1844-1854

Informations générales
  • TD44.133
  • IGNORANCE DE LA RELIGION [II]
  • Orig.ms. CQ 30 et 31; T.D. 44, pp. 133-135.
Informations détaillées
  • 1 CHRISTIANISME
    1 IGNORANCE
    1 INSTRUCTION RELIGIEUSE
    1 INTELLIGENCE
    1 MORALE
    1 VERITE
  • 1844-1854
La lettre

Un des motifs pour lesquels on ne pratique pas la religion, c’est qu’on ne la connaît pas; et comme on le nie, il faut prouver: 1° qu’on ne connaît pas sa religion; 2° la folie de ceux qui ne cherchent pas à la connaître.

1° On ne connaît pas la religion.

Ce qu’il faut entendre par cette connaissance.

Combien elle est belle, vraie, utile, noble.

Quand l’auriez-vous acquise? Par quel moyen?

Dans quel but? Vous avez intérêt à rester dans l’ignorance et à ne pas soulever le voile d’une vérité qui ferait votre condamnation. Cependant qu’y a-t-il de plus beau que la vérité et qu’est l’homme sans elle? Mais il y a divers ordres de vérités, et ceux [= celles] qui vous initient à vos destinées éternelles sont les plus importantes.

2° Folie de ceux qui ne cherchent pas à connaître la religion.

Votre ignorance est insensée, parce qu’elle viole les lois de la raison; elle est insensée, parce qu’elle vous humilie au rang des brutes dans l’objet où il vous soit [= est] donné de faire le plus noble usage de votre raison; elle est insensée, parce qu’elle compromet vos intérêts les plus graves.

Qu’y a-t-il de plus grand qu’une intelligence qui par la pensée s’unit à l’éternelle vérité? Qu’y a-t-il de plus utile que de connaître la vérité?

Mais on ne veut pas connaître, parce qu’on connaîtrait ses devoirs et qu’on craint de les accomplir.

Toutes les sciences de nos jours cultivées par des efforts presque surhumains font, à ce que l’on dit, des progrès inouïs. Une seule science est en arrière, elle est laissée de côté, c’est la science de la religion. Elle n’a pas besoin, il est vrai, du secours de l’homme pour se développer, c’est l’homme qui a besoin d’elle et il s’éclaire au flambeau de son éternelle lumière pour sonder les questions les plus importantes de son existence. Et voyez cependant la folie: on s’occupe du temps, on ne s’occupe pas de l’éternité. Il y a là quelque chose qui navre profondément. On fait des études profondes pour connaître la nature des substances qui servent à nourrir le corps; qui songe à connaître ce qui constitue la nature de l’âme? On invente de nouvelles machines pour perfectionner les tissus, qui cherche à parer son coeur de l’ornement des vertus? On a trouvé le moyen de devancer l’oiseau dans sa course, on s’occupe peu du chemin qu’il faut suivre pour arriver de la terre au ciel. Préoccupations d’affaires de commerce, d’administration, d’agriculture, on les a toutes; nul n’a la préoccupation de la grande affaire du salut, la préoccupation de l’éternité.

Cependant le temps passe et la mort est là, qu’aurez-vous fait? Mais je ne savais pas ce que j’avais à faire. Et c’était là votre grand tort, c’était de ne pas le savoir, et c’est pour cela même qu’il fallait l’étudier, et c’est pour cela que je viens vous dire que l’on sait tout, excepté sa religion.

Messieurs, une simple réflexion, tout croule autour de nous, tous en conviennent. Ce qui viendra après, nul ne le sait; on sait seulement – les hommes calmes et impartiaux conviennent à l’avouer – que sans morale il est impossible de gouverner le monde. Mais la morale, on ne l’a que par la religion, et la morale a besoin d’une religion qui [ne] change pas; sans quoi elle est aussi chancelle sur sa base. Donc pour que la morale soit immobile, il faut que la religion soit immobile, et c’est pour cela que la religion qui est immuable, comme la vérité dont elle découle, tient en ses mains les destinées des générations futures; et c’est pour cela aussi que je suis dans une profonde douleur, lorsque je songe à tout ce que pourraient faire les catholiques et à tout ce qu’ils ne font pas. Et pourquoi ne le font-ils pas? Parce qu’ils ne connaissent pas leurs devoirs, et parce que l’indifférence où ils sont volontairement plongés les empêche de s’instruire.

Messieurs, votre empressement me prouve que vous n’êtes pas, que vous ne voulez pas être de ce nombre.

Notes et post-scriptum