Aux Oblates de l’Assomption

SEP 1875 Oblates
Informations générales
  • Aux Oblates de l'Assomption
  • Retraite prêchée par le R. Père d'Alzon - 18 septembre 1875
    Septième instruction
  • CM 380, pp. 17-19.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA CROIX
    1 AMOUR DU CHRIST
    1 AMOUR-PROPRE
    1 CHATIMENT
    1 CONVERSION SPIRITUELLE
    1 DESIR DE LA PERFECTION
    1 EFFORT
    1 EPOUSES DU CHRIST
    1 ESPRIT DE PECHE
    1 ESPRIT SURNATUREL A L'ASSOMPTION
    1 FIDELITE A LA GRACE
    1 GENEROSITE
    1 GRACES
    1 HUMILITE
    1 HUMILITE DE JESUS-CHRIST
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 JUIFS
    1 LUTTE CONTRE LE MAL
    1 LUTTE CONTRE LE MONDE
    1 LUTTE CONTRE SATAN
    1 OBEISSANCE DE JESUS-CHRIST
    1 PARDON
    1 PRATIQUE DES CONSEILS EVANGELIQUES
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 RENOUVELLEMENT
    1 RESPECT HUMAIN
    1 SACRILEGE
    1 SCANDALE
    1 SEVERITE
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 SOUMISSION DE L'ESPRIT
    1 SUPERIEURE
    1 TIEDEUR
    1 VERTU D'OBEISSANCE
    1 VIE DE SACRIFICE
    2 JOSUE
    2 LAURENT, CHARLES
    3 JOURDAIN
  • Oblates de l'Assomption
  • Oblates
  • du 18 au 25 septembre 1875
  • SEP 1875
La lettre

Mes chères filles,

Nous allons entrer aujourd’hui dans un ordre de considérations nouvelles. Je suppose que vous êtes toutes converties ou décidées à vous convertir, car celles qui ne le voudraient pas sont des pécheresses que je livre à leurs sens réprouvés. Votre conversion à vous mes filles, consiste dans un renouvellement complet, une vie tout autre que celle que vous avez menée jusqu’à présent. Mais à ce renouvellement il y a un obstacle dont nous avons déjà parlé: c’est le respect humain. Vous vous vantez de votre habileté à découvrir les défauts de vos soeurs; je ne suis pas bête, dites-vous, je ne m’y laisserai pas prendre et vous prétendez encore garder cet esprit de critique dans la crainte qu’on vous blâme à votre tour. Eh bien, souvenez-vous qu’il est bien plus bête encore de vous laisser arrêter par le respect humain dans l’affaire très importante de votre conversion. Croyez-moi, défiez-vous de cette disposition, laissez ces considérations et mettez-vous-y, cela durera ou cela ne durera pas peu importe, pour le moment il faut vous convertir quand même. Eh bien, mes filles, moi je suis convaincu d’une chose, c’est que cela durera. Beaucoup de misères tendent à disparaître et le devoir de votre Mère est de veiller aux progrès que va faire dans le bien votre congrégation. Il y va de son salut et du mien, aussi sommes-nous résolus de vous traiter avec une certaine rigueur et je dis à celles qui sont sincèrement décidées à se convertir, à opérer en elles ce renouvellement, qu’elles trouveront plus que jamais les moyens de le faire.

