Parcours d’un Responsable hors normes.
Wilfrid Dufault est un &nbps;franco?américain, né à Spencer, dans l’état du Massachusetts, le 11 décembre 1907. Après ses études à Worcester et son année de noviciat, il est élève au collège international de l’Assomption à Rome où il est reçu à la profession perpétuelle le 30 septembre 1933 et ordonné prêtre le 24 février 1934 par le&nbps; Cardinal?Vicaire Mgr Marchetti?Selvaggiani. Licencié en théologie à l’Institut Pontifical de l’Angelicum, docteur en philosophie à &nbps;l’Université Laval de Québec, il est d’abord professeur de philosophie, de &nbps;1936 à 1946, au collège de Worcester où il a fait ses premières armes.
C’est lui tout naturellement que désigne la&nbps; Curie romaine en 1946 lorsque est créée la nouvelle &nbps;Province d’Amérique du Nord, détachée du vicariat de Paris, pour en prendre la direction. Il en devient ainsi, tout jeune, à 39 ans, le premier Supérieur Provincial. Pour services rendus à la culture française, le P. Wilfrid est décoré de la Légion d’honneur. Il est élu, le 26 mai 1952, à 45 ans, pour un mandat de 12 ans, Supérieur Général, au 23ème chapitre général tenu à Rome, du 2 au 29 mai, en remplacement du P. Gervais Quenard démissionnaire pour raison de santé. Il est vrai que l’élection de ce premier supérieur général non français de la Congrégation est sans doute due à des causes indirectes, non dénuées de dissentiments internes, les délégués français ne pouvant s’accorder entre eux sur un nom et les délégués des autres pays ayant manifesté leur désir de soustraire la Congrégation à une direction très marquée depuis ses origines par la prépondérance française. C’est une curie hétéroclite qui entoure le P. Dufault pour ce premier mandat, vite secouée par des démissions en chaîne (P. Germain Filliol en 1952, P. Florentin Kernoa en 1954) et des recompositions de fortune. Quoi qu’il en soit, le P. Wilfrid prend très vite la dimension de sa nouvelle charge, accomplissant de nombreux voyages et soutenant de nombreuses fondations de l’Assomption sous de nouveaux horizons: Nouvelle?Zélande (1952), Madagascar et Uruguay (1953), Côte d’Ivoire (1957), Costa Rica (1962). En 1956, grâce au travail du P. Athanase Sage, le P. Wilfrid peut donner à l’Assomption le livre de sa vie, les Écrits Spirituels, compendium de tous les textes majeurs du Fondateur. Certes les difficultés ou points sombres ne manquent pas en ces années pré?conciliaires: en novembre 1952, trois religieux bulgares sont fusillés à Sofia; le communisme en Europe de l’Est met à mal toutes les implantations de l’Assomption, réduites à l’état de silence et de dispersion. Le P. Judicaël Nicolas purge en U.R.S.S. une longue peine de détention jusqu’au printemps 1954. Les soubresauts politiques de la décoIonisation en Tunisie ou en Algérie aboutissent au départ des religieux de ces deux pays &nbps;(1963 et 1964). L’avenir est parfois sombre aussi en Colombie, au Congo (1964), travaillés par des ferments nationalistes, séparatistes ou par des idéologies de violence politique. Et cependant, le P. Wilfrid entreprend dans l’espérance le grand mouvement d’aggiornamento demandé par toute l’Église en Concile. En 1959, il renoue avec les Soeurs missionnaires de l’Assomption du Cap. Réélu le 15 avril 1964 pour un second mandat, il a la joie de participer au renouveau conciliaire comme ‘expert’ et supérieur d’une Congrégation ayant plus de mille prêtres. Toute la Congrégation se met en chemin conciliaire, travaillant à la révision des Constitutions. La liturgie prend des expressions nouvelles, les communauté locales et régionales une force d’animation redéfinie. En 1953, le P. Wilfrid préside à la création de la Province d’Amérique du Sud; en 1963?1964 c’est au tour du Brésil de fondation hollandaise, à l’Espagne et au &nbps;Congo?Zaïre de s’aventurer, avec le statut de vice?provinces, sur le chemin d’une première et progressive autonomie. La Belgique ne peut éviter une crise latente qui aboutit à la séparation en deux provinces linguistiques, entre le nord flamand et le sud wallon. En 1964, le 24ème chapitre général donne à l’Assomption une curie renouvelée avec l’arrivée des PP. Paul Charpentier, Léander De Leeuw et Floridor Vargas. Le P. Rémi Munsch, démissionnaire, est remplacé par le P. Romain/Camille Durand tandis que de nouveaux officiers sont confirmés ou promus: le P. Farne, Procureur, le P. Henri Moquin Econome en remplacement du P. Eudes Hanhart, le P. Domitien Meuwissen reconduit comme Secrétaire (depuis 1955). Avec la décennie des années 60, le P. Dufault a conscience aussi d’avoir à affronter en Europe comme en Amérique une profonde crise de sécularisation dont les effets sont ravageurs: baisse des vocations, difficulté de recrutement, fermeture de maisons, départ de religieux. L’effort de croissance des effectifs, déjà ralenti après guerre, s’inverse rapidement à l’Assomption, comme dans de nombreuses congrégations apostoliques de même type: alors que la courbe avoisinait celle de l’année, le déclin amorcé s’avère irrémédiable: en 1968, les presque 2.000 religieux sont devenus 1846. Pour favoriser l’élan d’une nouvelle équipe, toute la curie présente sa démission au chapitre général de 1969. Le P. Wilfrid, retiré des affaires, retrouve sa province d’origine. En 1983, il vient reprendre du service à Rome et collaborer aux travaux de la postulation des deux causes du P. d’Alzon et du P. Staub. Grâce aux travaux préparatoires du P. Touveneraud, il peut mener à bien avec le concours du P. Désiré Deraedt la mise en forme et l’édition en 1986 du volumineux Dossier Vie et vertus du P. d’Alzon qui scelle plus de cinquante ans de recherche et de présentation historiques. Le 31 mai 1986, il s’envole pour les U.S.A., cette fois définitivement, avec le sentiment reconnu et partagé du devoir généreusement accompli. Malgré l’âge et les maladies, il reste bien présent à tout ce qui fait la vie de sa famille religieuse et de l’Église. A la session d’Alzon, tenu à Rome du 23 au 26 avril 1988, le P. Wilfrid brosse l’histoire spirituelle du P. d’Alzon, encadrant son itinéraire intérieur entre les deux devises de l’ART et de l’amour du Christ. En mars 2000, nonagénaire, il participe à Paris à la rencontre des anciens Supérieurs Généraux.
Il meurt le 24 février 2004 au 70ème anniversaire de son ordination presbytérale.
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