Marie (Francois) LAVILLE – 1819-1894

Faire-part.
«La lettre que je vous ai écrite avant-hier vous a dit que le Fr. Marie
était un peu fatigué et la dépêche reçue hier matin vous a appris le
dénouement soudain d’une fatigue qui semblait devoir se prolonger pendant
plusieurs mois. Hier matin, à 7h., nous avons
trouvé notre pauvre Frère que nul n’avait cru nécessaire de faire veiller,
la tête en bas entre son lit et la muraille, les jambes et une partie du
corps sur le lit et la poitrine encore chaude. Nous l’avons frictionné
pendant trois quarts d’heure jusqu’au moment où Pourtal nous a dit qu’il
n’y avait rien à espérer. Le Frère Marie avait communié encore le dimanche
matin et si le bon Dieu l’a pris dans une congestion, comme le déclare le
Dr Mazel, c’est sans doute pour lui éviter les appréhensions de la mort
qu’il
redoutait. Nous l’avons enterré ce matin conformément aux usages et
traditions de la Congrégation, malgré un
temps affreux, nous avons eu encore assez de monde à la messe chantée ici
et au convoi. Le pauvre Frère nous manquera bien, il était sans cesse en
prière et protégeait ainsi le collège qu’il édifiait en même temps par son
obéissance. Son dernier acte a été conforme à sa vie: il m’a demandé
avant-hier une dispense pour l’office».

Religieux français.

Aux origines de l’Assomption.

François Laville est né en 1819 dans le département du Gard. Les renseignements et précisions biographiques sur lui n’abondent pas. Nous devons nous en tenir à ce que rapporte l’historiographe du P. d’Alzon, le P. Siméon Vailhé: « La vocation de certains Frères convers rappelle le temps de l’église primitive ou de saint François, lorsque des âmes d’élite, séduites par les vertus des apôtres ou du pauvre d’Assise, vendaient tout ce qu’elles possédaient pour mieux se donner elles-mêmes. C’est ainsi que le Frère Marie Laville fut si touché par un sermon du P. d’Alzon entendu par hasard, que, rentré dans son village, il renonça à ses biens avant de faire le sacrifice de sa personne. Il le fit d’ailleurs avec une bonne grâce qu’on ne rencontre pas toujours chez les gens de sa condition. En effet, il se présenta à Nîmes en habit de société, la tête couverte d’un haut-de-forme, si bien que le portier, se croyant en présence d’un nouveau candidat à Saint-Cyr ou à Polytechnique, l’envoya rejoindre les élèves de l’école préparatoire. Le malentendu s’expliqua bien vite, et le Frère Marie, ayant remis au supérieur tout son avoir, se dévoua sans réserve à des fonctions plus modestes… » (1). Ces lignes qui empruntent plus au genre des Fioretti qu’à celui de l’histoire nous permettent au moins de situer la vocation religieuse du Frère Marie (2). C’est à Mireman (Gard) que le P. Henri Brun reçoit les v?ux perpétuels du Frère Marie, le 24 décembre 1835 (3). Dans son langage qualifié de naïf, il aime rappeler que le P. d’Alzon, le P. Emmanuel [Bailly] et lui-même sont les fondateurs de l’Assomption! Sans autre précision, nous déduisons de la lecture de la correspondance du P. d’Alzon que le Frère [François] Marie passe par presque toutes les communautés assomptionnistes de l’époque:

le collège de l’Assomption, la colonie agricole de Mireman (1852-1857), le collège de Clichy (1857), le noviciat A.A. d’Auteuil sur lequel nous avons une anecdote savoureuse et pleine de vie du P. Picard, reproduite dans les notes de la correspondance du fondateur (4). En novembre 1860 ou janvier 1861, le Frère [François] Marie revient à Nîmes. En 1862, il semble pressenti pour l’Australie, mais son désir de vie missionnaire ne peut se réaliser: c’est le Fr. Polycarpe Hudry qui est désigné pour être le compagnon du P. Henri Brun. N’ayant jamais été porté sur les listes du personnel du collège de l’Assomption, le Frère [François] Marie remplit sans doute des charges serviles tant au collège qu’au noviciat qui lui est joint jusqu’en 1864. C’est à Nîmes qu’on le trouve mort dans son lit, le 2 janvier 1894. Il est inhumé dans la tombe de l’Assomption, au cimetière Saint-Baudile.

(1) De quand date l’entrée du Frère Marie dans la vie religieuse? Comme le noviciat pour les frères durait au moins trois ans, on peut en déduire que le Frère Marie entra en contact avec l’Assomption au plus tard en 1851. (2) Il est difficile de savoir avec exactitude quel est le prénom usuel habituel du Frère Laville, souvent écourté en Marie, parfois étendu à François-Marie, à ne pas confondre avec deux autres religieux de cette période, le Frère Marie-Joseph Lévy et le Frère François [de Sales] Gavète. (3) Et non le 25 comme on le voit reproduit fautivement un peu partout. La date exacte de la profession perpétuelle du Frère Marie est écrite en toutes lettres sur sa formule de profession, le seul document dans les ACR qui porte sa signature. (4) Lettres t. II, édition Touveneraud, p. 344, note 2: « Le noviciat est composé de quatre pauvres garçons, Fr. Charles [Rabier], Fr. Vincent [Chaîne], Fr. Marie [Laville] et voire très humble serviteur; voilà l’espoir de la nouvelle maison. Si quelque chose nous manque, ce n’est certainement pas la gaieté. Tous les jours à heures fixes, nous voyons poindre, à l’horizon de notre avenue [Eymès], un religieux en calotte et en soutane, tenant d’une main une soupière et portant de l’autre un vaste panier; il traverse bravement tout Auteuil dans cet imposant appareil et nous arrive fier et heureux de notre bonheur; c’est le Fr. François-Marie, qui nous apporte notre dîner et ne craint pas de braver les quolibets des Parisiens, qu’il s’arrange même pour ne pas entendre. Ces repas sont servis par les Religieuses de l’Assomption qui pourvoient à tout et sont pour nous une vraie providence, pleine de bonté et de prévenances, elles nous nourrissent, nous meublent et jusqu’ici ont payé notre loyer ». Lettre du 14 octobre 1857.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Souvenirs, 1894, n° 158, p. 6; n° 165, p. 51. Lettres d’Alzon, t. XIII (1996), p. 453-454. Siméon Vailhé, Vie du P. d’Alzon, t. 2, p. 51-52. Notice biographique par le P. Marie-Alexis Gaudefroy. Lettre du P. Matthieu Lombard au P. Picard, Nîmes, 3janvier 1894.