Judicael (Auguste) GELEBART
1890-1914
Religieux français, mort à la guerre.
Une vie fauchée par la guerre.
Auguste Gélébart est né le 22 mai 1890 à l’île de Groix (Morbihan). Il entre à l’alumnat du Bizet (Belgique), le 11 octobre 1904 et y fait trois ans de grammaire. C’est à Elorrio, au pays basque espagnol (Viscaye) qu’il vient poursuivre ses cours d’humanités (1907-1909). À la fin de la classe de rhétorique, il décide d’entrer au noviciat de l’Assomption, après une retraite de fin d’année. Il prend l’habit religieux le 15 août 1909 à Gempe (Belgique) sous le nom de Frère Judicaël (1), en souvenir d’un des patrons de la Bretagne. Il prononce ses premiers vœux le 15 août 1910 à Gempe. Mais bientôt le service militaire l’enlève aux joies de sa vie en communauté religieuse pour le jeter, dès l’année 1914, sur les champs de bataille du conflit européen. Le Frère Judicaël a le grade de sergent. Dès le commencement des affrontements, il est de toutes les grandes batailles. Il écrit sa joie de faire uniquement son devoir, dans la 10ème compagnie du 19ème régiment d’infanterie. Ses rares lettres, écrites au crayon aux heures de repos, retracent sa vie dans les tranchées, mais sans indiquer les lieux précis du campement, censure militaire oblige. Une fois cependant les ciseaux d’Anastasie laissent passer une indication de lieu: il dit se trouver à Authuile dans la Somme, à 200 mètres des Roches. Les journées lui semblent assez calmes, mais les nuits sont plus agitées, car canons et mitrailleuses défendent dans l’obscurité les positions respectives des combattants. Son régiment compte beaucoup de jeunes Bretons comme lui. Ils s’encouragent mutuellement à tenir le coup. Le Frère Judicaël remercie chaleureusement ses confrères qui lui font passer des nouvelles des uns et des autres. Il avoue plusieurs fois que, au milieu de ces attaques nocturnes où bon nombre de ses compagnons sont tombés, il se croit protégé par miracle par la Vierge.
Un soir, il remarque que les compagnies du régiment sont complétées, signe d’une attaque imminente (2). Les corps sont reposés, le moral excellent. En avant donc pour Dieu et pour la France! Ce sont les derniers mots tombés de sa plume qui soient parvenues à ses Frères. Vraisemblablement, il tombe le lendemain. Depuis le 17 décembre 1914, il n’y eut jamais plus aucune nouvelle de sa part. Les tranchées défendues par les Français dans ce secteur sont prises d’assaut par les Allemands, reprises plus tard par les Anglais. De part et d’autre, on ensevelit les restes méconnaissables des soldats morts au combat, à Ovillers-la-Boisselle (Somme), le 17 décembre 1914, jour de la fête de Saint Judicaël. On peut supposer que le corps du Frère Judicaël Gélébart figure dans le nombre des héros inconnus enfouis ce jour-là. En 1926, on découvre dans le Journal Officiel qu’à titre posthume, le sergent Gélébart a été décoré de la Médaille militaire.
(1) Saint Judicaël, fêté au 17 décembre, est un roi de Bretagne, mort en 658, très aimé de son peuple. La tradition rapporte qu’après un règne vigoureux, ce monarque abdiqua pour passer les 20 dernières de sa vie au monastère de Gael près de Vannes.
(2) On sait que, sur le front occidental, la première phase de l’offensive allemande d’août 1914 est stoppée par la victoire de Joffre sur la Marne (septembre 1914). Les Allemands déclenchent alors la seconde phase dite de ‘course à la mer’, afin de s’emparer des ports français de la mer du Nord et de la Manche. Les batailles d’Ypres et de l’Yser en octobre-novembre 1914 stoppent l’avance allemande. Pour plus de trois ans, la guerre s’enlise alors sur une ligne jalonnée approximativement par Nieuport (côte belge), Ypres, Arras, Soissons, Reims et Verdun. A la guerre de mouvement succède la guerre de tranchée, terriblement éprouvante pour les combattants. Les chefs lancent les soldats à l’assaut d’une colline, de quelques milliers, voire quelques centaines de mètres de terrain.
Bibliographies
Bibliographie et documentation: Lettre à la Dispersion, 1919, n° 569, p. 271; 1926 n° 201, p. 285. Nouvelles de la Famille, 1919, n° 327, p. 141. Notice biographique par le P. Marie-Alexis Gaudefroy. Dans les ACR, du Frère Judicaël, une dizaine de correspondances (1910-1914). Lettre d’Auguste Gélébart, 3 octobre 1914, adressée à M. l’abbé Jacob (alias P. Ambroise Jacquot) Maison de la Bonne Presse, 5 rue Bayard à Paris (poste militaire). Notices Biographiques