Religieux italien de la Province de Lyon. Parcours d’une vie inachevée. Luzio Toppi est né le 18 juin 1917 à Cesacastina, en Italie, dans le diocèse de Teramo. Domestique chez une habitante de Castelgandolfo, près de Rome, il y fait la connaissance de l’Assomption qui anime à l’époque un petit alumnat dans ce lieu. Il se propose de commencer des études, mais, les bases d’une première formation lui manquant, il lui est conseillé de devenir religieux coadjuteur. Le ler octobre 1933, il prend l’habit religieux au noviciat de Nozeroy (Jura), sous le nom de Frère Luigi Gonzaga. Le P. Gausbert Broha, maître des novices, le présente à la première profession pour le 2 avril 1935: « Le Frère Luigi n’est pas fait pour les gros travaux. C’est un jeune homme de bon caractère, très dévoué, mais parfois un peu entêté ». En 1935, le Frère Luigi arrive à la communauté de Florence (1935-1941) où il remplit la charge de cuisinier. Le P. Ferréol Poux-Berthe, supérieur local, le présente en marsl938 pour les vœux perpétuels. « Le Frère Luigi offre toutes les garanties désirables pour être accepté à la profession perpétuelle et j’estime qu’il sera un bon religieux. Etant né le 18 juin 1917, il n’a pas encore l’âge canonique. Mieux vaut passer ce délai ». En conséquence, le Frère Luigi prononce ses vœux perpétuels le 21 juin 1938. En 1941, il est affecté à la communauté généralice de Rome, à Tor di Nona. C’est alors que se manifeste une grave tuberculose. Les temps sont particulièrement difficiles en raison de la guerre. Une oeuvre, dite ‘Don Suisse’, accepte de le prendre en charge, de le faire transporter et soigner à Arosa en Suisse. Le voyage se déroule dans des conditions plus ou moins inorganisées, du moins mal préparées. Le Frère Luigi Gonzaga meurt peu après à l’hôpital de Coire, le 20 décembre 1945, dans sa 29ème année. Page : 85/85 Trois correspondances de l’époque informent la Congrégation de son décès. Nous les citons in extenso: « En qualité d’assistante sociale auprès des malades tuberculeux du Don Suisse, à Arosa, j’ai la pénible tâche de vous annoncer la mort du Frère Luizi Toppi (sic), décédé le 20 décembre 1945, à l’hôpital de Coire. Je me suis permis d’ouvrir votre billet afin de vous le retourner. Je vous présente, mon Révérend Père, mes hommages respectueux». L. Under au P. Gervais Quenard, Arosa, 31 décembre 1945. « C’est un séminariste du diocèse du Puy qui vous écrit au sujet d’un jeune Frère de la famille de l’Assomption, de nationalité italienne. Il venait de Rome directement. Le Frère Toppi est arrivé très fatigué ici. Je l’ai vu à peu près tous les jours. J’ai même écrit pour lui au R.P. Quenard. Un jour, on a dû lui donner l’Extrême-Onction qu’il reçut très pieusement, en récitant lui-même les réponses. Le lendemain on l’emmenait à Chur, dans un hôpital de plaine où l’on espérait qu’il serait moins essoufflé. Trente-six heures après, il succombait à une crise cardiaque. Je n’ai pu avoir d’autres détails sur sa mort. Je puis seulement vous assurer qu’il a laissé ici un excellent souvenir et l’infirmière protestante qui le soignait me disait qu’il n’était vraiment pas comme les autres malades, qu’il avait quelque chose de plus. Le docteur suisse a été profondément affecté par sa mort. Il était arrivé depuis une dizaine de jours et le voyage l’avait considérablement fatigué parce qu’il l’avait fait dans de très mauvaises conditions. Il m’a dit avant de partir qu’il acceptait et offrait tout pour sa famille religieuse. Il désirait beaucoup avoir une crèche dans sa chambre. Il aura eu beaucoup mieux. Du ciel, il veillera sur sa famille religieuse. Croyez, mon Révérend Père, à mes sentiments très respectueux en Notre-Seigneur ». Abbé J. Pascal, Arosa, 27 décembre 1945. « Un deuil vient de frapper notre communauté. Le cher Frère Luizi Toppi (sic), convers, tuberculeux depuis deux ans, est mort en Suisse, dans la nuit du 20 au 21 décembre [19451, après un voyage particulièrement fatigant et mal organisé, au moins pour la partie italienne. Une lettre du Frère, datée du 5 décembre, nous annonçait qu’il était arrivé à Ai-osa, canton des Grisons, avec 40° de fièvre. Nous n’avons pas encore de détails sur sa mort, mais on peut supposer qu’il a été emporté par une pneumonie. J’écris au P. Venance [Grumel] de faire annoncer cette mort dans La Croix le plus tôt possible. Le Frère avait 28 ans dont douze de vie religieuse. Le P. Romuald [Souarn] ou le P. Corpacci vous enverront sûrement une notice sur lui quand nous serons renseignés sur sa mort. Il nous laisse le souvenir d’un religieux très pieux et dévoué ». P. Martin Jugie au P. Gervais Quenard, Rome, 28 décembre 1945. Page : 88/88
