Marie-Adolphe (Léon) BOHON – 1886-1975

Plaidoyer pro domo.

« Je reçois une lettre de Bruxelles, dure comme je n’aurais pas cru qu’elle
pût l’être. J’aurais pu être heureux à Spa, mais comment me taire en face
d’abus évidents, tels qu’un moraliste et un
canoniste m’a fait un devoir de conscience de dénoncer à l’Ordinaire’?
Cela signifie grelotter dans un appartement sans feu, souffrir qu’une
enfant soit limitée dans ses communions par l’initiative souveraine d’une
autorité usurpée! Quand cette personne est absente, c’est l’ordre parfait;
présente, c’est aussi tôt le désordre! Comment pouvez-vous éliminer d’un
trait 12 ans de ministère paroissial sans accroc, mes 3 mois d’aumônerie
chez les Assomptiades de Boulouris ravies, mes 6 ans à Toulon
sans bavure, à côté de ces trois ans à Spa où une fille d’un tel genre
réussit à créer une
cabale de deux sœurs sur trente. L’évêque lui-même a manifesté son
indignation à la supérieure, trop faible. J’ai fait
18 mois à Satillieu dans un enthousiasme partagé. Je suis écrasé par
quelqu’un qui se dit
‘Père’, écrasé par les calomnies et les faussetés d’une fille. On en
connaît les tares, mais je dois partir. Sauvez-moi!…». Spa, 1959.

Religieux de la Province de Belgique-Sud.

Un premier parcours à l’Assomption.

Léon est né le 29 octobre 1886 à Aisne-sous- Heyd, dans la province belge de Luxembourg. Après ses classes primaires, il entre à l’alumnat de Taintegnies (1898-1903). Il prend l’habit sous le nom de Fr. Marie-Adolphe à Louvain le 18 octobre 1903 et y fait sa première profession le 19 octobre 1904. Il enseigne en 3ème année d’études à Sart-les-Moines (1905-1906) et fait ses études de philosophie à Louvain (1906- 1909) où il est reçu à la profession perpétuelle par le P. Merkien le 20 janvier 1907. A nouveau il interrompt ses études pour enseigner à l’alumnat de Taintegnies (1909-1910) et gagne Jérusalem pour ses études de théologie (1910- 1913) qu’il complète à Rome (1913-1914). Il est ordonné prêtre dans la Ville éternelle le 21 décembre 1913. La première partie de sa vie apostolique se déroule dans le cadre de l’enseignement: alumnat de Zepperen (1914- 1919), scolasticat de Louvain (philosophie et apologétique) de mars à juillet 1919, à nouveau Zepperen (1919-1920). Il suit une année à Bruxelles des cours de médecine tropicale. De nouveau il est nommé professeur à Taintegnies, devenu scolasticat (1921), et passe à Sart-les- Moines (1921-1925) où en plus de l’enseignement, il assure un service d’aumônerie. Son bagage intellectuel est assez élevé: il possède l’hébreu biblique et l’arabe, il connaît l’allemand et le flamand en plus du français. Mais pour des raisons de santé entre autres et de difficultés de vie commune, de caractère nerveux, souvent taciturne, découragé et triste, Le P. Marie-Adolphe va commencer en 1925 une longue vie de solitaire ou de rattaché.

Un religieux ‘ermite’.

Avec l’assentiment de ses supérieurs, le P. Marie-Adolphe entame donc en 1925 un parcours individualisé,

hors d’une communauté assomptionniste. Aumônier de divers couvents de 1925 à 1950, notamment de Visitandines, il se trouve bien souvent en ‘situation de ballotage’, difficile à vivre pour lui, toujours à la recherche de régularisations impossibles. Suite à une mise en demeure du P. Gervais Quenard en 1936, il répond attristé en février: « Votre lettre m’a été remise à l’heure où je sonnais le catéchisme, j’ai eu le temps de la lire avant de faire entrer les enfants. Elle m’a chargé de peine. Quant à votre question t soit une dem ande d’ex claustration temporaire soit le rattachement fixe à la communauté de Lorgues], je vois assez quelle en est l’inspiration. J’ai un statut religieux régulier, puisque je suis de la Province belge, autorisé par le Provincial de l’époque, le P. Rémi Kokel, à accepter l’aumônerie de la Visitation de Flassans-sur-Issole [près de Toulon, Var] pour des raisons personnelles. Quelqu’un est venu défaire ce qui avait été fait, sans que j’aie trouvé en lui la paternelle sollicitude et la paternelle défense que je pouvais attendre. Pris à l’improviste, Lyon en a marqué de l’humeur, Rome je ne sais. Mais quant à supporter l’autorité de Lyon, vous comprenez que la question ne se pose même pas … ». Sa vie de religieux isolé se poursuit: curé de Callian (Var) en 1938, curé de Ville-en-Hesbaye (Belgique) de 1951 à 1954, aumônier à Spa en Belgique de 1954 à 1960 où un sombre différend l’oppose aux religieuses. Il choisit Zepperen, maison flamande, à l’heure de la retraite vers 196 1. Il a la joie d’y fêter ses 50 ans de vie sacerdotale en 1963: « jamais, m’a-t-on dit dans ma famille selon le sang, on n’avait vu une aussi belle messe. C’est jusqu’aux larmes que j’ai été ému cette fois: j’ai senti une telle atmosphère de cordialité, d’affection et de sympathie. Le souvenir de Mgr Piérard m’était bien présent, on ne s’oublie pas. C’est tous les jours que je prie pour les ‘circumstantes’. Je n’ai pas le souvenir de vous avoir rencontré et d’avoir pu avec vous os ad os loqui » écrit-il en remerciement au P. Dufault à Rome. Le P. Marie-Adolphe, réconcilié et réintégré dans la vie commune, reste à Zepperen jusqu’à sa mort, survenue le 6 juillet 1975. Il y est inhumé le mercredi 9 juillet. Il est juste de dire que cette communauté méritante de Zepperen a fait un grand acte de charité fraternelle en acceptant de recevoir un religieux de caractère notoirement difficile.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Documents Assomption, Nécrologe (1) 1975-1980, p. 13. Belgique-Sud Assomption, juillet 1975, n° 73, p. 1890. Dossier personnel (ACR). Le P. Bahon a entretenu une correspondance nourrie, sans doute en partie seulement conservée, avec les responsables de la Congrégation (1909-1955). Son dossier personnel recèle un lot important de correspondances non enregistrées. il a collaboré à la revue ‘Jérusalem’ et, d’après ses notes, est l’auteur de cartes géographiques sur Jérusalem et les Hautes Fagnes.