Théodore (Joseph Benoni) DEFRANCE – 1850-1918

Un Chartreux à l’Assomption.
« Le P. Théodore a 30 ans. prêtre et professeur au petit séminaire
d’Auxerre, il est entré à la Chartreuse quelque temps après son ordination.
Les Pères Chartreux obtinrent
à grand peine de l’évêque et du clergé l’autorisation de le
laisser partir. Il était depuis cinq ans à la Chartreuse de Valbonne (Gard)
où il a fait son noviciat et trois ans de vœux simples. Au moment de faire
ses vœux solennels, il a été constaté que sa santé ne pouvait supporter la
vie solitaire et le régime de la Chartreuse. Religieux plein de vertu, il
était prêt à persévérer en dépit des souffrances et des graves conséquences
de cet état de santé. Ses Supérieurs l’en ont dissuadé. Voulant toujours
être religieux, il a remis à ses Supérieurs le soin de lui indiquer dans
quel ordre il devait entrer. Don Anselme, le Général des Chartreux, ancien
supérieur de Valbonne,
de concert avec Don Joseph de
Vaulchier, l’actuel supérieur de Valbonne, lui ont conseillé de frapper à
la porte de l’Assomption, lui fournissant
son trousseau et sa pension. Il peut entrer de suite dans notre noviciat».
Rapport du P. E. Bailly, 8
février 1880.

Théodore (Joseph Benoni) DEFRANCE

1850-1918

Religieux français.

Une vocation ‘monastique’ à l’Assomption.

Joseph Defrance est né le 3 février 1850 à Blergny-le- Carreau (Yonne). C’est dans le cadre de son diocèse qu’il parcourt tous les cadres de sa formation cléricale: petit séminaire d’Auxerre (1862-1868) et grand séminaire de Sens (1868-1871) où il exerce deux ans les fonctions de surveillant (1873-1875). Joseph est ordonné prêtre le 7 juin 1873 à Sens par Mgr. Bernadou. C’est avec réticence qu’on le laisse partir pour la Grande-Chartreuse (Isère), puis à la Chartreuse de Valbonne (1874-1880): il reçoit l’ habit et le nom de Père Diodore. Pour des raisons de santé, il ne peut rester dans la vie cartusienne et le P. Louis- Joseph de Vaulchier, prieur de Valbonne, l’oriente vers l’Assomption l’année même où, inversement, un Assomptionniste d’Orient, le P. Athanase Malassigné, entre à la Chartreuse de Valbonne où il deviendra maître des novices. Le P. Théodore prend l’habit assomptionniste en mars 1880 à Nîmes, il reçoit le nom de Père Théodore et prononce ses vœux perpétuels le 1er avril 1882 à Osma où s’est transporté le noviciat en décembre 1880 après la dispersion de la communauté du collège de Nîmes. Les premières affectations du P. Théodore sont un peu ‘chaotiques’ à l’image de la mobilité générale des religieux de l’Assomption à cette période de fortes fondation et réorganisation. Le Père lui-même a noté sur sa fiche personnelle, mais sans grande précision chronologique parfois, ses différentes affectations: ‘A Madrid professeur de latin une année (1882-1883); à Paris, un an confesseur des Religieuses de l’Assomption (Auteuil, sans doute en 1883), surveillant deux mois à Arras (Pas-de-Calais); professeur à Notre-Dame des Châteaux (Savoie) de 1884 à 1887, professeur temporaire à l’alumnat de Nice (deux mois, 1887),

professeur à nouveau aux Châteaux pendant 4 ans et supérieur pendant neuf ans (1888-1891 et 1891-1900), supérieur à Montfort (Yonne) de 1900 à 1902′. Ce qui est certain, c’est qu’en 1901, le P. Théodore peut obtenir, avec l’accord du P. Picard, un indult de sécularisation qui lui permet de rester quelque temps sur le sol français. A partir de 1902, il gagne l’alumnat de Taintegnies en Belgique comme professeur de sciences, où il reste pratiquement jusqu’à la fin de la guerre. Les Allemands en retraite sur l’Escaut se protègent en bombardant la région. La maison de Taintegnies est fortement touchée. Evacué par les Anglais à l’hôpital Sainte-Eugénie de Lille, simplement roulé dans une couverture lors de ce transfert précipité, véhiculé dans une automobile, couché sans grand confort le 7 novembre, il meurt le 9 novembre 1918, le jour même de sa fête, dans sa soixante-neuvième année. Il est inhumé au cimetière du Sud à Lille, dans le quartier réservé aux prêtres défunts. on a pu dire du P. Defrance qu’il a conservé personnellement à l’Assomption les coutumes austères de la vie cartusienne et qu’il a cherché à en faire partager l’esprit, sinon certaines pratiques, à ses différents compagnons de vie à l’Assomption. En 1921, sur les instances du Joseph Maubon, le P. Eugène Monsterlet fait procéder le 8 décembre à l’exhumation des restes du P. Defrance pour les transférer dans une nouvelle fosse, propriété de Congrégation. La tradition attribue au P. Defrance une réputation de sainteté, attestée ou renforcée par quelques épisodes curieux et ‘merveilleux’ de sa vie. Quelques cas de guérison, médicalement inexpliqués, lui ont même été même attribués.

Fioretti posthumes.

Un ex-alumniste également ex-assomptionniste, le P. Donat devenu l’abbé Charles Cordier, en poste à Brockton en 1933, écrit au Père Ernest Baudouy quelques souvenirs de sa vie à Notre- Dame des Chàteaux au temps où le P. Defrance était supérieur: « Mon arrivée aux Châteaux fut un événement. Je partis d’Albertville à pied dans la neige avec un morceau de saucisson, un peu de pain et un peu de vin pour me restaurer en route. J’y arrivai non sans peine et j’y fus reçu en héros. On n’était pas douillet à l’époque et le P. Théodore moins qu’un autre. On cassait la glace pour se laver le matin, on marchait pieds nus dans la neige pour se réchauffer et soigner ses engelures! C’était la respiration de chacun qui chauffait la chapelle, l’étude, le réfectoire et le dortoir. Le P. Théodore se levait la nuit pour inviter ceux qui avaient les reins faibles. Je l’ai vu casser la glace et se mettre les jambes à l’eau pour soigner ses rhumatismes ».

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Lettre à la Dispersion 1922, n° 3, p. 18; 1918, n° 541, p. 337; n° 544, p. 390-397. Polyeucte Guissard, Portraits Assomptionistes, p. 115-129. L’Assomption et ses œuvres 1920, n° 232, p. 261-264; n° 233, p. 276-279; 1935, n° 410, p. 132-134. Notice biographique par le P. Marie-Alexis Gaudefray. L’Echo de Notre-Dame (bulletin de Saint-Sigismond), 1920-1921, n° 13 à 15. Lettres d’Alzon, t. XIII (1996), p. 443. On a conservé dans les ACR quelques correspondances du P. Defrance (1882-1909). Notices Biographiques