Pierre-Célestin (Pierre) REGNIER – 1866-1921

Québec, 1921.
« Votre lettre du 21 décembre m’est arrivée ici le 18 janvier. La personne
dont vous me parlez est à Montréal, elle devrait revenir le samedi 22
janvier. Je me suis procuré discrètement son adresse et je lui ai envoyé
votre lettre avec un petit mot de ma part. Hier encore je n’en avais pas de
nouvelle. Cette personne vous parlera-t-elle d’un visiteur qui lui a
demandé de l’argent? Le P. Tranquille [Pesse] est venu passer quelques
heures à la maison. Il trouve que j’ai l’air heureux comme un coq en pâte.
Je ne suis pas coq, mais j’essaie d’être bonne pâte. Il a écrit au P.
MarieClément
[Staub] il y a quelques jours pour lui communiquer ce que vous avez décidé
à Rome, mais je ne sais rien de plus. Le P. Olivier arrive à l’instant à
Bergerville. Il revient de Montréal où il a pu organiser pas mal de choses,
mais les temps sont durs au Canada. On parle ici beaucoup des nouvelles
Constitutions. Les avez-vous? Les Canadiens disent que l’hiver n’est pas
froid cette année, c’est possible car tout est relatif. Il
y a quand même 3 ou 4 pieds de neige et le thermomètre est descendu à –25°.
Ma santé va assez bien , il n’y a que ma pauvre tête à qui il ne faut pas
grand chose ».

