Matthieu SCHISKOV – 1850-1892

Paris, 22 janvier 1892.

« Je reçois de Phanaraki une nouvelle douloureuse. L’influenza a pénétré
parmi nos religieux. Elle paraissait
fort bénigne, mais voilà qu’une dépêche m’annonce à l’instant la mort (1 )
d’un Frère convers, Matthieu Schiskoff
(sic). Je le recommande avec instance aux prières de tous les religieux.
Ce bon Frère était un vrai trésor pour les maisons de Phanaraki et de
Koum-Kapou. Toujours prêt au travail et au sacrifice, il était devenu
presque indispensable par son dévouement, son énergie, sa connaissance des
langues et son entente pour toutes les choses matérielles.
Je n’ai pas besoin de vous rappeler les prières ordonnées par la règle.
Hâtez-vous de les faire et demandons ensemble à la très Sainte Vierge de
veiller sur nos maisons.

Bien affectueusement vôtre en
Notre-Seigneur ».

P. François Picard.

(1 ) Religieux convers décédé à Phanaraki, le 21 janvier
1892.

Notices Biographiques A.A

Religieux bulgare. Une vie sans éclats, non sans vertus. Né en 1850, à une date imprécisée, à Philippopoli/Plovdiv en Bulgarie, alors province turque de Roumélie, Matthieu Schiskov est le frère du futur P. Barthélemy Schiskov, également devenu assomptionniste. Les renseignements personnels sur le Frère Matthieu n’abondent pas. On sait seulement qu’il prononce ses vœux perpétuels, le 18 novembre 1888 (1), dans sa ville natale, où l’a vraisemblablement connu, dans sa jeunesse, le P. Galabert. Le Frère Matthieu meurt d’une fièvre pernicieuse, le 21 janvier 1892, à l’âge de 42 ans, au noviciat de Phanaraki (Turquie) où sa mort ne laisse que des regrets, si l’on en croit la lettre du P. Ernest Baudouy écrite dans ces circonstances au frère du défunt, le futur P. Barthélémy Schiskov. « Le Frère Matthieu laissera un grand vide, non seulement au noviciat, mais dans toute la presqu’île. Il s’occupait de tout, rendait service à tout le monde, mais si simplement, si naturellement, que personne ne le remarquait. C’est maintenant surtout qu’on s’en aperçoit. Les Croates, les Grecs, les Latins sont venus le voir, lui ont apporté de magnifiques couronnes de fleurs. Tout le monde le regrette et tout le monde le pleure. Les schismatiques ont voulu l’accompagner jusqu’au cimetière, malgré une très forte tempête de neige. Tous nos fournisseurs sont atterrés. Ce bon Frère, par son dévouement, sa simplicité, son esprit de sacrifices se faisait aimer de tout le monde. Nous ne le remplacerons pas. Il est couché maintenant à côté de la tombe des soldats français [morts de la guerre de Crimée] regardant le sanctuaire de Lourdes. Nous avons acheté là une concession de terrain: ce sera la dernière demeure de la famille assomptionniste. Le docteur qui avait soigné le Frère lui a fait ce dernier adieu: A.A ‘Mon cher Frère, vous avez bien fait votre devoir et maintenant vous êtes dans le grand repos. Priez pour nous. Nous nous reverrons un jour ». Le P. Ernest Baudouy continue encore au sujet du Frère Matthieu, mais à un autre correspondant: « C’est vrai, la mort du Frère Matthieu laisse un vide pour toute la presqu’île. Ce bon Frère convers rendait service à tout le monde et avait une très heureuse influence sur bien des familles qu’il faisait aller à la messe. L’an passé, il a obtenu d’un Belge, notre voisin, qui se construisait une maison de campagne, de ne pas faire travailler le dimanche. Au Frère Matthieu, ces choses s’accordaient sans peine. C’est à lui que nous devons en grande partie cette considération qui nous constitue les maîtres de la presqu’île. Des Turcs et des schismatiques portent chez nous leurs papiers importants, y déposent aussi leurs économies pour qu’elles soient en sûreté. Certainement le Frère Matthieu est pour beaucoup dans ces marques de confiance. Il ne ménageait pourtant pas ceux qui étaient en faute et, selon les occasions, il savait faire la correction fraternelle à l’orientale. Mais comme il était très juste et très bon, personne ne lui a jamais gardé rancune de ses bourrades. Son activité ne semblait pas connaître la fatigue. Au chapitre des veilles de fête de la circoncision, quelqu’un lui demandait. ‘Frère Matthieu, quand est-ce que ce sera votre tour de sermon?. Il répondit en riant. ‘Moi? Donnez-moi du travail et je vous ferai voir comment je prêche!’ ».Les funérailles du Frère Matthieu sont célébrées le 22 janvier 1892, dans la chapelle publique de Phanaraki. Après l’office religieux, il faut transporter le corps dans le cimetière qui se trouve de l’autre côté du Bosphore, sur les hauteurs de Féri-Keui, en louant une barque, un caïque, à quatre paires de rames. La traversée, pendant deux longues heures, est pénible en raison d’une tempête de neige et d’une bise glaciale. Le Frère Matthieu à qui l’Assomption doit les préparatifs de l’implantation du noviciat de Phanaraki et qui a présidé à la construction des bâtiments, est le premier religieux assomptionniste qui soit mort en terre turque, depuis la fondation, en 1883, de la communauté de Kourn-Kapou. (1) Les vœux des Frères coadjuteurs se faisant au bout de 3 ans de noviciat, le Frère Matthieu aurait pris l’habit vers 1885, année de décès du P. Galabert. Cependant une lettre du P. Galabert au P. Picard, du 5 novembre 1883, signale, sans autre précision, un Frère Matthieu, bulgare, convers, cordonnier de métier et profès. Il pourrait s’agir du même religieux.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Souvenirs, 1892, n° 93, p. 851; n° 94, p. 865-866; n° 97, p. 964-970. Notice biographique par le P. Marie-Alexis Gaudefroy. Notices Biographiques