DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 261

16 feb 1869 Arras CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie

Des choses très pauvres mais très saintes – La méthode du P. Halluin – Qui ne l’a pas vu à la chapelle au milieu de ses gamins n’a rien vu – C’est un saint auprès duquel je me sens bien peu de chose – Mais j’espère avec la grâce de Dieu m’y mettre tout de bon.

Informations générales
  • DR07_261
  • 3519
  • DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 261
  • Orig.ms. AC O.A.; Photoc. ACR, AH 409; D'A., T.D. 29, n. 166, pp. 198-199; QUENARD, pp. 115-116.
Informations détaillées
  • 1 ORPHELINS
    1 PAUVRETE
    1 SAINTETE
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 CORRENSON, AUGUSTINE
    2 HALLUIN, HENRI
    2 LACROIX, GEORGES
    2 PICARD, FRANCOIS
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    3 ARRAS
    3 NIMES
  • A LA MERE EMMANUEL-MARIE CORRENSON
  • CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie
  • Arras, le 16 février 1869.
  • 16 feb 1869
  • Arras
La lettre

J’ai le temps de vous écrire, ma bien chère enfant, et je vous écris. Nous sommes arrivés hier, à 11 h. 1/2 du matin; nous repartirons aujourd’hui, à 2 heures. Cette lettre, je l’espère, partira ce soir pour Nîmes; dans 24 heures, elle sera bien près de vous arriver. Je vois ici des choses très pauvres, mais très saintes. Dieu semble permettre que, par nos religieux, un grand bien se fasse, et, je l’espère aussi, quelques bonnes vocations se forment. On ne se doute pas des ressources qu’il y a chez ces trois cents enfants. Leur air de bonheur est réellement merveilleux. Ce que l’on obtient d’eux en portant la joie dans leur âme tient du prodige. Il est vrai que la manière dont le P. Halluin est avec eux sans cesse est bien touchante. Levé à quatre heures, il dit sa messe avant cinq heures, puis il se donne tout entier à ses enfants. Il a plusieurs espèces de jeux à leur disposition, les fait travailler toute la journée, il les laisse s’amuser le soir. Qui ne l’a pas vu à la chapelle, au milieu de ses gamins, n’a rien vu. Nous avions le P. Picard, le P. Hippolyte et moi, toutes les peines du monde à ne pas éclater de rire; et pourtant il en fait d’excellents chrétiens. Au fond, c’est un homme qui sous une certaine apparence de bonhomie est extrêmement intelligent et qui surtout sait parfaitement ce qu’il fait et où il va. Puis, et voilà l’explication de tout, c’est un saint. Je vous avoue que je me suis, ce matin, pris d’une profonde humiliation, voyant tout ce que fait cet homme et que je ne fais pas. Enfin, ma chère enfant, si je me croyais quelque chose, je vois non sans remords qu’il faut en rabattre. Mais j’espère m’y mettre avec la grâce de Dieu, tout de bon(1).

Adieu, ma fille bien aimée. J’ai un immense désir de vous revoir. Ah! si je vous retrouvais une vraie sainte, comme je serais joyeux!

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Mille choses à nos filles, et un bonjour tout particulier à Soeur Jacqueline.1. Dans le chapitre de sa biographie du P. Halluin intitulé "Etait-il un saint?", Mgr Lacroix cite intégralement cette lettre. Le P. d'Alzon n'était pas seul de cette opinion. Le bon peuple d'Arras aussi bien que les évêques successifs étaient du même avis (G.LACROIX, *Le P. Halluin*, 1962, pp.120-126).