Joseph (Vincent-J.-J.) GERMER-DURAND – 1845-1917

Jérusalem, 1911.
« Enfin, ma chère Sœur voilà de vos nouvelles! et le silence a obtenu ce
que les lettres n’obtenaient pas. Il y a bon temps que l’aède ne chante
plus, et c’est à peine s’il écrit encore en prose. Je ne sais pas ce qu’on
a mis dans mon encrier, mais ça ne veut pas marcher. Alors vous allez
mieux, Dieu soit béni!
Pour moi je continue à vieillir, sans être positivement malade, mais
incapable de supporter un travail fatigant. Je suis allé hier passer la
journée à Béthanie chez les Passionistes pour célébrer la Ste Marthe. C’est
la fête patronale de leur maison, et j’en suis tout chiffonné aujourd’hui.
Il est vrai que nous sommes aux jours chauds, et qu’ils habitent un désert
tout blanc, presque sans arbres où le soleil flambait splendidement.
Ce devait être moins dévasté du temps de Marthe et de Marie. Nos jeunes
sont en Galilée:ils sont allés prendre un peu de vacances au Carmel, à
Nazareth et au Thabor. Ces courses que j’aimais bien jadis sont au-
dessus de mes forces et. je garde prudemment la maison. Le
silence et la solitude font ma
joie, en compagnie de mes amis, les livres. Je suis un débris du XIXème
siècle, oublié sur terre au XXème siècle. Tous ceux de mon age sont partis
… ».

Joseph (Vincent-J.-J.) GERMER-DURAND

1845-1917

Religieux français, assistant général (1912-1917).

D’une famille assomptionniste.

Vincent-Jean-Joseph Germer-Durand est né à Nîmes, le 23 septembre 1845: il trouve dans son berceau la culture, la science et l’amour de l’Assomption qui sont les ornements d’une famille enracinée dans l’Assomption des origines. Eugène Germer-Durand, son père, a renoncé à une carrière universitaire pour épauler le P. d’Alzon dans la réorganisation d’un collège catholique. Fervent admirateur du fondateur, il fait partie du Tiers-Ordre de l’Assomption dont la création est contemporaine de la fondation de la Congrégation. Son épouse, Cécile, devient Oblate après la mort de son mari. Les deux autres enfants vivants, François et Jean perpétuent les valeurs familiales, le premier dans l’architecture, le second dans l’armée. Joseph, après ses études au Collège à Nîmes (1852-1863), entre au noviciat de l’Assomption au Vigan le 15 août 1863, prononce ses vœux perpétuels entre les mains du P. d’Alzon le 8 septembre 1865. De 1865 à 1870, il étudie la théologie et la philosophie tout en prêtant son concours au Collège de Nîmes. Déjà à cette époque, il cultive la poésie, la numismatique, l’épigraphie et la paléographie. Il est ordonné prêtre à Nîmes le 21 mai 1869 par Mgr Plantier. Dans les années 1872 il se trouve à Paris, dans le milieu où naissent les grandes impulsions apostoliques de l’Assomption après les dures expériences de la guerre, de la Commune et de Rome ‘ville piémontaise’. Musicien, il anime les offices liturgiques à la chapelle de la rue François 1er. Il contribue à rédiger les cérémoniaux en usage chez les Religieux et les Religieuses de l’Assomption. Il collabore aux revues de cette époque, notamment à la Revue de l’enseignement chrétien, ressuscitée en 1871. Il est un collaborateur de la première heure du Pèlerin où il donne des croquis pleins de finesse

et des articles humoristiques qui n’ont pas l’heur de plaire au P. d’Alzon, partisan d’un genre sérieux. Il prend part au premier pèlerinage assomptionniste en Terre Sainte en 1882 dont il décrit avec adresse les innombrables péripéties. Chargé du noviciat de Paris, fondé par le P. Picard en 1878, il le dirige à Sèvres jusqu’aux expulsions de 1880. Dans cette même maison, il se dévoue au noviciat des Oblates et se lie aux Mères Franck d’une amitié fraternelle indéfectible, malgré les difficultés qui vont survenir.

Au pays de la Bible , à Jérusalem.

En 1887 le P. Joseph part pour Jérusalem: il va y demeurer presque 27 ans, jusqu’en 1913. Grâce à l’aide du comte de Piellat et à celle du P. Boubet, il peut mener à bien la construction de Notre-Dame de France, hôtellerie pour les pèlerins et maison d’études. Excellent cavalier, il sillonne en tous sens les régions de cet Orient dominé par les Turcs, où il peut organiser assez librement des marches, des campements, des expéditions, à la recherche des témoignages archéologiques du passé biblique, notamment des bornes milliaires. Il peut déployer durant un quart de siècle une culture supérieure, une étonnante activité, une énergie sans défaillance, si bien accordées à ses goûts et à ses dons d’archéologue amateur. Sa passion, ce sont les fouilles, à Saint-Pierre-en-Gallicante, au Mont Sion. Ami du P. Lagrange, il rompt quelques lances, mais courtoisement, dans des revues savantes et spécialisées pour des identifications topographiques. Il exhume des murs, des monnaies, des tessons, des objets et constitue un musée. il croît avec d’autres mettre à jour la ‘fosse profonde’, dans les supposés vestiges du palais du Grand-Prêtre. Le P. Germer-Durand fait part de ses découvertes dans toutes les revues qui s’intéressent à la science encore neuve de l’archéologie. Homme de paix par nature, il n’entre pas dans les controverses acerbes. Il n’a pas le temps d’achever une thèse sur une version géorgienne d’un ancien Ordo grec de Jérusalem. En 1912, il est appelé au chapitre général (Limpertsberg) et il est élu assistant général: il gagne Rome, dit adieu à Jérusalem en 1913. La paralysie le gagne peu à peu. En 1915, il doit se retirer à San Remo. Il y meurt le 27 septembre 1917, à l’âge de 72 ans. Il y est inhumé. Homme bon et modeste, savant sans s’imposer, d’un abord aimable et spirituel, il emporte avec lui la génération des origines. Le P. Emmanuel Bailly le suit dans la tombe deux mois après.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Lettre à la Dispersion, 1918, n° 514, p. 419-432; 1922, n° 10, p. 69-76. Polyeucte Guissard, Portraits assomptionistes, p. 199-212. L’Assomption, 1922, n° 251, p. 84-87; n° 252, p. 103-105; n° 253, p. 212-122. D.H.G.E. t. XV, col. 1334 et S.D.B. t. III, col. 613- 615. Lettres d’Alzon t. XIII (1996) p. 450. Revue Biblique, 1919. Circulaire du P. Emmanuel Bailly, 1917, n° 100. Notice biographique par le P. Marie-Alexis Gaudefray. Dominique Trimbur, Une présence française en Palestine: N.D. de France dans Bulletin du Centre de recherche français de Jérusalem, automne 1998, n. 33 à 58. Du P. Joseph G.-Durand, dans les ACR, une énorme correspondance (1868-1914) oeuvres poétiques, articles, ouvrages, études topographiques bibliques et archéologiques. On peut consulter la liste de ses publication au catalogue de la Bibliothèque Nationale. Lettre citée du P. J.G.-D. à Mère Franck, Jérusalem, Juillet 1911. Notices Biographiques