Religieux de la Province de Bordeaux.
Une légende aussi riche que l’histoire.
Michel-Pierre-Marie Kerboul est né le 26 juin 1896 au hameau de Kerlizic-bras, ‘maison de Louise, la grande’, dans la campagne de Milizac (Finistère) où il est scolarisé de 1903 à 1908. Il connaît ensuite l’école des Frères de Ploërmel à Saint-Renan (1908- 1910) et le collège Saint-Vincent à Quimper pendant une année (1911-1912). Michel a 18 ans en 1914. S’il est certain qu’il termine la guerre comme caporal, le registre de ses exploits militaires, non contrôlables, fortement enrichi au cours des années, appartient plus à la légende d’une épopée construite qu’aux documents d’une histoire vérifiable. Cinquante ans plus tard, Michel a toujours besoin d’emprunter des médailles militaires à ses confrères pour les manifestations du souvenir! C’est grâce au P. Marie-Auguste Leclerc que Michel est dirigé d’abord vers Sart-les-Moines en 1920 pour compléter sa formation (1920-1921), puis aux Essarts (Seine-Maritime) de 1921 à 1923. Le 31 octobre 1923, il prend l’habit sous le nom de Frère Michel-Marie à Saint-Gérard. Novice devenu profès le 1er novembre 1924 à Taintegnies, il revient à Saint-Gérard pour les études (1924-1925 et 1927- 1927). Refusé aux v?ux en 1925 à cause notamment de ses difficultés aux études, il échoue à l’orphelinat de Toulouse (Haute-Garonne). L’intervention du P. Alexis Chauvin remet le Frère Michel-Marie dans le circuit: il est admis à la profession perpétuelle à Louvain, le 1er novembre 1927. Les études de théologie se déroulent également à Louvain (1927-1931) où le P. Michel- Marie est ordonné prêtre le 31 mai 1931, à 35 ans.
Dans le Mellois et le Layracais.
Les trente années de vie apostolique active du P. Michel-Marie se partagent entre le Mellois dans les Deux-Sèvres (1931-1948) et la région de Layrac,
dans le Lot-et Garonne (1948-1961). A Melle, il réside à l’alumnat Saint-Joseph. On sait que l’Assomption inaugure ce service paroissial en 1923, à Lezay, Sainte-Soline, puis Exoudun et Saint-Coutant. Le P. Trémelot est désigné pour Melle en 1925: quand il débarque de la gare avec armes et bagages, il est accueilli par l’archiprêtre du lieu qui le décontenance en lui demandant: « Pensez-vous rester quelque temps ici?». Le P. Michel-Marie prend la succession du P. Michel Kérandel Il rend également service à l’alumnat de Melle, ouvert en 1926 par le P. Marie-Félix Dufau, dans ce qui avait été auparavant un pensionnat des Frères de Saint-Gabriel. Le P. Michel-Marie reste discret sur les brimades dont il est parfois l’objet, compensées par un capital de sympathie et de compréhension de la part de la population qui attribue volontiers ses bizarreries aux séquelles de la guerre. En 1935, l’alumnat Saint-Joseph est transféré à Cavalerie en Dordogne. Le P. Michel-Marie devient responsable des paroisses de Pouffonds et de Chail. Il dessert également Saint-Léger et Saint-Romans et rédige pour tous ses paroissiens le bulletin ‘La voix des cloches’, remplacé plus tard par le ‘Carillon’. Le 5 septembre 1948, il fait ses adieux à ses ouailles et, après une halte à Pont-l’Abbé d’Arnoult (Charente-Maritime), Il prend du service à Layrac. Il a plaisir à énumérer ses nombreux titres: curé de Pergain-Taillac, vicaire économe de Parmont-Pachas, vicaire coopérateur de Layrac. Il entérine l’héritage des deux demoiselles Bugier, de Pergain Taillac, moyennant une rente viagère, pour deux propriétés agricoles (1958). Chacune de ses tournées vers le Gers est un événement local sonore: il adjure tous les saints du ciel pour faire démarrer à la manivelle sa voiture, oubliant souvent de tourner la clé de contact! Ses homélies restent célèbres pour leur composition invariable elles partent de l’Evangile du jour pour bifurquer immanquablement vers quelques souvenirs de la guerre 14-18. Le célébrant principal doit endiguer le flot verbal en entonnant le Credo. En 1961, le P. Michel-Marie rejoint les PP. Guéguen et Grannec à Libos. En 1963, il commence une vie de retraité à Blou (Maine-et-Loire), mais la maison, léguée par Mme Valette-Archambault et devenue en 1932 maison de vocations tardives Sainte-Thérèse, est délaissée durant l’été 1966 au profit de Chanac (Lozère). Certes ce changement le rebute: il ne cesse de décliner la définition du Dictionnaire: ‘Lozère, pays pauvre, de terre aride et au climat rigoureux’. Pendant le mois d’août, il est sur le pied de guerre. Le P. Anglart le véhicule cependant jusqu’à Chanac où il passe les 14 dernières années de sa vie. De tempérament fougueux, d’humeur belliqueuse, il harponne durant ses déplacements les malheureux voyageurs, connus ou inconnus qu’il rencontre. Sur les routes de Bretagne, on dit que deux évêques sont ainsi abordés, il s’offre à porter leurs valises, mais se fait remettre avant de les quitter le prix de son billet de train! Le 18 février 1975, le P. Michel-Marie est hospitalisé à Mende. Il l’est encore, une seconde fois, en juin, demandant par téléphone à son Supérieur de le rapatrier à Chanac, proclamant haut et fort qu’il n’est pas malade et que les Anciens ne sont plus respectés!. Le 27 juin, au jour anniversaire de son baptême, il meurt à Mende. Ainsi se finit une existence dont l’histoire simple mais parfois tumultueuse est transformée ou auréolée de légendes aux allures d’épopée.
Bibliographies
Bibliographie et documentation: Documents-Assomption, Nécrologe (I) 1975-1980, p. 12-13. A Travers la Province (Bordeaux). Voulez-Vous? (Bulletin de Layrac), 1976, n° 95, p. 23-24. Lettre du P. Michel-Marie Kerboul au P. Wilfrid Dufault, Blou, 1964. Dans les ACR, du P. Michel-Marie Kerboul, une correspondance (1964)