Bibliographies
Bibliographie et documentation: Lettre à la Famille, janvier 1946, no 13, p. 59-60. Lettre du Frère Luigi Gonzaga au P. Gervais Quenard, Arosa, 16 décembre 1945. A.A Page : 86/86 Serge (Ernest) TOUBLAN 1896-1986 Religieux de la Province de France. Prêtre-éducateur social en milieu populaire. Ernest Toublan est né dans une famille paysanne de La Neuville -au-Pont (Marne), le 27 mai 1896, dans le diocèse de Chalons en Champagne. Il est clerc de notaire et accomplit ses obligations militaires durant toute la première guerre mondiale avant d’entrer, comme vocation tardive, au prieuré de Sart-les-Moines en Belgique où il passe deux années d’études (1919-1921) avant de gagner Les Essarts (Seine- Maritime (1921-1922). Il prend l’habit, sous le nom de Frère Serge, au noviciat de Saint-Gérard, également en Belgique, le 31 octobre 1922. Il y prononce ses premiers vœux, le ler novembre 1923. Il se rend au scolasticat de Taintegnies pour les années de philosophie (1923-1925) et à celui de Louvain pour les études de théologie (1925-1929). Il est reçu à la profession perpétuelle, faite à Louvain, le ler novembre 1926, et il y est ordonné prêtre le 9 juin 1929. Le Père Serge est aussitôt nommé sous-maître des novices aux Essarts. Le Frère Vincent Delouf qui termine son année de noviciat en 1929 se souvient: « Le Père Serge arrive quelques jours après l’Assomption. Il y avait chez lui de l’affection, une parfaite courtoisie, une timidité qu’il a perdue très vite, une piété profonde. Je le vois ornant la statue de la Vierge dans l’ancienne petite chapelle: des fleurs, un tissu bleu profond qui descendait jusqu’à terre, des goûts d’artiste, une vue affaiblie qui lui fait dire: Je n’y vois rien avec cette lampe, mettez-moi un phare. Le Père Serge est d’un tempérament actif, ardent, passionné et, en même temps, très sensible, explosif dans son expression. Les heures des Essarts n’étaient pas tristes ». En 1931, le Père Serge est nommé à la paroisse Saint-Christophe de javel à Paris XVème, confiée à l’Assomption depuis 1924. Il y est jusqu’en 1960 directeur de l’Oeuvre Notre-Dame de Grâce que les Frères de Saint- Vincent de Paul ont fondée en 1848: « La plupart d’entre nous n’étaient que des gamins ou n’étaient pas nés. Vous nous avez tous vus grandir, mais vous ne vouliez pas que nous grandissions n’importe comment. C’était là que commençait votre rôle de prêtre et d’éducateur, et ce n’était pas le plus facile. Car, souvenez-vous, vous étiez extrêmement intransigeant; vous aviez en horreur l’a-peu-près, le bâclé, vous avez toujours été épris d’absolu et notre devise: ‘Toujours mieux’,, qui demandait toujours plus d’efforts, avait, certains jours, du mal à être mise en pratique. Mais il n’était pas pour vous question de lâcher quoi que ce soit. C’est grâce à cette volonté qui ne laissait pas sa place à la facilité que vous avez su donner à des générations cette solide formation d’hommes et de chrétiens. Croyez-moi, Père, tous s’en souviennent, même ceux qui ont lâché en cours de route, mais qu A.Ai tout de même ont reçu l’essentiel » (1). §Paris, 1947. « Toute la cité gracieuse, unie aux Pères Serge et Henry [Cabon] vous prie d’agréer ses vœux mués en prières ardentes à toutes vos intentions. Dans le petit secteur de Javel, tous, petits et grands, veulent travailler avec acharnement à étendre le Règne du Seigneur Jésus et de la Vierge Marie. La fête inaugurale de notre année centenaire (1) a dû être agréable à la Reine de la maison. Nous espérons tous avoir l’immense joie et fierté de vous posséder pour la grande fête du mois de juin. Votre bénédiction à l’aube de l’année centenaire nous comblerait de bonheur ». P. Serge. P. Henry. (1) L’année 1948 est en effet