Vincent (Joseph) CARIOU – 1915-1984

Layrac, octobre 1945.
« En ce début d’année scolaire, Layrac comme toutes les
autres maisons d’études démarre tout doucement. Trente-trois étudiants – et
ce n’est pas encore tout – philosophent déjà. Les autres religieux, chacun
à leur
travail, font de leur mieux. Pour le moment nous arrivons à un total de 47
religieux. Le ravitaillement s’annonce difficile surtout pour la
question des pommes de terre, mais en principe tout est fait, au moins
verbalement. Le Bon Dieu aidant, nous y arriverons pour l’essentiel. Le P.
Alphonse Picot est en
Bretagne depuis quelques jours. Je sais que d’ordinaire lui-même se
chargeait
périodiquement de vous tendre la main. Aujourd’hui je me permets de le
faire. Le P. Eudes [Hanhart] nous annonce les mensualités de septembre-
octobre, mais tout cela sera vite passé, surtout en ce début d’année: car
il faut absolument refaire les réserves épuisées et il faut y mettre le
prix. La région éprouvée par la sécheresse ne nous donnera que peu de
choses, Si vous pouviez donc donner un peu plus d’assurance au pauvre
économe en faisant un peu monter le niveau de sa caisse
… ». P. Vincent au P. Gervais
Quenard.

Religieux français en mission au Brésil. Les débuts.

Né à Audierne (Finistère) le 30 décembre 1915 dans un milieu très pauvre, Joseph Cariou rentre comme alumniste à l’abbaye de Saint-Maur (Maine-et-Loire) en 1930, puis à Melle (Deux- Sèvres): 1933-1935. Il entre au noviciat de Pont- l’Abbé d’Arnoult en septembre 1935, prononce ses premiers vœux le 30 septembre 1936 sous le nom de Frère Vincent et accomplit une année de formation complémentaire à Layrac (Lot-et- Garonne). Il se rend à la maison SaintJean à Scy- Chazelles (Moselle) pour les années de philosophie (1937-1939). Démobilisé à la débâcle de 1940, il peut rejoindre le scolasticat Saint-Augustin de Lormoy (Essonne) pour ses années de théologie (1940-1944). Il y prononce ses vœux perpétuels le 1er novembre 1941 et y est ordonné prêtre le 12 juin 1943. « Religieux d’une grande maturité, estimé pour son sérieux et son savoir-faire, parfois hésitant ». Nommé économe au scolasticat de Layrac en 1944, en un temps de difficultés pour l’approvisionnement, puis au collège de Saint- Caprais d’Agen en 1945, il devient éducateur à l’orphelinat de Kerbernès (Finistère) en 1949.

En mission au Brésil: 1950-1983.

Le 17 novembre 1950, volontaire, le P. Vincent s’embarque pour la mission du Brésil. L’un de ses confrères, le P. Hervé Croguennec, témoigne: « Arrivé à Rio de Janeiro, le P. Vincent prend contact avec les favelados, les habitants de bidonville incrustée sur la paroisse. Deux ans après, on lui demande de prendre en charge la paroisse rurale deugénopolis, à 500 km. de Rio, paroisse de dix à douze mille habitants dispersés sur un territoire de 400 km. carrés… La population? Des paysans, surtout ouvriers agricoles. Des gens très pauvres, la plupart analphabètes, divisés entre eux, prompts à tirer une arme, attirés par le spiritisme et la superstition… C’est dans ce cadre que le P. Vincent va travailler pendant dix ans, démuni de toute ressource matérielle, mais animé d’un bel esprit de foi et de générosité.