Notices Biographiques A.A

Religieuxfrançais. D’Est en Ouest. Pierre Régnier est né le 29 juin 1866 à Saint-Pierre- sur-Sèvre (Deux-Sèvres). Il fait ses études classiques au petit séminaire de Montmorillon (Vienne), de 1880 à 1886. Il entre au grand séminaire de Poitiers (1886-1889) et est ordonné prêtre à Poitiers le 23 mai 1891. Durant cinq ans il exerce son ministère dans le diocèse de Poitiers, comme surveillant au collège Saint-Hilaire de Niort, puis comme vicaire à Saint-Etienne de Niort (1891- 1896). En 1896 il décide d’entrer à l’Assomption et reçoit l’habit religieux, sous le nom de Père Pierre- Célestin, au noviciat de Phanaraki (Turquie), le 21 novembre 1896. Envoyé ensuite comme professeur au collège Saint-Augustin de Philippopoli en Bulgarie, il y prononce ses vœux perpétuels le 25 décembre 1898. Successivement professeur et préfet de discipline, il passe de Philippopoli au collège de l’Assomption à Nîmes (Gard), de 1899 à 1901. Lors de l’exil des religieux, le Père Pierre-Célestin est envoyé comme professeur dans les divers alumnats de Belgique (Bure, 1901-1902; Saint-Trond, 1902- 1905,Zepperen, 1905-1906; Le Bizet, 1906-1909). Il est envoyé à Elorrio en Espagne (1909-1911). Puis il gagne l’Amérique pour exercer les fonctions de préfet de discipline au collège de Worcester aux Etats-Unis (1911-1920). Son état de santé demande quelques ménagements: le P. Pierre-Célestin gagne alors Québec où ü meurt le 10 avril 1921, à l’âge de 55 ans. Récit des derniers jours. « Comme le câblogramme de ce jour vous l’aura annoncé, notre cher P. Herre-Célestin Régnier vient de nous quitter pour un monde meilleur. fi s’est éteint hier soir le 1 0 avril, vers 6 h 30. C’était le dimanche du Bon Pasteur, un beau jour pour se présenter devant le gardien divin du troupeau des élus. Ceux qui ont connu le Père, ceux surtout qui l’ont vu dans son incessant labeur et sa vie de dévouement au collège de l’Assomption A.A pendant ces années dernières savent qu’il était fatigué. Il vint à Bergerville au mois de septembre dernier, il se disait heureux au milieu de la verdure, dans notre belle solitude, en face du majestueux fleuve Saint-Laurent, sous les grands pins de notre propriété. Ne pouvant pas se livrer aux travaux intellectuels ni au ministère de la prédication à l’extérieur, sa joie était de s’occuper dans nos bocages, taillant les arbres, émondant les taillis, il attendait la disparition des neiges pour reprendre ses instruments de labeur avec les beaux jours d’ami. Il était le confesseur ordinaire de la communauté des Sœurs de Jeanne d’Arc, qui purent bénéficier aussi de temps en temps de ses instructions le dimanche ou les jours de retraite mensuelle. Le Père, depuis sa venue à Québec, se plaignait souvent de douleurs sourdes à la nuque et de sortes d’évanouissements qui lui causaient parfois des insomnies; mais il se soignait, prenait des précautions, faisait de l’exercice physique. Aussi bien rien ne faisait prévoir un si rapide et si fatal dénouement. C’est le jeudi Saint que le Père se sentit frappé sérieusement. Il put encore assister à la messe du matin et communier. Dans la matinée, il me fit venir et insista pour faire une confession générale. Il voulut mettre ordre à ses affaires et il me chargea d’écrire au P. Joseph [Maubon]. Dès ce moment, il avait perdu l’espoir de se relever. Il fit toutes choses avec une grande humilité et un profond esprit religieux. Dès le soir il dut s’aliter. Le médecin consulté, craignant des complications graves et même une congestion cérébrale, conseilla de placer le Père dans un sanatorium des environs pour lui faire donner des traitements spéciaux. En compagnie du médecin je l’y conduisis le soir du Samedi-Saint. Le mal, hélas! avec de légères accalmies par intervalles, n’alla qu’en s’aggravant. On jugea nécessaire de transférer le Père à la clinique spéciale de l’hôpital Saint-Michel, situé non loin du sanatorium. La maladie se compliqua de violentes crises du cœur qui le firent beaucoup souffrir. Il pilait presque continuellement, invoquant le Sacré Cœur et la Vierge. A ma visite du premier vendredi du mois, ler avril, j’apportai au Père une de nos médailles du Sacré Cœur. Il l’embrassa fréquemment avec une tendre dévotion, en redisant avec piété les invocations au Sacré Cœur. U ne quitta plus cette médaille qu’il emporte dans la tombe. Le samedi apporta un mieux sensible, mais le dimanche les crises du cœur reprirent, au point qu’on crut prudent de lui donner les derniers sacrements. Le samedi soir, la supérieure de l’hôpital me téléphona que le malade avait encore baissé et que le médecin craignait pour le lendemain. Le dimanche matin je me rendis près de lui et lui renouvelai l’absolution, avec l’indulgence plénière in articulo mortis. je dus rentrer à Bergerville pour une cérémonie de prise d’habit fixée à 15 heures. On nous annonça sa mort vers les 18heures 30. Dans la nuit je fis transporter le corps à Jeanne d’Arc au parloir où il est exposé, devant la grande statue du Sacré Cœur. L’enterrement a été fixé pour le mercredi 13 avili. Le P. Tranquille Pesse officia à la messe, assisté du P. Marie-Louis et du P. Boudin. A la fin de la messe, je donnai l’absoute. Ce ne fut pas sans émotion que nous vîmes descendre le premier cercueil dans cette terre canadienne ». Du P. Marie-Clément Staub.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: L’Assomption, 1921, n° 241, p. 116-118. Notice biographique par le P. Marie-Alexis Gaudefroy. Assumptionists Deceased in North America, Worcester, 1995, p. 19. Vers l’idéal (Worcester), mai 1921, n° 156, p. 225-226. Récit des derniers jours par le P. Marie-Clément Staub, 11 avril 1921. Lettre du P. Pierre-Célestin Régnier au P. Joseph Maubon, Québec, 31 janvier 1921. Dans les ACR, du P. Pierre-Célestin Régnier, correspondances (1901-1921). Notices Biographiques