Valens CASTEL – 1893-1918

Les épreuves d’un Maître des novices.

La vie du P. Antoine de Padoue Vidal, né Gabriel le 23 novembre 1877 à
Ganges
(Hérault), est marquée par son expérience de maître des novices de 1907 à
1917, à Gempe et Luxembourg. Religieux très attaché à ses devoirs et
faisant preuve dans la conduite de sa charge d’un esprit très surnaturel,
il se trouve très isolé de la Congrégation, ainsi que les novices, pendant
tout le temps de la guerre, au Luxembourg, pays occupé par les troupes
allemandes. Il a de ce fait d’énormes difficultés pour
faire vivre les siens et il juge expédient de se lancer dans des
entreprises immobilières
(achat de fermes) qui vont grever la Congrégation d’une dette évaluée à
700.000 francs. En 1920, il demande à quitter
sa famille religieuse et il est incardiné définitivement au diocèse d’Alger
en janvier
1921. Il y rend un service très apprécié et s’y trouve encore au moment du
débarquement américain en 1942. Il se retire dans les années 1950 dans le
diocèse de l’Aude, à Castelnaudary, écrivant en
1957 le récit des événements qu’il a vécus de 1907 à 1917, seul responsable
survivant de cette période.

Religieux français.

Un jeune Breton en Belgique et au Luxembourg. Valens est né à Brest le 30 juin 1893 au foyer de Gouiven Castel et de Philomène, née L’Her. Il fait ses études secondaires dans les alumnats de Belgique: Le Bizet et Taintegnies. Il prend l’habit le 14 août 1913 au noviciat de Limperstberg au Luxembourg. Au moment de la guerre mondiale, cette maison se trouve coupée de toute communication avec le reste de la Congrégation, du fait de sa situation géographique derrière les lignes allemandes. L’un des frères de Valens, Francis, est également à cette époque alumniste, mais la guerre le happe tandis que son frère novice, provisoirement exempté du service militaire en raison d’une ancienne fracture au bras, ne peut être mobilisé. A cause des conditions de vie très dures, pénurie alimentaire, surveillance militaire, les frères novices de Limperstberg sont obligés pour survivre d’aller travailler dans des fermes, ce qui interrompt leur parcours de vie religieuse régulière. Le Frère Valens a prononcé ses premiers vœux le 15 juillet 1914, mais n’a pu les renouveler. Malade de l’estomac, le Frère est soigné dans une clinique de Mersch. En mars 1915, déjà souffrant d’un ulcère, il en est guéri comme miraculeusement. Cependant en octobre 1918, il doit de nouveau s’aliter. Il meurt assez rapidement le 10 octobre, prononçant ses vœux perpétuels in articulo mortis. Il n’a que 25 ans accomplis. Le Frère Valens est inhumé le 11 octobre 1918 à Limpersberg.

Situation chaotique du noviciat luxembourgeois.

Ce noviciat de l’Assomption est créé en 1912 pour réserver le couvent de Louvain à la maison d’études aux effectifs pléthoriques et créer les conditions propres d’autonomie et de spécificité à chaque stade de la formation religieuse. Le maître des novices,

le P. Antoine de Padoue Vidal -lequel n’a pas terminé sa vie à l’Assomption- est chargé de cette fondation qui donne d’heureuses espérances jusqu’en août 1914, le Luxembourg étant envahi par les troupes allemandes. On mesure les difficultés de tous ordres vécues par ces jeunes assomptionnistes entre 1914 et 1918, privés de communications, de ressources et de toute possibilité d’une vie régulière. Nous lisons d’une correspondance du P. Antoine de Padoue Vidai, datée du 21 avril 1918 et écrite de Finsterthal, lieu d’implantation d’une des fermes de travail, ce témoignage d’une vie prise dans les affres du quotidien.

« M. le chanoine Wendling [évêché de Strasbourg, intermédiaire entre l’Assomption et la congrégation de religieuses propriétaires des bâtiments m’a adressé une lettre en réponse à celle que vous [P. Ambroise Jacquot, économe générale lui avez écrite. Entre temps des attaques d’aviateurs s’étant produites sur la gare de Luxembourg, le gouvernement s’est préoccupé de trouver des logements pour les personnes habitant la zone dangereuse et nous a demandé notre couvent. Sur ma réponse que nous l’avions rendu à ses propriétaires, M. le chanoine Wendling est venu de Strasbourg pour traiter cette affaire. Si les Sœurs y consentaient, nous consentirions nous- aussi à ce que le gouvernement loue la maison au prix de 12-500frs l’an, du moins pour une année. Le gouvernement se mettrait en relation avec vous pour conclure un sous-bail; en attendant, il agirait avec notre consentement. La visite de la maison a révélé d’importantes réparations à faire lesquelles incombent au propriétaire. Tant que ces réparations ne seront pas faites, la maison ne sera pas habitable. Nous avons reçu seulement ces jours-ci quelques nouvelles de la famille sur la mort et les funérailles du P. Général [E. Bailly, décédé à Paris le 23 novembre 19171. Je n’ai pas exprimé la peine que cette nouvelle nous a causée à tous et à moi en particulier, mais vous pouvez facilement la deviner. C’est seulement ces jours-ci que nous pouvons éprouver un peu de consolation en lisant ces courtes lignes. Depuis bientôt quatre ans nous portons la croix comme vous. Je n’ose pas dire plus lourde parce que la vue de nos propres peines nous ôte souvent le sentiment de celles des autres. En tous cas, nous restons toujours unis de cœur à la Congrégation et attendons le moment où nous pourrons communiquer librement. Nous prions pour le nouveau supérieur général, élu ou à élire, nous ne le savons pas encore. P.S. Nous avons donné hier les derniers sacrements au Frère Fleury qui se meurt de la poitrine. Il a fait ses vœux ïn articulo mortis’. P. Antoine de Padoue.

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Lettre à la Dispersion 1918, n° 538, p. 285. Notice biographique par le P. Marie-Alexis Gaudefroy. Dossier personnel Antoine de Padoue Vidal.