Odon (Ulysse-Léonce-Aimé) LEROY – 1886-1931

Locarno, 1924.
« Il y a 25 ans! Jésus vous insuffla son esprit sacerdotal, il vous fit
prêtre pour l’éternité. Puis il vous donna votre intention sacerdotale, une
part de la sienne, c’est-à- dire des âmes… Aujourd’hui beaucoup de ces
âmes viendront vous dire leur merci et resserrer le lien qui les rattache à
vous. C’est aujourd’hui le merci triomphal de vos enfants qui sont déjà
1à-haut, merci triste, suppliant et si résigné, mais aussi le merci de tous
ceux qui sont encore ici bas: admultos annos. Que la suave odeur du ciel
descende sur le sacrifice pour lui donner le maximum d’efficacité. Il y a
quelques mois, un de vos enfants, un de ceux que vous aimiez beaucoup, se
préparait à la mort. Quelques jours avant sa mort, il m’avouait qu’il avait
demandé à Dieu de le conduire sans consolation
pendant sa vie, que 1es grâces reçues soient bien cachées, mais que sur la
fin il puisse avoir 1es grâces du grand désir de Le rencontrer pour mourir,
purifié par la souffrance, dans le grand calme et l’acte du pur amour.
Il a été pleinement exaucé. Tout ce qui a été dit, tout cela était vrai
mais faible à côté de la réalité. Je m’arrête et vous redis ‘saint
anniversaire’». Votre enfant reconnaissant.

Religieux de la Province de Paris.

Une vie abrégée.

Ulysse-Léonce-Aimé Leroy naît le 19 février 1886 à Blaringhem (Bord). Il est élève de l’alumnat de grammaire à Sainghin (Nord) d’octobre 1898 à septembre 1902 et de celui d’humanités à Taintegnies en Belgique, se septembre 1902 à mars 1903. Pour des raisons de santé, il doit interrompre le cours de ses études secondaires. Il termine sa scolarité classique au collège de Bailleul en 1908. Il entre au noviciat de Gempe où il prend l’habit le 1er novembre 1908, sous le nom de Frère Odon. Il y prononce ses v?ux annuels, le 1er novembre 1909, suivis de ses v?ux perpétuels l’année suivante, à la même date. Il passe ensuite à la maison d’études de Louvain pour ses études de philosophie et de théologie. Très apprécié du P. Léon Merklen qui doit quitter la direction du scolasticat en 1912, le Frère Odon est ordonné prêtre par le cardinal Mercier le 20 mai 1917, à l’âge de 31 ans accomplis. C’est la période de la première guerre mondiale et la santé du Frère, déjà précaire, est gravement compromise par le régime de privations qu’elle entraîne. On finit par obtenir à grand’peine des autorités militaires allemandes, maîtresses des lieux, que le P. Odon puisse être rapatrié en France. Avant de quitter Louvain, il fait l’effort de mémoriser tous les messages et recommandations des 80 religieux de la communauté qui lui confient intentions ou nouvelles pour la Congrégation, leur famille ou leurs amis: du fait de leur isolement, ils ne peuvent correspondre librement et le messager, ne pouvant emporter aucun papier sans être fouillé, se doit d’emmagasiner dans sa seule mémoire toutes les commissions à transmettre. Avec quatre autres compagnons dans le même état que lui, le P. Odon peut être acheminé, en passant par la Suisse, jusqu’à la station d’eau d’Évian-les-Bains (Savoie),

après un voyage de cinq jours! Il faut encore huit jours de démarches et de tracasseries administratives pour obtenir que les religieux puissent être autorisés à regagner une résidence assomptionniste. Le P. Odon et le Frère Marie-Jean Foket obtiennent enfin, non sans peine, de gagner Menton sur la Côte d’Azur (Alpes-Maritimes), le Frère Nicolas Sparfel parvient au noviciat de Notre-Dame de Lumières (Vaucluse) et les Frères Ange Bugaut et Gobrien Ledem sont dirigés dans leur famille pour y être soignés. En 1918, le P. Odon est envoyé à San Remo en Italie. De là, vers 1923 ou 1924, il est affecté à la communauté de Locarno en Suisse, revient à San Remo lorsque cette résidence est fermée. Il est enfin acheminé en 1927 à Lorgues (Var) qui est sa dernière résidence. Il y meurt de la tuberculose, le 10 juillet 1931, dans sa 46ème année. Il est inhumé au cimetière de Lorgues, le lendemain, 11 juillet.

Souvenirs sur le P. Odon.

« Le P. Odon ne pouvait, à cause de santé précaire, avoir une vie active. Et cependant, désireux de rendre service et de contribuer au bien des âmes, il résult de se consacrer à une vie de prière. Tous ceux qui l’ont connu durant les quinze ans passés successivement à Lumières, San Remo, Locarno et Lorgues, ont pu juger de sa persévérance en cette résolution . On le voyait à la chapelle les trois quarts de la journée, à des heures fixes. Que de grâces n’a-t-il pas obtenues pour notre Congrégation, car elle était le principal but de ses prières et de ses adorations. Le rôle de ce nouveau Moise priant pendant quinze ans n’a pas été soutenu sans opérer chez lui une grande sainteté de vie. Il attirait par son maintien modeste, son humilité, sa discrétion, son esprit surnaturel. Bien des religieux, conquis par ses vertus, lui confiaient la direction de leur âme. Très patient parce que très charitable, il venait au secours des malades démoralisés. Ne l’a-t-on pas vu durant plus de quatre ans passer ses récréations avec l’un d’eux dont la tête demandait secours. Le P. Odon ne peut inscrire à son actif des oeuvres retentissantes, mais je ne crois pas être téméraire en affirmant que par sa vie d’orant il s’est acquis une belle récompense au ciel et mérite notre admiration, pour ne pas dire nos invocations ». (1) (1) D’après le témoignage du P. Paul-François Béthaz, Lettre à la Dispersion, 1931, n° 400, p. 186.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Lettre à la Dispersion 1931, n° 400, p. 185-187; n° 402, p. 208. Echo de Saint-Maur, 1963, p. 16. Lettre du P. Odon Leroy au P. Merklen, Locarno, 16 mars 1924. Carnets du P. Merklen, 1942 (ACR: i 539, p. 88). Dans les ACR, correspondances (1910-1924).