Joseph (Cyrille) BERNARD – 1899-1956

Comment prendre en charge un invalide?
« Depuis plusieurs mois, le Fr. Joseph est partiellement paralysé par
suite, aux dires du médecin Conn de l’hôpital de Winsted, d’une pression
sur le cerveau, conséquence d’une blessure reçue par le Frère avant son
entrée au noviciat. Ce dernier est en ce moment à Worcester, invalide,
ayant des trous de mémoire qui le font parler comme s’il était ailleurs
dans une autre condition. A
ma grande surprise, j’ai appris par ce médecin qu’il l’avait déjà soigné
lors de son accident et de sa blessure à la tête et qu’il l’avait envoyé à
l’hôpital des aliénés. Ce médecin, par ailleurs catholique, a manifesté une
grande surprise qu’un tel malade ait été accepté comme religieux. J’ai
questionné le P.
André Godbout son maître des novices: le frère lui a
seulement dit qu’il avait été blessé à la tête, mais ne lui a jamais parlé
de toute son histoire médicale. Avant d’entrer chez nous, il avait essayé
dans une congrégation de frères enseignants. A-t-il agi par dol ? En ce
moment, le P. Armand Desautels chez qui le Frère a été envoyé, peut
s’occuper plus facilement des invalides, mais pour combien de temps? »

Henri Moquin, 26.6.1955.

Religieux canadien de la Province d’Amérique du Nord.

Un novice de 50 ans.

Joseph-Cyrille est né à Saint-Gervais au Québec (Canada) le 9 février 1899, selon sa fiche de renseignements, 1890 selon sa formule de profession. Il fait ses études primaires dans l’école du village et poursuit ses études à l’Ecole normale dans le but de devenir professeur à Laval. Avant d’entrer dans la vie religieuse, Joseph fait carrière dans l’enseignement de 1919 à 1937. A cette dernière date, il se trouve à Winsted (Connecticut) où il travaille chez son frère Léandre comme commis d’épicerie, ceci jusqu’en 1949. Pourquoi a-t-il quitté l’enseignement? Quand il entre au noviciat de Bergerville (Sillery, Québec) le 24 décembre 1949, à 50 ans, il a déjà l’aspect d’un vieillard vénérable, à tel point que ses confrères le surnomment avec un brin de malice ‘Mon oncle’. Rien ne le distingue sinon son âge. Très discret sur lui-même et son passé, presque muet, c’est un homme cultivé et très diplômé qui se met avec régularité à sa nouvelle vie religieuse, très soucieux de ne rien demander et de ne pas importuner. On sait qu’il écrit des poésies et ses notes intimes, retrouvées après sa mort, dénotent une grande qualité de vie intérieure. Sans doute a-t-il fait un premier essai de vie religieuse antérieurement chez des frères enseignants, mais là encore tout est ignoré. Le 29 juin 1951, Fr. Joseph est admis à prononcer ses premiers vœux et il est affecté à l’entretien du fichier de la revue L’Appel du Sacré-Cœur, charge de secrétariat qu’il remplit avec soin et avec goût, sous la direction du P. André Godbout qui fut son maître des novices. Du point de vue du caractère, Fr. Joseph se montre en communauté paisible et charitable, ne prenant presque jamais la parole en public et sollicitant simplement les permissions

Notices Biographiques A.A Page : 257/257 ou autorisations nécessaires. L’obéissance l’appelle le 21 avril 1953 à changer de poste pour la paroisse espagnole de la 156ème rue à New-York, ce qui se fait sans difficulté, le Fr. Joseph ayant déjà auparavant obtenu la nationalité américaine. Il se donne de tout cœur à sa nouvelle fonction. Selon le témoignage du Supérieur de l’époque, les religieux de la communauté se montrent très satisfaits de son esprit de service et de charité.

Un grave accident de santé.

Mais en avril 1933, après deux ans de présence à New York, le Frère Joseph, toujours profès temporaire, donne des signes de fatigue inquiétants. Le Provincial alerté, le P. Moquin, juge préférable son retour sur Québec. Mais au cours du voyage, de passage chez son frère Léandre à Winsted, Fr. Joseph est frappé d’une paralysie partielle, ce qui nécessite son transfert à l’hôpital le plus proche de cette localité où il est soigné six semaines avant de gagner le collège de Worcester (Massachusetts) où il reste quinze mois, soigné avec fraternité par les religieux de la maison qui se relaient à son chevet pour une prise en charge lourde. Le 20 juin 1956, le P. Daniel négocie avec beaucoup de dévouement et de savoir-faire le transfert du malade dans la maison de retraite Saint-Benoît à Montréal, structure médicale équipée des Frères de la Charité. Malgré des soins appropriés, l’état physique et mental du Fr. Joseph ne fait que décliner. Le médecin diagnostique alors une leucémie avancée et ne donne qu’une espérance de vie de six mois. Devant de telles perspectives, le processus mis en œuvre pour la profession perpétuelle du Fr. Joseph prévue pour juin 1955, joint à des suppléments d’enquête demandés par le P. Provincial, a été stoppé. Trois mois après la prise en charge hospitalière, le Fr. Joseph meurt, le 21 septembre 1956 au matin. Son corps est transféré à Québec ce même jour. Le 24 septembre 1956, les obsèques sont célébrées à Bergerville (Sillery) au Montmartre canadien par le P. Armand Desautels, supérieur du collège de Worcester. Le Frère est inhumé dans le petit cimetière de la communauté, taillé à l’ombre du chemin de croix dressé en plein air à l’intention des pèlerins du sanctuaire.

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Bibliographies

Bibliographie : B.O.A. décembre 1957, p. 219. Lettre à la Famille 1957, p. 82-83. Yves Garon, Les Assomptionnistes au Canada, Sillery, 1997. Assumptionists Deceased in North America, p. 21.