Maurin (Michel-J.-J.) MAURIN – 1881-1967

Figure.
« Le Père Maurin n’avait, aux yeux de ses confrères, aucun don
exceptionnel, ni comme professeur, ni comme surveillant. Mais on le savait
toujours prêt à rendre service et c’était chaque fois un service bien rendu
où sa
personne s’effaçait. De sa part, aucune mise en avant, aucune forfanterie.
c’était l’homme capable de faire honnêtement presque toute chose et dont on
se servait sans vergogne. Il
était un peu comme le vieux serviteur des anciennes familles, capable de
tout faire et utilisé par tous pour toutes sortes de besognes, sans que
l’on prêtât attention à sa personne même. C’était bien l’homme donné,
mangé. Actif, toujours utilement occupé, il ajoutait à son programme
régulier tout ce que son dévouement lui suggérait pour rendre service.
Ainsi il apprit l’harmonium pour accompagner les offices, sans grand
talent, il faut le reconnaître, mais avec assez de méthode pour pouvoir
l’enseigner et former de bons organistes. Que de récréations il a passées à
diriger les exercices des débutants! Ainsi encore il se fit relieur pour
sauver des livres classiques endommagés, cordonnier pour réparer des
chaussures usées, menuisier pour rafistoler du mobilier détérioré, toujours
infirmier.

Religieux de la Province de Paris.

Un parcours de combattant.

Michel Jean Joseph Maurin est né le 31 décembre 1881 à Saint-Etienne-Lardeyrol (Haute-Loire), au diocèse du Puy, dans une famille paysanne, modeste, qui s’honore de liens de parenté avec Mgr Boudinhon, Recteur de Saint-Louis des Français à Rome, canoniste réputé en son temps. Il fait ses études primaires à Saint-Germain-Laprade. A 13 ans il entre au petit noviciat des Frères des Ecoles chrétiennes de la localité, tout en songeant au sacerdoce. En 1898, ayant pris conseil, il demande à prendre l’habit chez les Frères et en 1900 y prononce ses vœux religieux. Il commence alors une carrière d’enseignant-instituteur dans de petites paroisses rurales de la Haute-Loire (Coulon, Aurec, Vals, Yssingeaux et Bas-en-Basset). On le discerne sur une petite photographie de 1912, habillé en civil, entouré des 85 gamins de sa classe, l’œil sévère, les lèvres ornées d’une opulente moustache à la Vercingétorix. Le désir du sacerdoce le poursuit toujours. Il s’en ouvre à ses supérieurs qui l’autorisent à demander son admission à l’Assomption, à la maison des vocations tardives de Sart-les-Moines (Belgique). Michel passe deux années à Sart-les-Moines (1912-1914), consacrées à l’étude du latin et des humanités classiques. Sa compétence en mathématiques et son âge le font désigner comme professeur de cette discipline auprès de ses condisciples. En 1914, il demande son admission au noviciat dé Limpertsberg. La prise d’habit est prévue pour le 15 août. Cette année promettait de battre le record d’affluence, pas moins de 70 postulants en provenance de Taintegnies, d’Ascona, d’Elorrio, de Sart-les-Moines. La déclaration de guerre disperse cette jeunesse. Avec foi et optimisme, Michel accepte cette épreuve supplémentaire dans son parcours, se met aux besognes agricoles

dans des fermes et trouve le temps de s’initier à la philosophie scolastique. A l’automne 1917, il peut gagner Louvain. Sous le nom de Frère Maurin, il prend l’habit le 11 février 1918, prononce ses premiers vœux le 19 mars 1919, achève ses études de philosophie à Taintegnies de 1919 à 1920, accomplit quatre années de théologie à Louvain (1920-1924), est admis à la profession perpétuelle (10 mars 1921) et enfin il est ordonné prêtre le 27 juillet 1924 par Mgr Louis Petit, à 43 ans. Coïncidence, le Seigneur lui accordera 43 années de vie sacerdotale.

Dans les œuvres.

Le champ d’apostolat du P. Maurin est l’enseignement. Il est désigné pour le collège de l’Assomption à Nîmes (Gard) où on lui confie le poste de préfet de discipline. Peu organisateur, n’ayant pas un sens inné de l’ordre, il se montre tatillon et inquiet. Lui-même comprenant ses difficultés demande et obtient son transfert et accueille avec joie sa nomination à Poussan (Hérault) en 1926. Durant près de 40 ans, le P. Maurin se donne à l’œuvre des vocations: Poussan (1926-1933), Vérargues (1933-1941), Chanac (1941-1964). Il y enseigne surtout les mathématiques, les sciences physiques et naturelles, mais aussi l’anglais. Il reprend même quelques années de l’enseignement primaire, comme au temps de sa jeunesse. Il aime s’instruire et prend sur ses nuits pour se renouveler et fàire des lectures. Certes ses notions de psychologie sont un peu anciennes ou réduites, trop rigides et trop sévères, mais le P. Maurin garde un cœur d’or dans la pratique qui bouscule toujours les principes. Infirmier inlassablement dévoué, il a des soins d’une rudesse spartiate et des médications insolites. Sa chambre est celle d’un bricoleur, un véritable bric à brac. L’homme est toujours sociable, dialogue volontiers, discute avec passion, radote aussi avec quelques idées fixes inentamées. Le P. Bouissou, son élève puis son collègue d’enseignement, garde de lui un souvenir émerveillé et décanté, élaguant les petits côtés humains, gardant le vrai, le véridique et le véritable avec cette once d’originalité et de pittoresque qui crée la légende. Religieux d’une simplicité sans failles et d’une droiture sans malice, le P. Maurin reste pour des générations d’alumnistes une référence et un aiguillon. Quand la maison de Chanac (Lozère) se transforme en maison de repos, le P. Maurin reste sur place. Sans changer de chambre, il est le premier occupant de la maison nouvelle formule. C’est un léger accident qui provoque le déclin de sa forte santé. Par un matin verglacé, en se rendant à un hospice qu’il dessert avec dévouement, il glisse, fait une lourde chute à la renverse et la nuque subit un choc violent. Surviennent des troubles cardiaques, sous forme d’arythmie et de spasmes. A partir d’avril 1966, il est contraint à garder la chambre en permanence. Il connaît une forme de déchéance physique qui le fait beaucoup souffrir moralement. Il est découvert mort le 3 juin 1967 par le Frère Jean de Dieu, dans sa chambre et dans la positon où il a été laissé la veille. Le lundi 5 juin, les obsèques sont célébrées par le P. Jean-François Laurent, de passage à Chanac pour affaires. Le corps du P. Maurin repose dans l’ancien cimetière de Chanac, près de l’église.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: B.O.A. janvier 1968, p. 228-229. Paris-Assomption, août 1967 (article du P. Manuel Vandepitte) . Portrait du P. Maurin par le P. Bouissou. Dans les ACR, du P. Maurin Maurin, quelques correspondances (1923-1933).