Layrac, octobre 1945. « En ce début d’année scolaire, Layrac comme toutes les autres maisons d’études démarre tout doucement. Trente-trois étudiants – et ce n’est pas encore tout – philosophent déjà. Les autres religieux, chacun à leur travail, font de leur mieux. Pour le moment nous arrivons à un total de 47 religieux. Le ravitaillement s’annonce difficile surtout pour la question des pommes de terre, mais en principe tout est fait, au moins verbalement. Le Bon Dieu aidant, nous y arriverons pour l’essentiel. Le P. Alphonse Picot est en Bretagne depuis quelques jours. Je sais que d’ordinaire lui-même se chargeait périodiquement de vous tendre la main. Aujourd’hui je me permets de le faire. Le P. Eudes [Hanhart] nous annonce les mensualités de septembre- octobre, mais tout cela sera vite passé, surtout en ce début d’année: car il faut absolument refaire les réserves épuisées et il faut y mettre le prix. La région éprouvée par la sécheresse ne nous donnera que peu de choses, Si vous pouviez donc donner un peu plus d’assurance au pauvre économe en faisant un peu monter le niveau de sa caisse … ». P. Vincent au P. Gervais Quenard. Notices Biographiques A.A Sa paroisse il la parcourt à cheval ou en vieux taxi. Il se fait vite beaucoup d’amis, surtout parmi les plus pauvres, des détracteurs aussi, surtout parmi les plus riches, bousculés par son franc-parler quand il réclame la justice, la concorde et la paix. Il ouvre ou réanime des lieux de culte, restaure églises et chapelles. Il lance des mouvements chrétiens, surtout de jeunes. Il s’entoure d’auxiliaires laïcs et leur confie des responsabilités. Il éveille des vocations religieuses ou sacerdotales.. Au bout de dix ans, en 1962, il s’intègre à nouveau à la communauté paroissiale de Rio. Il y reste quatorze années, dont les huit dernières avec la double charge de supérieur et de curé. Apôtre toujours aussi ardent, il poursuit la mise en place des directives de Vatican II, malgré les réticences des paroissiens moins réceptifs que les paysans. Il élargit l’éventail des activités confiées aux laïcs… Vincent est un homme simple, humble et bon, extrêmement sensible à l’amitié et à la confiance des autres, et le leur rendant bien. Attentif, accueillant et fraternel, il sait ‘remonter le moral’ de tel ou tel, apaiser les esprits, trouver des terrains d’entente pour régler des problèmes de relations. En 1968-1969, il traverse avec courage le cœur de la crise qui secoue l’Assomption au Brésil, notamment à Belo Horizonte: arrestations, campagnes de dénonciations, menaces d’expulsions des religieux ‘étrangers, défections. Le climat n’est pas facile: régime militaire, épiscopat très divisé, campagne d’opinion contre le cryptocommunisme. En 1973, à 62 ans, conscient de ses propres limites, le P. Vincent demande à être relevé de sa charge. Il va à Macae s’adapter à un milieu d’ouvriers et de marins-pécheurs à qui il va se dévouer pendant six ans jusqu’à l’extrême limite de ses forces. Il y construit encore une belle église, simple et accueillante ».

Retour en France, maladie et mort.

Le P. Vincent vient de subir une grave opération de l’estomac lorsqu’il arrive le 19 septembre 1983 en la maison de repos de Layrac pour se refaire. Il garde une sonde gastrique par laquelle il est nourri, une autre sonde dans la plèvre pulmonaire. Ses confrères admirent sa patience pour supporter les soins. Ce qui marque, c’est son courage, sa modestie, sa présence à la vie, son amitié écrit son supérieur d’alors, le P. Henri-Jérôme d’Argouges. Ayant assumé la maladie et son corollaire la souffrance en toute lucidité, avec une patience et une sérénité inaltérables, il s’éteint le 19 novembre 1984. A ses obsèques, le P. Hervé Croguennec retrace l’itinéraire d’une vie apostolique toute donnée et menée avec une grande endurance au service de la mission. On peut dire de lui qu’il a vécu en bon serviteur de l’Evangile, semant la Parole à temps et contre- temps et prêchant d’exemple, en payant de sa personne.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Document Assomption, Nécrologie (III) 1984-1986, p. 40-42. Lettre du P. Vincent au P. Gervais Quénard, octobre 1945. Lettre du P. Vincent au P. Henri Guillemin du 22 février 1969 sur les événements au Brésil. Témoinage de sa vie au Brésil : Voulez-vous (bulletin de Layrac), 1958 n°26, p.18-19..