Louis-Joseph (Joseph) MILLET – 1919-1973

Cas de conscience.
« Le Frère Louis-Joseph a décidé de ne pas obéir à l’appel du S.T.O. Je
l’en ai dissuadé dans le sens de votre circulaire. Mais il a fait des
démarches et se trouve placé hors la loi. Il me demande de lui établir des
pièces truquées mais régulières, avec cachet et signatures. Il prétend que
la qualité de professeur lui
évitera le S.T.O. Je lui répète que cela ne peut lui procurer un certificat
de travail. Il persiste. Il a été convoqué et ne s’est pas présenté au
S.T.O.., il est donc susceptible d’être arrêté à tout instant. Je lui ai lu
votre circulaire et l’ai mis devant ses responsabilités. Sa situation est
difficile. Il risque gros, mais peut-il se
tirer d’affaire par des moyens qui me paraissent dangereux et inefficaces?
Je lui reproche surtout son obstination. Je commence à craindre qu’il ne
participe quelque peu au tempérament de son frère qui fait parier de lui en
ce moment au diocèse voisin (affaire du Prince blanc), en se présentant à
cheval dans la cathédrale de Valence comme l’envoyé de la Providence, du
Sacré-Cœur et pour annoncer l’arrivée de
celui qui doit sauver la France. La police a mis fin à ces manifestations
en le coffrant
».

Religieux de la Province de Lyon. D’un versant à l’autre.

Joseph Millet est né le 22 décembre 1919 à Saint-Jean de Luz, au diocèse de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), d’un père français et d’une mère espagnole. Il entre à l’alumnat de Scherwiller (Bas-Rhin) où il étudie, de 1930 à 1935, puis à celui de Miribel-les-Echelles (Isère), de 1935 à 1937. Il prend l’habit assomptionniste à Nozeroy (Jura) le 3 octobre 1937, sous le nom de Frère Louis-Joseph. Il prononce sa première profession le 4 octobre 1938, puis rejoint le scolasticat de Layrac (Lot-et-Garonne) pour faire sa philosophie, de 1938 à 1941. Il fait encore une partie de sa théologie à Layrac, puis à Lormoy (Essonne). Profès perpétuel le 19 mars 1942 à Layrac, il est ordonné prêtre à Lormoy, le 24 mars 1946. Ses années d’étude sont en fait interrompues par quelques mois de service militaire en 1940 et en 1945, par une année de professorat à Nozeroy (alumnat provisoire) de 1943 à 1944. A la fin de cette même année scolaire, en juin 1944, il prend le maquis. Pendant une grande partie de sa vie religieuse, le Père Louis-Joseph est professeur. Il débute en 1946 au collège de Briey (Meurthe-et-Moselle). En 1951, il rejoint le collège de Bône en Algérie. Il passe une année au collège de La Villette, près de Chambéry (1956-1957). L’alumnat de Scy-Chazelles (Moselle) le reçoit à son tour en 1957 et celui de Vellexon (Haute-Saône) en 1960. En 1961, il est nommé Procureur à Lyon-Debrousse, fonction qu’il assure jusqu’en mai 1962 où il est nommé économe à Miribel-les-Echelles. Rien de spécial ne le prédispose à cette tâche. Peu manuel, ne se voyant pas du tout en bleu de travail, il prend néanmoins à cœur ses nouvelles fonctions d’économe, au service de ce bien commun qui dépasse ses vues personnelles. Il s’astreint à des séances de bureau que commandent la comptabilité et 1’appui financier des bienfaiteurs, la correspondance avec ces derniers étant prise en charge par le P. Walbert Renaud, puis le P. Alix Gruffat. Son péché mignon, pardonnable à son niveau, c’est le souci de faire de bonnes affaires sans trop de frais, mais il n’a pas toujours la main heureuse. On se souvient de l’énorme stock de flans acquis comme bonne occasion, comportant des gratifications d’appareils: transistors, électrophones etc… Miribel est nos au régime des flans à haute dose, mais le stock semble inépuisable. La Province toute entière est invités à faire fondre les rations pour digérer ce dessert, délicieux quand il surprend. Un alumniste se souvient d’une collecte d’œufs à La Montagne de Miribel qui finit en omele tte géante parce que le chauffeur, par temps de pluie, quitte la route et descend en marche arrière des escaliers conduisant à une étable. Le P. Louis- Joseph aime en effet conduire la voiture, mais, à Miribel, cet art de la conduite,