Pour vous convertir, il faut d’abord détruire le mal qui est en vous; d’ici cinq heures voyez ce que vous avez à détruire. Je ne dis pas que vous arriviez du premier coup, il y a si longtemps que vous êtes des sottes, qu’il n’est point étonnant que vous ne puissiez devenir tout de suite des saintes. A la différence des maladies du corps, pour guérir votre âme vous n’avez qu’à vouloir mais avec un peu d’énergie, avec générosité. Une des pratiques que je me propose de vous donner c’est de vous demander pardon les unes les autres toutes les fois que vous vous serez fait de la peine ou que vous aurez scandalisé vos soeurs par vos mauvais exemples, et cela soit en public soit en particulier, dussiez-vous même voir des sourires, assez mal placés il est vrai, mais qui seront pour vous une humiliation très salutaire. Hier soir, le Père Laurent qui est assez original et amusant parfois me dit: « Mon Père, me permettez-vous de dire une chose? » Après ma réponse affirmative il reprit: « On dit que notre amour-propre ne meurt qu’un quart d’heure après nous, eh bien, mon Père, je vous prie de me faire faire la barbe dans ce quart d’heure afin que si mon amour-propre subsiste encore, j’aie la satisfaction d’avoir la barbe bien faite ». Père Laurent s’amusait un peu aux dépens d’un certain religieux et il n’avait pas tort; mais pour vous, mes filles, tâchez de faire mourir votre amour-propre dès cette vie, je dirai même dès cet instant, c’est pourquoi si vous avez été désagréable à quelque soeur, ne craignez pas de vous mettre à genoux et de lui demander humblement pardon.

Vous devez avoir aussi le sentiment de votre retour à Dieu et celui de la réparation que vous devez même à la communauté pour tout le mal que vous lui avez fait par votre conduite lâche et peu édifiante. Que de pénitences, que d’humilité, que d’actes bons et généreux ne devez-vous pas accomplir pour réparer les scandales donnés et augmenter son trésor de mérites. Votre tâche est rude maintenant car vous avez à acquérir le double de ce que vous avez perdu. Combien de temps vous reste-t-il à vivre? je n’en sais rien, et sans faire de prédiction laissez-moi vous dire qu’il y en aura une parmi vous qui mourra la première, laquelle, je l’ignore, peut-être est-ce celle dont on se doute le moins. Mais qui que ce soit d’entre vous, qu’elle se pénètre toujours pendant cette retraite de la nécessité où elle est de réparer le mal qu’elle a fait et de mettre sérieusement la main à l’oeuvre. Jusqu’où ira-t-elle en fait de sacrifice? ceci n’est pas son affaire. Son devoir est d’abord d’écouter Notre-Seigneur Jésus-Christ et d’obéir ensuite à ses divines exigences.

Ce travail, mes filles, ne se fera pas sans peine. Vous aurez à résister à l’esprit diabolique. Ecoutez l’Apôtre lui-même nous en avertir: Mes frères, soyez sobres et vigilants car le démon comme un lion rugissant tourne sans cesse autour de vous pour vous tendre des pièges et je crois fort que si vous avez chacune votre bon ange à votre côté, vous avez bien aussi chacune un démon pour vous tenter.

Vous avez encore à combattre l’esprit de péché. N’avez-vous pas encore vos défauts, vos découragements, vos mauvaises inclinations car il ne faut pas croire que parce que vous avez dit: je veux me convertir, vous le soyez. Il y a une série d’idées humaines qui vous empêchent de vous renouveler. Vous avez peur en vous convertissant de paraître extraordinaire à vos soeurs, de vous singulariser, vous ne voulez pas être plus religieuse, plus édifiante que les autres. Malheureuse et insensée! si vous avez la peste, pour faire plaisir à vos soeurs, consentiriez-vous à la garder? Pensez que vous êtes obligées de traiter l’affaire de votre salut non pour les autres mais pour vous-même.

