision, de logique et de clarté. Le Frère Gabriel est ordonné prêtre par Mgr Lenti, à Rome, le 10 avril 1886. Excellent compagnon, d’un esprit porté à l’humour et même à la vertu d’eutrapélie chère à Aristote, il excelle dans la parodie et le genre cocasse. Dérouté par les obstacles pratiques, très timide, impressionnable, il fait ses premières armes de supérieur à l’alumnat de Mauville (1888-1890).

Un formateur de talent, disponible et modeste.

Très vite, le P. Picard nomme le P. Gabriel professeur dans les noviciats et maisons d’études: à Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis), de 1890 à 1891, à Phanaraki en Turquie, de 1891 à 1895; à Kadi- Keuï, de 1895 à 1900; à Jérusalem, de 1900 à 1904;

à Kadi-Keuï de nouveau, de 1904 à 1905; à Phanaraki, de 1905 à 1906; à Jérusalem, de 1906 à 1914; à San Remo en Italie, de 1915 à 1916; à Fara Sabina, dans les environs de Rome, de 1916 à 1917; à Rome, de 1917 à 1919 et enfin à Louvain, de 1919 à sa mort, survenue le mardi 4 mars 1924. Professeur de théologie dogmatique, le P. Gabriel aurait pu se faire un nom dans le monde intellectuel de son temps, si son caractère modeste et volontairement effacé ne l’avait toujours tenu à distance de toute notoriété d’écriture. N’improvisant rien, de haute culture et d’esprit ouvert, il se donne pour tâche d’instruire tous ses étudiants avec méthode, esprit de synthèse et clarté d’exposition. Toujours nourri de la pensée de son maître, saint Thomas d’Aquin, il est sans doute l’un des Assomptionnistes qui connaît le mieux le Docteur Angélique. Très prudent, il ne se lance pas dans des formes aventureuses de modernisation du thomisme qui, à l’époque du modernisme, sont fatales à tant d’intellectuels et de théologiens. L’aventure doctrinale n’est pas son fait. Il se tient à l’écart des controverses qui agitent si fortement le monde ecclésial de la philosophie et de la théologie. Les jours de rentrée, il se taille un vrai succès par un discours latin magistral et humoristique. Aux fêtes de l’Epiphanie, il y va de son discours en prose et en vers, pétillant de verve et plein d’esprit. Son violon d’Ingres est l’archéologie. Aux côtés du P. Germer-Durand à Jérusalem, il s’adonne avec passion à des recherches sur la topographie biblique. Il collabore au Guide de Palestine, oeuvre collective des professeurs assomptionnistes de Jérusalem qui, en son temps, fut le meilleur en la matière. L’identification du palais de Caïphe sur le site de Saint-Pierre en Gallicante est une thèse aujourd’hui abandonnée: elle vaut au moins à l’Assomption et à Jérusalem le début des travaux d’un sanctuaire où peut être évoquée avec émotion la passion du Christ. Très tôt affligé de varices et d’infirmités handicapant la marche (ongle incarné), le P. Gabriel n’est ni un bon routier, ni un vaillant cavalier ni même un preux nageur. Atteint de diabète, il ne connaît pas de vieillesse invalidante puisqu’il meurt à 62 ans, à Louvain, au sein de la jeunesse assomptionniste étudiante. Il est inhumé au cimetière de Parc.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Lettre à la Dispersion 1924, n° 83, p. 53; n° 84, p. 64-65; n° 85, p. 69-74; n° 86, p. 81-84; n° 89, p. 103-106; n° 111, p. 282-284; n° 112, p. 289-291; n° 114, p. 306-307; n° 115, p. 314-315; n° 117, p. 329-330; n° 118, p. 338-340; n° 119, p. 343-347; n° 135, p. 478-191. Polyeucte Guissard, Portraits Assomptionistes, p. 183-196. L’Assomption, 1924, n° 274, p. 74-75. Notice sur le P. Gabriel Jacquemier par le P. Marie-Alexis Gaudefroy. Dans les ACR, du P. Jacquemier, correspondances (1886-1923). Le P. Jacquemier a fait une étude sur la grotte de Saint-Pierre en Gallicante (1908) et a co-produit avec le P. Dressaire l’opuscule sur le Palais de Caïphe (1905). On a gardé de lui son cahier de noviciat (1882). Le P. Gabriel Jacquemier a également écrit des articles dans les Echos d’orient.