en hiver, demande un sérieux contrôle des dérapages et glissades sur le verglas et sur la neige. En 2 CV, sur la route de Voiron, il négocie bien à droite un virage, mais se trouve nez-à-nez avec une voiture anglaise, conduite par un Suisse et assurée en Italie, doublant un camion. Le P. Louis-Joseph se retrouve dans le fossé, renvoyé sur la chaussée et finalement sur le capot d’une 404 qui le renvoie au fossé. On cherche le malheureux chauffeur de la 2 CV dans le tas de ferraille. Le P. Millet surgit du groupe des personnes attroupées, indemne! Il a eu le temps de s’extraire de la carcasse, de prendre le numéro du véhicule fautif et de se mêler aux commentaires, sans une égratignure. Peu de temps après, l’autre voiture de la communauté est emboutie à l’entrée du portail de la maison par un confrère distrait ou ébloui, mais moins chanceux sur le plan des dommages corporels. Le P. Louis-Joseph aime aussi rendre service en paroisse. Ses relations avec les alumnistes, difficiles en public, sont détendues et confiantes en privé. Ses confrères religieux apprécient son égalité d’humeur, sa capacité d’écoute, mais ne se fient pas toujours à son jugement. Sans doute le Père Louis-Joseph dont les difficultés du métier lui font faire contre mauvaise fortune bon cœur, trouve-t-il son équilibre dans la prière. Après 4 années à Miribel, il se reconvertit dans le professorat à Saint-Sigismond (Savoie). Il n’y reste que deux ans (1966-1968) avant que l’alumnat ne devienne foyer. En 1968, il est mis au service de la paroisse Sainte-Thérèse à Toulon (Var), sous la responsabilité du P. Ignace Antzenberger. Il y passe six années. Aimant la vie simple, volontiers taquiné par ses confrères, il mène son bonhomme de chemin, à l’aise dans les relations inter-personnelles. Il aime égrener à l’orgue quelques motets eucharistiques. On connaît sa grande dévotion à la Vierge, tenant à participer quand c’est possible au pèlerinage national à Lourdes. Il tient à être aumônier de la Légion de Marie, sur le plan paroissial et diocésain. Il sait consacrer de longs temps à l’étude, soit de l’éxégèse soit de l’histoire de l’Eglise. Il a le souci d’approfondir ses connaissances théologiques et spirituelles telles qu’il les a apprises plutôt que de suivre l’évolution actualisée de ces sciences. En août 1972, il connaît une première alerte de santé pour insuffisance cardiaque, en relation avec ses poussées de tension artérielle. Soigné à l’hôpital de Toulon, puis à l’hôpital Cantini de Marseille, il fait un premier infarctus à l’hôpital Brunet de Toulon en novembre 1972. Il rentre en février 1973 revivifié et apparemment sur pied. Astreint au régime, il doit consulter régulièrement le médecin. Lui-même se croit sauvé et n’en finit pas de chanter sa résurrection à qui veut l’entendre. En août 1973, il part en vacances à Chaux (Territoire de Belfort), auprès de sa sœur et de ses vieux parents. Il fait de longues promenades en forêt, court les champignons et les mûres. Le mercredi 28, il célèbre l’Eucharistie à 8h., discute encore avec le curé de la paroisse, déjeune chez sa sœur à Grand Charmont et joue à la belote. Dans l’après- midi, il se décide à aller rendre visite à ses vieux parents. Il ne trouve que son père, Xavier- Charles, sa mère, Placida, étant partie le matin même à Nice. Il se met brutalement à suer, réclame un café, s’assoupit dans le fauteuil à côté de son vieux père et ne se réveille pas. Les obsèques du P. Louis-Joseph sont célébrées à Chaux où il est inhumé.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: B.O.A. mars 1975, p. 264. Lyon-Assomption, 24 janvier 1974 ‘p. 17-19. Lettre du P. Maximilien Malvy au P. Gervais Quenard, Lyon, 14 août 1943. Dans les ACR, une information sur le départ du Louis-Joseph Millet de Saint-Sigismond pour Toulon (1968). Sur cruelcrues lieux d’enseignement du P.L.-J. Millet: Briey. collège accepté en 1938 par l’Assomption dont elle se retire en 1951. Bone collège d’Algérie, appelé d 1 Alzon, créé d 1 abord à Bugeaud par l’Assomption en 1949, puis transféré dans la ville épiscopale d’Augustin. L’Assornption se retire d 1 Algérie en 1963. La Villette: collège de l’agglomération chambérienne où l’Assomption a accepté Quelques postes de suppléance durant environ deux années scolaires (1955-1957). Miribel-les-Echelles, alumnat ouvert en 1887, fermé en 1969, vendu en 1970.