Feliks (Jovan) STRICKI – 1917-1998

Belgrade, 1955.
« Bien que nous ne donnions pas bien souvent de nos nouvelles, nous ne
voulons cependant pas vous laisser ignorer que notre grande paroisse, la
plus grande territorialement, vit toujours. Pour qui serait de passage un
jour de Noël, il paraîtrait que tout y est normal et qu’elle n’a rien perdu
de sa vitalité d’avant-guerre. Depuis dix ans, le corps diplomatique
français au complet assiste à la messe de minuit. L’affluence des fidèles
en cette période n’a jamais cessé. La crèche de Noël n’a rien à envier à
celle des plus belles paroisses de France. Nous continuons à faire la
bénédiction des maisons à partir de
l’Epiphanie. Quelquefois cela dure jusqu’au Carême. A cette occasion nous
découvrons de nouvelles familles chez qui personne ne s’est encore rendu
depuis le départ des ivieux Pères français à barbe’. Si nos compatriotes
aujourd’hui en France pouvaient venir nous aider! C’est la seule solution
qui pourrait redonner à la paroisse quelque chose de son activité
d’avant-guerre. Au point de vue locaux, nous l’emportons sur les Jésuites,
les Franciscains et les Lazaristes, mais, eux, sont plus nombreux en
personnel. Notre vie de communauté et de paroisse s’en ressentirait».

Notices Biographiques A.A

Religieux yougoslave de la Province de Lyon. Dans les mouvances de l’histoire. Jovan Stricki est né le 19 février 1917 à Parabuc, en Voïvodine (1), au nord de la Serbie. Les Allemands occupent alors le pays. Parabuc est un nom de lieu qu’il est inutile de chercher sur une carte. Ce village était, depuis l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche, mère de Marie-Antoinette, l’épouse de l’infortuné Louis XVI, une colonie peuplée d’Autrichiens et de Hongrois, tous catholiques. Mais à l’arrivée des communistes car, hélas, le nettoyage ethnique ne date pas d’aujourd’hui tous ces habitants ont été chassés et il ne restait qu’une quinzaine de familles catholiques au milieu de centaines et de centaines de nouveaux colons, tous rouges. Même le village a changé de nom. Il s’appelle aujourd’hui Ratkovo (2). Après ses études secondaires à l’alumnat Notre- Dame à Saint-Sigismond (Savoie), puis à celui de Miribel-les-Echelles (Isère), jovan entre en 1936, sous le nom de Frère Feliks, au noviciat de Nozeroy (Jura) où il fait profession le 5 octobre 1937. Il séjourne à Layrac (Lot-et-Garonne) pour l’année complémentaire, à Scy-Chazelles (Moselle) et à Lormoy (Essonne) pour les études de philosophie et de théologie. En 1940, il doit aller à Lorgues (Var) pour se soigner. Il revient à Layrac en 1942, y poursuit ses études de théologie et il est ordonné prêtre en Agen (Lot-et-Garonne), le 23 juin 1943, tout en devant terminer ses études ecclésiastiques à Lormoy. En 1944, le P. Feliks est affecté à l’alumnat de Nozeroy qui y a pris provisoirement la place du noviciat, mais il lui faut, au bout d’un an ou deux, retourner à Lorgues pour soigner ses poumons. En 1947, les événements vont le reconduire dans son pays d’origine. Le curé de la paroisse de l’Assomption à Belgrade, le P. Privat Bélard, est expulsé du pays, passé aux mains des communistes. A.A Le P. Matthieu Tchoutoura lui succède et le P. Feliks est nommé vicaire en 1948. Il devient lui- même curé en 1953 et, à nouveau vicaire, en 1959. A l’automne 1973, il est à nouveau à Lorgues, pour la troisième et dernière fois, avec un seul désir, retourner le plus vite possible au pays. En septembre 1975, en accord avec l’évêque de Subotica (3), il va se fixer à Ratkovo, ci- devant Parabuc. Rattaché à la communauté de Belgrade et résidant dans une famille, il se met au service de la petite communauté catholique. Affaibli par l’âge et souffrant de la maladie de Parkinson, il est accueilli en mars 1990 dans la maison des prêtres Josephinum à Subotica. Des confrères assomptionnistes lui rendent visite tant que cela est possible. Les derniers à le visiter sont sans doute les PP. Michel Zabé et le P. Albert Heckel en juin 1991. Trois semaines plus tard débutent les hostilités entre la Serbie et la Croatie, rendant tout déplacement dans cette région impossible. A Subotica, le P. Feliks est bien soigné. Son frère qui habite Szolnock en Hongrie, va le voir chaque mois et correspond régulièrement avec le Vice-Provincial de l’Est, le P. Michel Zabé, l’assurant souvent que Jovan il a repris son prénom de baptême pense chaque jour à ses frères assomptionnistes et offre ses souffrances pour eux. Après la mort du P. Jovan- Feliks, survenue le 23 septembre 1998, son frère écrit: « LI a remis son âme purifiée à Dieu. Il a reçu en toute lucidité le sacrement des malades. Ses obsèques ont été célébrées par Mgr Santic, évêque auxiliaire de Subotica, entouré de dix prêtres. L’inhumation a eu lieu dans le caveau des prêtres, au cimetière de la rue Baja. Se sont joints à la communauté des Sœurs quelques membres de notre famille et des religieux de Subotica ». Le P. Jovan est ainsi le der- nier assomptionniste à résider dans l’ex-Yougoslavie. (1) La Voivodine est la région de la Serbie, au Nord de Belgrade, dont la principale ville est Novi Sad. Cette région, longtemps disputée entre les Slaves, les Turcs et les Hongrois, est l’une des plus fertiles de l’Europe Centrale. Elle a servi de véritable grenier aux beaux jours de la Yougoslavie. Sa population est composée de petites minorités. Mais à partir de 1991, le pouvoir de Belgrade installa dans la région de nombreux réfugiés serbes de Croatie et de Bosnie, modifiant ainsi l’équilibre toujours fragile entre les diverses composantes de la population. (2) D’après le P. Michaël Djudjar. (3) Mgr Matija Zvekanovic.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Documents Assomption, Nécrologe (VIII) 1998-1999, 1999, p. 49-50. Assomption-France, Nécrologie année 1998, p. 443-444. Lettre du P. Peliks Stricky, Belgrade, 29 décembre 1955. Dans les ACR, du P. Feliks Stricki, quelques correspondances (1953-1965), rapport sur Belgrade (1961). Notices Biographiques