Gauthier (Germain) FILLIOL – 1898-1918

Souvenirs d’un confrère.
« Il n’y a plus de doute pour moi maintenant, c’est bien le petit Frère
Germain Filliol, classe 1918, Chambéry, matricule 1688, qui a été tué dans
la bataille du Kemmel, le
21 avril, à la tombée de la nuit, à 50 m. de la ferme Aikraff, côté Ouest
… Je l’avais vu en mai 1917, il y a un an à Grenoble, arriver à la
caserne. De tempérament chétif, il se pliait difficilement aux exercices
d’assouplissement intensifs qu’on lui faisait subir. Mais il acceptait
quand même toutes ces souffrances, de bon cœur, avec une tranquillité d’âme
qui ne se démentait pas. Il regrettait de ne pouvoir assister à la messe et
communier, même le dimanche; et ce fut sur ses instances que ses camarades
séminaristes et lui firent une démarche auprès de leur capitaine pour
obtenir le dimanche matin une heure de liberté. Je ne l’ai pas revu depuis
juin 1917 et la nouvelle de sa mort m’a appris sa présence au 99 régiment
de ligne. Comme j’aurais été heureux de retrouver un benjamin, afin de
raviver auprès de lui l’ardeur de ma vie religieuse! Ame humble, sainte que
Dieu a cueillie
avant même qu’elle ait donné toute sa valeur.

P. Joseph Arsène.

Gauthier (Germain) FILLIOL

1898-1918

Religieux français, novice mort à la guerre.

Le frère du P. Marie-Germain Filliol.

Germain Filliol naît à Lanslevillard en Savoie le 14 septembre 1898. Son frère Joseph, né en 1902, reprend, par affection et souvenir fraternels, en devenant en 1920 également religieux de l’Assomption, le prénom de ce frère mort à la guerre en 1918 qui avait choisi à sa vêture le nom de Frère Gauthier. Germain devient alumniste à Vinovo (Italie) en novembre 1910. Il y poursuit ses études jusqu’en août 1914 et rejoint Ascona pour deux années scolaires (1914-1916). Laborieux et appliqué, il peine dans les études mais laisse à son supérieur, le P. Damascène Dhers, le souvenir « d’un jeune bon, pieux, désireux de bien faire, adroit au travail manuel, sans doute timide, mais docile et obéissant ». Germain reçoit l’habit assomptionniste au noviciat de Notre-Dame de Lumières (Vaucluse), le 26 juillet 1916 et prend le nom de Frère Gauthier. Les rapports de l’époque vantent sa maturité d’esprit et d’âme ainsi que sa volonté d’ouverture de conscience. Plutôt silencieux de tempérament, très concentré, mais très cordial avec ses confrères malgré une vivacité de caractère parfois saillante. Chargé du soin de la sacristie, il apporte au soin de sa charge un savoir- faire ingénieux. Son noviciat ne dure que 8 mois (juillet 1916-février 1917). Le 4 avril 1917, il doit remplir ses obligations militaires. Il est affecté pour la préparation à Grenoble (Isère), puis Donzère près d’Aiguebelle (Drôme).

Mort au champ d’honneur.

Très vite affecté dans un régiment de combat, le Frère Gauthier gagne Belfort, puis l’Alsace et le front sur la Somme. Les circonstances de sa mort sont globalement connues par une lettre du curé de Lanslevillard, l’abbé Joseph Henri, au P. Didier Nègre, ami de la famille Filliol: « J’ai une bien triste et pénible nouvelle à vous annoncer.

Un de vos anciens élèves, Germain Filliol, vient d’être tué sur le front belge le 22 avril [1918] par un éclat d’obus. La nouvelle de la mort est arrivée samedi aux parents par l’intermédiaire du frère aîné. Veuillez bien avertir son frère Joseph de ce grand malheur, ainsi que le Directeur de la maison de Notre-Dame de Lumières. Je suis bien affecté par la mort de ce bon jeune homme qui donnait les plus belles espérances et qui voulait se consacrer à la vie religieuse. Dieu l’a vu mûr pour le ciel; aussi latin appelé à lui. Il n’y avait que quelques jours qu’il était en première ligne dans les tranchées. Il est tombé victime du devoir et de l’obéissance. Il était prêt pour le sacrifice que Dieu demandait de lui. Ce jeune homme venait de passer ici à Lanslevillard ses 10 jours de permission au courant du mois de mars. Il était reparti le 22 mars. Il avait le cœur bien brisé. On aurait dit qu’il prévoyait déjà qu’il ne reverrait plus ses parents et son pays natal, et voilà qu’un mois après il est tombé… ».

D’après d’autres renseignements recueillis notamment par le P. Joseph Arsène qui se trouve sur les mêmes lieux, on apprend ensuite que le Frère Gauthier a gagné en avril 1918 les tranchées aux abord du mont Kemmel et que lors d’une grande offensive aux alentours du 20-21 avril, près de la ferme Aikraff, en avant de Millekruis, il est déchiqueté par un obus de 210. On ne retrouve rien de son corps. Un numéro sur une tombe militaire T14 et une plaque de plomb Pt 131 sont les seuls indices d’une localisation et d’une identification postérieures. A titre posthume, il obtient en 1921 la Médaille militaire.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Lettre à la Dispersion, 1918, n° 510, p. 353; n° 512, p. 392-393; 1919, n° 569, p. 272. L’Assomption 1918, n° 213, p. 45-46. Notice biographique par le P. Marie-Alexis Gaudefroy. Lettre du P. Joseph Arsène, 15 mai 1918 (in l’Assomption aux armées). Dans les ACR, quelques correspondances du Frère Gauthier Filliol (1917). Notices Biographiques