Religieux de la Province de France. Biographie. Yves-Marie Sallou est né à Plouguerneau (Finistère) le 28 février 1918. Après ses études secondaires à Saint-Maur (Maine-et-Loire), de 1929 à 1933, et à Melle (Deux- Sèvres), de 1933 à 1935, il entre au noviciat de Pont- l’Abbé-d’Arnoult (Charente-Maritime) où il prend l’habit le 29 septembre 1935, sous le nom de Frère Guesnou. Profès annuel le 29 mars 1937, il se rend au scolasticat de Scy- Chazelles (Moselle) pour une année complémentaire de philosophie. Il est mobilisé en 1939 et fait prisonnier en 1940. A son retour d’Allemagne en 1945, il commence sa théologie à Lormoy (Essonne) qu’il termine à Layrac (Lot- et-Garonne). Il est profès perpétuel le 30 septembre 1946 à Layrac et il est ordonné prêtre le 22 mai 1948, également à Layrac. Le Frère Guesnou qui a repris son prénom de baptême, Yves, est nommé professeur à l’école Sainte- Barbe de Toulouse (Haute-Garonne) où il reste 21 ans, assumant également la charge d’économe par la suite. En 1969, il quitte les rivages de la Garonne pour celles du Gers. Il est, sept années durant, économe de Layrac qui compte à son arrivée une douzaine de religieux dont un certain nombre sont âgés et au repos. Depuis 1976, il réside à Pont-l’Abbé-d’Amoult et s’adonne à divers ministères. Admis le 5 février 1984 à la clinique de Haut-L’Evêque pour une coronographie, il doit être transporté d’urgence à l’hôpital Pellegrin en réanimation. Il y meurt le vendredi 10 février dans la soirée. Ses obsèques sont célébrées au Prieuré de Layrac le mardi 14 février et son corps repose au caveau de l’Assomption, dans le cimetière de la commune. Une évocation en cinq flashs (1). Premier 17asch, Saint-Maur. Loin de la maison. Il te faut maintenant te plier non plus aux contraintes de la ferme, mais aux bases de longues études classiques. Des années assombries par une méchante typhoïde qui te laissera bien affaibli, mais la volonté de vaincre décuplée. Et je te vois au Congrès eucharistique dAngers (1933), grand Tharcisius rythmant sur mes épaules le beau choral de Bach: ‘Roi de nos âmes, avec l’or des genêts en 17eurs, reçois l’hommage de nos cœurs, le seul que tu réclames. Deuxième 17asch: Melle (Deux-Sèvres). Les portes du sacerdoce et de la vie religieuse ne s’ouvrent qu’au terme d’un rigoureux contrôle du savoir. Et l’équipe pédagogique chargée de t’inculquer ce savoir en prend les moyens. Les siens. Et je te vois, oh! pas tout seul! longuement assis sur un vieux seau, des récréations entières, au coin de la triste cour, assimiler règles et théorèmes, rudes chemins de perfection si courageusement parcourus: Quem ut viderunt A.A S04H2. Tantae molis erat romanam condere gentem. Oui. Quelle oeuvre gigantesque, invisible aux distraits, que de construire notre être religieux! Troisième flash: le noviciat de La Chaume est ensuite l’étape logique du futur assomptionniste. On veut te ‘bichonner’ et t’assurer avec de solides bases de piété l’indispensable componction ecclésiastique: capuche soignée, mains sous le camail… Toi, tu rêves de grands espaces, de Mission, de salut des âmes, dans le contexte d’un grand amour de Dieu. Aimas! Aimas! disait notre bon prédicateur chilien. Aimas, aimas! répétais-tu, tes gros doigts vrillant ou claquant lors des processions monacales au lieu de rester sagement sous le camail. Six mois supplémentaires de noviciat t’apprendront-ils, avec d’autres frères, les nécessaires ‘formes’ religieuses? Yves est humble, obéissant, docile. Belles étapes de notre adolescence qui s’en va! Quatrième flash: J’ai sous les yeux une photo froissée et délavée que tu me remis au retour de ta captivité. Car cinq ans tu fus prisonnier de guerre, là -bas à Helmstedt, du côté des marais de Saxe. Le képi de travers, tu n’auras donc pas appris, même en cinq ans de discipline allemande, à soigner ta tenue. Mais tu auras soigné ton cœur de jeune religieux. du creux de la vague, quand tous ont froid, ont faim, et perdu tout espoir, du fond des travaux forcés, toi, fragile cependant, d’un sourire, d’un geste de tes longs bras, d’un bon mot, tu sauras rassurer, porter l’espérance, être témoin de l’Amour. Voilà ce que m’apprenaient tes compagnons de captivité au bas des cartes que tu m’écrivais. Car je fus ton correspondant. Je n’en suis pas si fier. Tu multipliais les marques de reconnaissance envers le piètre bienfaiteur que je fus. C’était cela, aussi, ta délicatesse, ta générosité. Cinquième 17ash: Le cursus de tes 36 ans de sacerdoce fut des plus simples: 27 ans de Barbe, 7 ans de Layrac et presque 8 de Pont-l’Abbé. Tu avais rêvé de grands espaces pour la mission. Aimas, aimas! Et toute ta vie tu ne fus que l’humble et méticuleux professionnel de la gestion et de l’entretien de ta maison. Le Père économe de Sainte-Barbe, puis de Layrac. Jamais tu ne t’en plaignis. Mais ce n’est pas la photo de l’économe que j’exhume ce soir. ce serait trop facile. Je te vois sur le palier du premier étage de ton collège, le front soucieux, mais le visage auréolé d’un sourire qui n’appartenait qu’à toi, un paquet de billets bleus à la main, le buste penché vers le rez-de-chaussée. Cette pose, c’était vraiment toi. Tu attendais tes ‘clients, disais-tu. Et je savais que c’était là le centre de ta vie, J’exercice du ministère sacerdotal de la confession et de la direction spirituelle. Et comme il fallait te voir vibrer, te réjouir ou taper du pied de dépit quand tu animais cette fameuse équipe de J.E.C Car tu y croyais, à l’Action catholique! Bâtir des cellules d’Eglise en 1950, c’était encore oeuvre de Titan. Tantae-molis erat.. Surtout quand ces pierres d’angle de ton Eglise étaient sapées par les activités parallèles: scoutisme, canoë-kayak, club de ski… J’aurais envie de feuilleter encore. Il me restera à apprendre de toi comme on est un authentique religieux assomptionniste, un Tharcisius tout baigné de lumière, un aspirant-humaniste accroupi sur son vieux seau, un maître d’espérance au fond de son stalag et 36 ans durant un humble et riche compagnon de ses frères. Au revoir, Yves. (1) D’après l’homélie du P. François Le Rouy, le jour des obsèques du P. Yves.
Bibliographies
Bibliographie et documentation: Documents Assomption, Nécrologe (III) 1984-1986, p. 11-12. Assomption-France, Nécrologie n° 2, juin 1984, p. 31-33. Dans les ACR, i4uatre correspondances du P. Guesnou (Yves) Saliou, 1941. Notices Biographiques