l’année centenaire de l’Association Notre-Dame de Grâce (1848-1948), établie à Paris-Grenelle, dont le comité d’honneur est formé par le Cardinal Suhard, le P. Aymard Faugère, M. Thaury président du conseil central de la Société Saint-Vincent de Paul, M. Henry Jaquemet, Président de l’Association, M. Raymond Duval-Arnould, Président de l’Association des Anciens, et Mme Duval-Arnould. Page : 87/87 Le P. Henry Cabon, collaborateur du P. Serge, évoque également le service apostolique du P. Serge: « Le P. Serge prend la barre en pleine croisière. Il lui faut tout apprendre sur le tas. Ne voulant dépendre de personne, surtout au plan financier, il s’entoure d’une couronne de bienfaiteurs qui lui seront fidèles jusqu’au bout. Il réorganise les fameuses fêtes d’été et les galas auxquels participent de nombreuses vedettes connues. Il devient vraiment le directeur, comme il aimait à dire. Il organise l’œuvre en la structurant, des plus jeunes jusqu’aux anciens. Pour obtenir des résultats, il faut s’imposer. Il le fait, parfois durement. Les plus jeunes étaient groupés en équipes qu’il appelait les Gerbes, en référence au moulin de javel et à ses origines terriennes. Elles avaient à leur tête des petits chefs qu’il avait à cœur de former dans des réunions régulières. Nous en avons vu certains diriger seuls les prières du soir et capter l’attention d’une cinquantaine d’enfants de leur âge. Pour les plus grands, il y avait les Cercles où des personnalités de premier plan venaient parier avec les jeunes. A l’époque de la Cité des jeunes du P. Filière et des Cœurs vaillants du P. Courtois, le P. Serge a su emprunter à tous ces mouvements sans jamais y adhérer, utilisant ce qu’il y avait de meilleur à l’époque, sans oublier la discipline! Il aimait le beau, voulait que tout soit beau dans la Maison du Printemps. Il luttait contre le débraillé et le désordre. Il réussissait, malgré sa mauvaise vue, de très belles photos. Le bulletin de N.-D. de Grâce était une véritable petite merveille avec ses pages polychromes. Les articles signés Serge ne laissaient pas indifférent. Parfois même on les pillait. La colonie de vacances était le sommet (2). Les deux mois de Gouville [Manche] étaient son paradis. Il pouvait y donner libre cours à son besoin d’activité et de commandement. Il avait fait ériger dans le pare une grotte de N.-D. de Lourdes où il aimait prier et faire piler les enfants. Dispensé du bréviaire à cause de sa vue, il disait et méditait chaque jour le rosaire. Dans la prière ou l’entretien du soir, il y avait toujours une dizaine de chapelet avec intention dirigée par un enfant. Pour le centenaire de N.-D. de Grâce que présida le nonce Roncalli, il fit sculpter par Anne-Marie Roux la statue de Notre-Dame et graver sur le nouvel autel la devise de l’œuvre: ‘Tout par Marie. Ses sermons sur la Vierge marquaient profondément ses auditeurs. on y sentait le résultat de ses longues méditations » (3). Le Père Serge passe à Lille (Nord) l’année 1960- 1961, se consacrant à la prédication et aux pèlerinages. Pendant six ans ensuite, il est vicaire à Montlhéry (Essonne) où il crée le patronage ‘Archers de la Tour’. En 1967, il est vicaire à Ezanville (Val-de-Marne). En 1974, il est aumônier de la maison des Petites Soeurs des Pauvres à Paris Xème où il meurt le 25 mai 1986. Il est inhumé à Paris-Montparnasse, le jeudi 29 mai. (1) D’après M. Henri Le Borgne, Président de l’Association Notre-Dame de Grâce, à la messe des obsèques du P. Serge Toublan. (2) En 1960, 250 jeunes de la paroisse de Javel fréquentaient l’ceuvre. Beaucoup d’autres venaient des environs. Les colons de l’été furent: 150, ceux de Pâques: 100, ceux de Noël 1959: 60. (3) P. Henry Cabon, au jour des obsèques. Bibliographie et documentation: Documents Assomption, Nécrologe (III) 1984-1986, p. 122-124. Assomption-France, Nécrologie n° 5, année 1986, p. 110-112. Lettre du P. Serge Toublan au P. Gervais Quenard, Paris, 12 décembre 1947. Du P. Serge Toublan, dans les ACR,’ correspondances (1922-1960), articles dans le Courrier de Notre-Dame de Grâce (1936)1954) et Présence (1955-1960), bulletins de l’Association Notre-Dame de Grâce (Paris, paroisse Saint-Christophe de Javel).