Vital (Joseph-Vital-Henri) MICHEL – 1914-1940

Septembre 1939.
« Je ne sais si ces quelques mots parviendront au destinataire. Je viens me
signaler à la Dispersion avec le secret espoir qu’elle parviendra aux
Assomptionnistes belligérants.
Nous nous apercevons de plus en plus combien il est pénible de rester sans
nouvelles de sa famille. Je me trouve ici avec
le P.JeanMarie Pétex, de la province de Lyon. Tandis qu’il est sur les
positions commandant un groupe de mortiers, moi je suis bien tranquille au
fond d’une cave, avec le bureau de la compagnie. Pour le moment, notre
secteur reste calme, nous nous contentons d’écouter la canonnade qui gronde
à l’horizon. Les troupes qui arrivent de l’intérieur nous devancent. Pour
nous, régiment de forteresse, nous occupons le terrain aux alentours des
fortifications. Nous nous mettrons peut-être en branle prochainement.
L’élément ecclésiastique est bien représenté dans le secteur et nous
pouvons souvent assister à la messe et y puiser la confiance et le courage
si nécessaires à l’heure présente. Il faut vous dire qu’en tous brille
cette flamme qui rend le Français si bon soldat et capable de tous les
sacrifices. Avec cela les Boches n’ont
qu’à bien se tenir, nous leur réservons des surprises ».

Religieux de la Province de Paris.

Une vie entre-deux guerres.

Joseph-Vital-Henri Michel est né le 2 février 1914 à Chaussenilles en Lozère, au diocèse de Mende. Il fait ses études secondaires à l’alumnat Saint-Roch de Poussan (Hérault), de 1927 à 1932. Le 2 octobre 1932, il prend l’habit religieux, sous le nom de Frère Vital, au noviciat des Essarts (Seine-Maritime), que dirige le P. Léonide Guyo. Le 3 octobre 1933, le Frère Vital prononce ses premiers vœux aux Essarts. Son maître des novices, le P. Léonide Goyo, observe que « mon rapport a mis en relief les traits caractéristiques de ce novice. Il avait assez mai commencé son temps de noviciat, mais le Frère Vital s’y est mis au début du Carême. Il comprend maintenant mieux la vie religieuse. Ses aptitudes physiques et morales sont bonnes. Sur le plan intellectuel, on peut dire qu’il a du jugement, qu’il aime l’étude mais que son parcours offre quelques lacunes. Sa nature lymphatique ne le pousse guère à l’ardeur, mais son humeur est très accommodante et le Frère Vital s’est montré docile ». Il accomplit une année d’études complémentaires, suivie de deux années de philosophie à Scy-Chazelles (Moselle), de 1933 à 1936. Entre 1936 et 1938, c’est le temps du service militaire. Profès perpétuel à Lormoy (Essonne), le 1er juin 1939, il ne fait que commencer ses études de théologie (1938-1939) quand il est rappelé par les obligations militaires, suite à la déclaration de guerre de septembre 1939. Sa dernière lettre parvenue à la revue La Lettre à la Dispersion est datée du 12 septembre 1939. L’année suivante le 10 septembre 1940, la revue annonce sans détails que le Frère Vital, du 166ème régiment d’infanterie, est mort au front, tué en un lieu et à une date ignorés. Par la suite, on saura que son décès remonte au 22 juin 1940.

Il s’ajoute à ceux du P. André-Bernard Sublet (13 juin 1940), du P. Marie-Laurent Scheidler (12 juin 1940), du P. Aloys Vankernmel (9 juin 1940), du Frère Alfred jaffry (17 mai 1940), du Frère Dominique Spitzer (?) et du Frère Marie-Vincent Ehrard (?).

Dans le tourbillon de la guerre.

Le P. Gervais Quenard donne quelques lignes de conduite aux religieux que surprend l’invasion allemande sur le front occidental. « En restant en zone occupée après l’armistice, avec deux Assistants, pour de graves raisons que j’ai données alors aux Provinciaux, j’envisageais le cas où il faudrait diviser l’autorité, s’il devenait impossible de communiquer. La présence du P. Félicien Vandenkoornhuyse en zone libre (Lyon) devait le faciliter, mais pour l’octroi de pouvoirs réguliers, il faudrait de plus recourir au St-Siège. Durant le premier mois le contact demeura suffisant pour régler les affaires assez rares qui relèvent du Supérieur général; mais, depuis trois semaines, les relations sont suspendues et nous ignorons ce qui a pu être fait du côté où nous ne sommes pas. Nous essayons donc, non sans peine, d’obtenir du Saint-Siège un arrangement pratique qui permette de suppléer non seulement le Général mais aussi les Provinciaux, dans les territoires où ils ne peuvent exercer leur autorité. Jusque là et tant que les relations se trouvent interrompues, nous ne pouvons que subir les événements, en laissant aux supérieurs de chacune des régions le soin de faire pour le mieux, même avec le risque de garder en suspenses les affaires qu’ils ne peuvent régler directement. Nous avons demandé déjà au Saint-Siège l’autorisation d’ajourner la convocation du chapitre général jusqu’à la conclusion de la paix et en même temps la possibilité de maintenir supérieurs et assistants dans leur charge. Nous attendons réponse. Nous avons pu repérer jusqu’à présent plus de 70 prisonniers et nous essayons de secouer leur détresse; mais nous restons encore sans nouvelles sur le sort de 50 religieux et cet interminable silence inspire les plus vives craintes… Gardons confiance en Dieu: si nous lui sommes fidèles, il nous con tin uera sa protection, même pour le pain quotidien. Je le prie de vous bénir ».

Bibliographies

Bibliographie et documentation: Dans les ACR, du Frère Vital Michel, deux correspondances (1936 et 1939). Lettre du front du Frère Vital Michel, le 12 septembre 1939. Circulaire du P. Gervais Quenard, Paris, le 20 août 1940. [Le lecteur curieux d’actualité pour les faits politico-militaires qui affectent le front européen occidental en 1940 et qui désorganisent les communautés assomptionnistes d’Angleterre, de Belgique et du Nord de la France, peut se reporter aux numéros 827 à 839, de juillet 1940 à mars 1941, de la Lettre à la Dispersion, numéros d’autant plus précieux qu’ils sont rares, peu ou pas distribués en raison du conflit. il se trouvera peut-être un jour un historien de la Congrégation pour faire revivre cette page difficile et douloureuse de la mémoire des familles de l’Assomption]. Cf L’Assomption et ses OEuvres, 1947, n° 468, p. 6-7, L’Assomption durant et après la guerre.