DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 388

17 aug 1869 Le Vigan PRESSE_UNION_NATIONALE

A propos des succès de l’Assomption, réflexions sur le baccalauréat.

Informations générales
  • DR07_388
  • 3669
  • DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 388
  • Copie du texte paru dans l'*Union nationale* du 20 août 1869, ACR, AY 152. Cette lettre fut reprise par l'*Univers* du 30 août 1869; D'A., T.D. 40, pp. 420-421.
Informations détaillées
  • 1 BACCALAUREAT
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE
    1 ENSEIGNEMENT OFFICIEL
    1 PROVISEURS
    2 SAMBUCY
    3 FRANCE
    3 NIMES
  • A MONSIEUR LE REDACTEUR DE L'*UNION NATIONALE*
  • PRESSE_UNION_NATIONALE
  • Le Vigan, le 17 août 1869.
  • 17 aug 1869
  • Le Vigan
La lettre

Monsieur le Rédacteur,

Je lis dans l’Union nationale(1) une lettre de M. Sambucy, correspondant de quatre élèves du lycée de Nîmes, où il cherche à diriger contre M. le proviseur du lycée un argument puisé dans les récents succès de l’Assomption.

Je ne doute pas que M. le proviseur réfute les objections soulevées contre son établissement. Ceci ne me regarde pas; mais ce qui me regarde et ce que je n’accepte pas, c’est la position que l’on voudrait faire à une maison qui n’a jamais songé à de mesquines rivalités, que je laisse volontiers à d’autres.

Je ne dirai pas à M. Sambucy, correspondant mécontent de quatre lycéens, qu’on n’avait qu’à les mettre ailleurs. Ce serait de mauvais goût, et je l’excuse d’autant plus volontiers, et surtout les personnes qui l’ont chargé de leurs fils, que je sais à merveille tout ce qu’il y a de faiblesse, pour ne rien dire de plus, chez certains parents, quand il s’agit du choix de l’établissement où leurs enfants seront élevés et où ils attendent le plus de liberté possible.

Je ne justifierai pas, non plus, M. le proviseur du reproche d’avoir mis sur son tableau un nombre plus grand d’élèves reçus bacheliers que n’en fournit la liste des examens des mois de juillet et d’août. Si c’est un crime, l’an prochain nous nous proposons de le commettre. Voici pourquoi. En définitive, ce n’est pas sept bacheliers sur sept candidats que nous avons obtenus, comme le dit gracieusement M. Sambucy; c’est dix sur neuf, un de nos élèves s’étant présenté avec succès aux deux baccalauréats. Nous avons donc dix bacheliers sur neuf aspirants, mais sept seulement avaient subi les épreuves à la distribution des prix. On n’a pu en proclamer que sept; les trois autres seront nécessairement sur la liste de l’année prochaine. Si M. le proviseur [du lycée](2) de Nîmes se trouve pour l’année dernière dans le même cas, de quoi peut se plaindre M. Sambucy?

Mais je vous l’avouerai, ce qui me fait monter la rougeur au front, c’est que le public se préoccupe si exclusivement de succès qui sont après tout la preuve palpable de la faiblesse des études en France. Ce qui m’humilie, c’est l’indulgence à laquelle sont condamnés les examinateurs (et dont je les remercie pourtant), indulgence nécessitée par le déplorable système d’instruction officielle, sous lequel nous sommes forcés de courber la tête. Mais surtout ce qui m’indigne après vingt-cinq ans consacrés à l’éducation des jeunes gens, c’est qu’entre les établissements de l’Etat et les nôtres, on ne voie de terme de comparaison que dans la plus ou moins abondante récolte de bacheliers. Ce serait à désespérer de l’espèce humaine, si l’on pouvait penser que l’élite de ses membres voit tout l’avenir des jeunes générations dans ces bribes de science, dix fois plus vite expulsées de la mémoire qu’elles n’y ont été ingurgitées, et si la vigueur de l’intelligence, les nobles palpitations du coeur, la beauté du caractère reposant sur les saintes habitudes de la vertu et la force des principes n’étaient plus comptées pour rien dans la formation de l’homme.

Veuillez agréer, Monsieur le rédacteur, l’expression de mes respectueux hommages.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Quotidien de Montpellier-Nîmes, fondé en 1868.
2. Ces mots manquent dans notre copie du texte pour l'*Union nationale*, mais figurent dans celui que donne l'*Univers*.