Gaudens (Emile) GAUDE – 1873-1918

Hommage de Maurice Barrès.
« Pour perpétuer le mouvement d’une grande âme, nous avons encore les
Congrégations. Chacune d’elles enregistre et transmet à travers les siècles
le fluide particulier de son fondateur.
Le P. Gaudens, supérieur de la mission de Konia, n’est peut- être pas un
mystique lui- même, mais à l’origine de son activité de missionnaire, il y
a l’inspiration du P. d’Alzon, et pour tous ces religieux que j’ai vus, au
long de ma route d’Asie, cela vient d’un élan qui leur a été transmis, ils
continuent l’exaltation qui leur
a été communiquée par les Vincent de Paul, les Loyola, les Jean-Baptiste de
La Salle.
De pauvres gens auprès de tels chefs! Peut-être, mais c’est la même flamme.
Ils l’ont
trouvée dans leur Règle. Ces paysans de la Savoie, de la Lozère, de la
Bretagne, ne pourraient pas demeurer dans ce dur Orient s’ils ne se
rafraîchissaient dans l’émotion de leurs premiers vœux… Ils gardent, pour
se soutenir, la mémoire des dix minutes premières de leur vocation. Ils
vivent, ils surmontent la routine, en maintenant le contact avec la pensée,
le sentiment, l’influx de leur fondateur… ». Une enquête aux Pays du
Levant, t. 1, p.
304 et sq.

Gaudens (Emile) GAUDE

1873-1918

Religieux français.

Formation en Orient.

Emile Gaude est né le 22 mars 1873 à Ruoms (Ardèche). Après ses études secondaires faites dans différents alumnats (Nice, Villecomtesse, Notre- Dame des Châteaux et Nîmes), il prend l’habit le 14 août 1891 à Livry-Gargan et est envoyé au noviciat de Phanaraki en Turquie, sous la direction du P. Ernest Baudouy. Il prend le nom religieux de Frère Gaudens (1) et prononce ses premiers vœux le 15 août 1892, suivis des vœux perpétuels à la même date en 1893. Il est alors envoyé dans les œuvres, comme professeur à Eski-Chéir (1893-1896). Il revient sur les bords de la mer de Marmara pour étudier la philosophie et la théologie à Kadi-Keuï (1896-1899). Il est ordonné prêtre le 19 septembre 1899. Après quoi, il est nommé supérieur à Konia (2), l’ancienne Iconium des Actes des Apôtres.

Pendant la première guerre mondiale.

Il demeure à son poste de 1899 à 1914. Au moment de la déclaration de guerre, dans le bouleversement général qui s’ensuit pour toutes les œuvres de la mission en Turquie, la plupart des religieux ont dû fuir. Les Supérieurs demandent au P. Gaudens de rester à Kadi-Keui, le centre de la mission, pour veiller sur ce qui peut être sauvé. La cour martiale turque le fait emprisonner à Constantinople. Après des débats fort longs et périlleux, il est expulsé et se réfugie en Bulgarie. C’est de là, qu’à son tour, il est mobilisé par l’autorité militaire française : il devient aumônier de marine et il est affecté au navire-hôpital Le Vinh-Long. En septembre 1918, le P. Gaudens se trouve atteint, au contact des malades, par la ‘grippe espagnole’. Fatigué, sur le conseil du médecin-major, il se rend à bord de l’Asie, à l’infirmerie. Installé dans une cabine proche de celle de l’aumônier,

il tient un peu conversation avec lui, mais la fièvre persiste et il commence à délirer. Il meurt rapidement, le lundi 4 septembre 1918, à bord de ce navire, l’Asie: il est à cette date, pour ce jour, la 8ème victime de son navire-hôpital, Le Vinh-Long, en rade de Toulon. Le P. Gaudens est inhumé, selon l’usage, au carré des Officiers, au cimetière de l’hôpital maritime à Saint- Mandrier (Var), le lendemain 5 septembre. Le P. François de Sales Prudhommeaux, alors en poste à Marseille, est contacté trop tard pour participer à la cérémonie (3), mais essaie de relever quelques détails sur les circonstances du décès du P. Gaudens, détails qu’il transmet par lettre au P. Maubon, le 6 septembre 1918 (4).

(1) Evidemment, le nom de famille ‘Gaude’ peut appeler le nom de ce saint ‘Gaudens’, porté par une agglomération de Haute-Garonne (31), en référence au saint évêque de Brescia des IVème- Vème siècles. On connaît aussi une autre forme usitée de ce prénom chrétien, Gaudence, bien attestée par les Martyrologes. (2) Konia, célébre ville des derviches tourneurs, est un des nombreux postes de la mission assomptionniste en Turquie d’Asie. Fondé en 1892, le poste est pris en charge par le P. Jean Pistich, aidé du Frère Agapit Didier qui allait mourir précocement en 1898 à Andrinople. Il réussit à obtenir l’autorisation officielle d’enseigner et peut préparer l’installation des Oblates de l’Assomption. En 1899, le jeune Père Gaudens succède à Konia au P. Joachim Donnel, ce dernier venu en 1895, lequel a pu organiser dans des locaux provisoires écoles et chapelle. Le P. Alfred Mariage, supérieur de toute la mission d’Orient, peut, lui, profiter de la sympathie du vali local, Férid Pacha, pour acheter terrains et logement plus convenables. Grâce au secours financier de la baronne de Gargan, le P. Gaudens met en exécution un véritable plan d’occupation. En juillet 1909, une église dédiée à Saint-Paul est commencée, dont la bénédiction est faite le 11 décembre 1910. jusqu’en 1914, la mission se développe de façon régulière. Missions de l’Assomption en Orient, notice illustrée 1862-1924, Lyon, 1925, p. 101- 107. (3) Il faut dire que l’autorité militaire a fort à faire à cette époque à cause des nombreux décès: la dépêche du P. François de Sales Prudhommeaux signale 11 enterrements pour le mercredi 6 septembre, 11 pour le lendemain et 17 prévus pour le vendredi 9 septembre!

(4) D’après La Lettre à la Dispersion (L’Assomption aux armées), 1918, n° 532, p. 195.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Lettre à la Dispersion, 1918, n° 532, p. 193-194, 195-196; n° 537, p. 275-278, 1919, n° 569, p. 272. L’Assomption, 1919, n° 219, p. 57-60. Notice biographique par le P. Marie-Alexis Gaudefroy. Dans les ACR, du P. Gaude Gaudens, correspondances (1899-1918), rapports sur Konia (1905- 1914). Texte cité de Barrès d’après La Lettre à la Dispersion, 1923, n° 66, p. 505 et n° 67, p. 511-514. Notices Biographiques