Maintenant voyons dans quel esprit il vous faut marcher. D’abord dans un esprit surnaturel. Dans cet instant je vais vous dire la parole la plus grave peut-être de cette retraite. Vous êtes comme les Israélites sur le point de traverser le Jourdain pour entrer dans la terre promise. Votre Mère, nouveau Josué y rentrera la première et vous, vous la suivrez et vous n’agirez plus désormais que par des motifs surnaturels, avec des sentiments nouveaux. Vous laisserez toutes vos idées humaines pour devenir des filles nouvelles, des vierges, des Epouses fidèles et dévouées à Notre-Seigneur. Voyons, sentez-vous au fond de votre coeur quelque chose qui vous dise: Oui, mon Père, cela me va. Il y a des religieuses qui n’ont qu’une application, c’est de faire croire que leur conduite a toujours été admirable. Pour vous, mes filles, avouez franchement, sincèrement vos fautes et prenez la ferme résolution de changer. Allez à Notre-Seigneur et précipitez-vous avec confiance dans l’immense océan de son amour. Prenez votre parti, qu’il n’y ait plus pour vous que deux choses qui vous occupent: Dieu et votre âme, Jésus-Christ et son amour. Vous êtes faibles et avez besoin d’être portées. Faites-vous porter par Jésus-Christ. Il y a différents degrés dans la perfection, c’est pour cela que les anciennes doivent être plus avancées que les plus jeunes et que celles-ci doivent tendre à dépasser les plus anciennes. Sainte émulation qui vous est bien permise, mes filles. Que votre vol dans la perfection devrait être rapide! les aigles vont deux fois plus vite que le chemin de fer, quelle agilité ne devrait pas avoir une religieuse pour s’élever vers Dieu! Il y a plusieurs demeures dans la maison du Père de famille, voulez-vous choisir les plus hautes? Votre titre de religieuses apostoliques vous y donne des droits, vous n’avez qu’à vouloir.

Votre renouvellement consistera donc à ne plus vous laisser conduire que par des sentiments surnaturels. Voulez-vous ne pas vous endormir à votre méditation, demandez à Notre-Seigneur de vivre de cette vie de foi qui pénètre nos pensées et fait découvrir Dieu en tout. Laissez-vous conduire par les sentiments les plus élevés et les plus parfaits. Si vous vous mettez en face de Notre-Seigneur Jésus-Christ crucifié, dites-vous: il faut que j’accepte d’être crucifiée comme lui, de souffrir comme lui, d’être humiliée comme lui, de voir le ciel d’airain au-dessus de ma tête, abandonnée de tous, délaissée. Il faut que j’accepte d’être traitée comme un chiffon, comme un morceau d’étoffe qu’un chien prend, qu’il laisse et qu’il déchire selon son caprice et cela à l’imitation de Notre-Seigneur au Tabernacle où il est pris et laissé, et en réparation des communions impies, lâches, tièdes qui livrent son corps adorable à la profanation et au sacrilège. Veux-je m’y mettre? Quand commencerai-je?

Vient ensuite l’esprit de dépendance. Dans quelle mesure veux-je dépendre de mes supérieurs et de ceux qui m’ont été donnés pour me commander? Vous faites trois voeux, mes filles, les voeux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance mais le plus grand de tous, je puis le dire, c’est celui d’obéissance. Quelle est votre obéissance? Vous avez votre règle, vous avez les ordres de vos supérieurs mais c’est trop assujettissant pour vous, aussi vous en prenez et vous en laissez. Quel va être maintenant votre esprit de dépendance? Voulez-vous imiter Jésus-Christ? Il a été obéissant jusqu’à la mort et à la mort de la croix.

L’esprit d’adoration qui est une dépendance par rapport à Dieu.

L’esprit de renouvellement qui implique l’esprit de sainteté et d’amour. Dieu a dit: soyez saint comme je suis saint; donc votre renouvellement doit tendre à la sainteté et à un immense amour. Si vous n’aimez pas Notre-Seigneur allez trouver votre Mère et dites-lui: je m’en vais et j’engagerai votre Mère à vous laisser partir. Mais si vous l’aimez, acceptez alors tout ce qui pourra vous être demandé, quelque difficile que cela vous paraisse. Je n’en suis pas capable, direz-vous. Par vous-même c’est vrai mais vous pouvez tout en Celui qui vous offre aujourd’hui sa grâce avec tant de libéralité. Si vous vous sentez faites pour cette vie spirituelle entrez-y à pleine voile. Mettez-vous aujourd’hui au pied du Saint-Sacrement, c’est là que vous devez réfléchir avec tout le sérieux dont vous êtes capables et voir ce que vous avez à faire pour mettre une ligne de démarcation entre ce que vous avez été et ce que vous voulez être désormais. Ecoutez Notre-Seigneur, il vous appelle son épouse, sa bien-aimée et vous demande votre amour, voulez-vous le lui refuser? Oh! non, donnez-lui plutôt vie pour vie, amour pour amour.

Notes et post-scriptum