Religieux français de la Province de Belgique-Sud.
Une vie à travers les conflits.
Né le 16 avril 1897 à Landévant (Morbihan), Louis Hervio, vocation tardive, quitte sa Bretagne natale en 1913 pour venir faire à Sart-les-Moines ses études d’humanités (1913-1916). Celles-ci terminées-on est en pleine guerre-Louis entre au noviciat de Louvain et prononce ses premiers v?ux le 19 mai 1918, ayant pris le nom de Frère Joachim. Ses études de philosophie et de théologie se déroulent à Louvain où il est ordonné prêtre le 26 juillet 1925. La première partie de la vie sacerdotale du P. Joachim se déroule en Orient dans le cadre de la Province de Lyon. De 1925 à 1941, il est professeur en Bulgarie, à Plovdiv principalement au collège Saint-Augustin (1925-1927, 1935-1941), à Varna au collège Saint-Michel (1928-1935), mais aussi en Turquie à Zongouldack (1927-1928). On dit que surveillant, il est parfois menacé par le tapage des collégiens. Mais il leur enlève toute velléité de récidive en les réveillant la nuit à toute heure, en faisant lui-même un vacarme épouvantable sur les cloisons de bois. L’histoire dit aussi que le remède fut aussi, sinon plus, efficace que le mal! A Mgr Roncalli, délégué apostolique à Sofia, il prédit un jour qu’il deviendrait pape. Mgr Roncalli par contre, devenu pape sous le nom de Jean XXIII ne donna pas suite à sa promesse: « Si cela se réalisait, je vous ferais évêque! ». En 1941, brusque changement: il ne s’agit pas pour le P. Joachim de rester sous la botte nazie en Bulgarie. Il part s’engager dans les forces de la France libre, ayant fait le choix de la France du général de Gaulle.
De l’ex-Congo français à l’ex-Congo belge.
Aumônier militaire, il fait son devoir de patriote français, de Madagascar à Brazzaville, en passant par l’Afrique du Sud.
En 1946, paix et démobilisation regagnent le monde. Le Père Joachim envoie un télégramme à Mgr Piérard qu’il a connu à Louvain avant la guerre: « Si vous avez besoin de moi, j’arrive ». La réponse, laconique, ne tarde guère: « Venez ». Au lieu de rentrer en France, le P. Joachim se transforme en missionnaire au Congo, alors belge avant l’indépendance en 1960, puis au Zaïre, jusqu’en 1970. Arrivé à Béni en tenue militaire, culottes courtes, deux dames-jeannes de vin à bout de bras, il étonne parfois par des allures anti-conventionnelles. Ayant appris que son usage, pourtant modéré, du vin étonne des religieuses, il décide de renoncer totalement aux libations en l’honneur de Bacchus! Pendant 24 ans , le P. Joachim enseigne les mathématiques aux séminaires de Béni (1946-1947) et de Musienene (1947-1970). Un abbé se souvient que pour faire comprendre comment renverser les fractions, le P. Joachim n’hésite pas à prendre un élève par les pieds et le tenir, tête renversée, par les pieds! On ne sait pas par contre si l’effet fut réellement renversant. Homme pratique, aimant la nature, il reboise la colline devant le séminaire dont le bois a servi pour la cuisine. Religieux d’une pauvreté stricte, mais toujours joyeux, il se montre d’une régularité et d’une exactitude proverbiales. En 1970, il revient en Europe. La Belgique est sa terre d’adoption. Il prend place à la communauté de la Procure à Bruxelles-Anderlecht, où il retrouve la compagnie d’un autre missionnaire, le P. Marie-Jules Célis. Il y vit 16 ans, sans gêner personne, lisant ou ‘étudiant’ les journaux, fidèle à sa vie de prière. Il lui arrive d’arroser les pots de fleurs, les plantes de la chapelle, mais aussi de baigner les fleurs artificielles! Il porte toujours grand intérêt aux choses de la mission, questionnant les visiteurs en provenance de Butembo. D’une foi communicative, il émane de sa personne une grande bonté, même s’il faut la découvrir aussi sous des dehors un peu rudes. Hospitalisé à la clinique Sainte-Anne, on l’entend prier: « Jésus, prends-moi, pour que je sois avec Toi ». Le P. Joachim meurt le 28 mai 1986, à 89 ans passés. « Nous avions un grand-père et nous avons perdu son corps, mais nous avons gardé son âme. Il restera avec nous, car il nous a marqués ».
Bibliographies
Bibliographie et documentation: Documents Assomption, Nécrologe (III) 1994-1996, p. 124-125. Belgique-Sud Assomption, 1986, n° 173, p. 1-4. Marc Champion, Religieux défunts (1929-1994), Province du Zaïre, Butembo, 1994, P. 68-69. Lettre du P. Joachim Hervio au P. Gervais Quenard, Bangui, 10 janvier 1942. Dans les ACR, correspondances du P. Joachim Hervio (1924-1965). on doit au P. Joachim Hervio une chronique sur les événements troubles du Congo en 1964, partiellement reproduite dans Contacts (1964).