Procès-verbaux du Tiers-Ordre des Hommes

5 may 1851 Nîmes Tertiaires Hommes

Entrons dans l’esprit du mois de Marie par l’humilité, l’obéissance et l’action.

Informations générales
  • Procès-verbaux du Tiers-Ordre des Hommes
  • Cahier des procès-verbaux 1847-1851
    59. Séance du 5 mai 1851
  • CE 1, p.86-89.
Informations détaillées
  • 1 CHARITE ENVERS DIEU
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CONSEIL SUPERIEUR DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
    1 DOUCEUR
    1 EUCHARISTIE
    1 FAUSSE SCIENCE
    1 FOI
    1 HUMILITE
    1 IMITATION DE LA SAINTE VIERGE
    1 INSENSIBILITE
    1 MOIS DE MARIE
    1 ORGUEIL
    1 PRIERE DE DEMANDE
    1 PROGRES DANS LA VIE SPIRITUELLE
    1 PURETE D'INTENTION
    1 PURIFICATIONS SPIRITUELLES
    1 RECHERCHE DE DIEU
    1 SOUMISSION DE L'ESPRIT
    1 TIERS-ORDRE MASCULIN
    1 UNION A JESUS-CHRIST
    1 VERTU D'OBEISSANCE
    1 VIE SPIRITUELLE
    2 DESMET, PIERRE
    2 HENRI, EUGENE-LOUIS
    3 NIMES
    3 PARIS
  • Tertiaires de l'Assomption
  • Tertiaires Hommes
  • 5 mai 1851
  • 5 may 1851
  • Nîmes
  • Collège de l'Assomption
La lettre

Séance du 5 mai 1851

Présidence de M. d’Alzon

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M. d’Alzon invite les tertiaires à entrer dans l’esprit du mois de Marie en se renouvelant dans la piété par l’humilité, l’obéissance et l’amour.

I. L’humilité – Sentir sa petitesse, comprendre son néant, toute sa fragilité; reconnaître qu’il nous faut un appui pour nous soutenir. – Une piété solitaire, isolée, que serait-elle, et qu’est-elle en effet ? un néant elle-même: l’orgueil finit par l’envahir. Ce n’est pas là être chrétien. Non, il faut répéter sans cesse: Deus in adjutorium meum intende(1)! S’appuyer sur Dieu, sur les saints, recourir au ciel. Ces sentiments humbles agrandissent, élèvent: n’est-il pas facile de voir qu’ils nous introduisent dans un monde supérieur ? – Allons à cette piété avec nos coeurs, mettons, pour le moment, notre esprit de côté. L’homme d’études a une tendance naturelle à se croire quelque chose de grand, de fort, parce qu’il a réellement une certaine valeur, une certaine puissance. Prenons garde, penser cela de soi ce n’est rien moins que de l’humilité; et de semblables dispositions n’y préparent pas précisément. – Ainsi laissons notre esprit: apportons dans notre piété nos coeurs et le bon vouloir.

II. L’obéissance – La piété c’est le culte que l’âme rend à Dieu, c’est l’hommage de notre dépendance. Tout ce qui nous entoure peut devenir pour nous, dans l’usage que nous en faisons, un objet de ce culte, nous ramener à Dieu, nous élever à lui. Nos actions alors sont pénétrées d’une onction toute particulière. Elles revêtent comme un caractère symbolique, la pensée de Dieu s’y reflète incessamment. Ah! que de progrès nous ferions dans le bien, si nous nous persuadions fortement que chacune de nos actions peut être un culte, un hommage rendu à Dieu! quelle pureté d’intention n’arriveraient-elles pas à acquérir, et que de mérites les enrichiraient! – L’obéissance se relie d’elle-même à l’humilité. Si j’avoue que je ne suis rien, que je ne puis rien sans Dieu, il me faut, pour m’appuyer sur Dieu, aller chercher cet appui, faire effort vers lui, travailler, produire des actes de vertu, en un mot contracter des devoirs. Dieu ne manque, il faut l’appeler à moi; il est absent, je dois me le rendre présent en m’appliquant à retracer en moi son image: cette image me le rappellera, ainsi qu’un portrait nous remet sous les yeux la personne aimée, nous la rappelle, nous la rend présente, vivante devant nous. Ces efforts, ces engagements, ces devoirs, cette application laborieuse, ce sont des actes d’obéissance. En nous parlant de Dieu toute chose vient nous parler de notre dépendance. Caeli enarrant gloriam Dei.

III. Amour. Amour humble, soumis, affectueux. En un sens la piété forte doit s’exercer à une certaine insensibilité: cette considération peut nous retirer de la désolation que causent souvent les sécheresses intérieures. L’esprit de Dieu couvre habituellement de son ombre cette stérilité, ce vide des coeurs: une création nouvelle s’y prépare, il doit en sortir une piété plus accomplie. C’est un acheminement à la force. – Mais enfin l’amour, la tendresse ramollissent la dureté, détendent la raideur, rompent les glaces spirituelles. Par exemple, rapprochons l’amour protestant ou philosophe de l’amour chrétien: ne sentons-nous pas que le Dieu vivant de l’Eucharistie communique à l’amour catholique plus de vivacité, plus d’énergie, que les enthousiasmes à froid de la secte ou du philosophisme ? Et que dire de la douceur et de la mansuétude de l’amour vraiment chrétien!

Voilà quels doivent être pour un Tertiaire les bénéfices du mois de Marie: humilité, obéissance, amour. – Se remplir de ces sentiments, les posséder, les communiquer à nos enfants, les déverser en eux de la plénitude de nos coeurs; – Devenir pieux par cette tranformation du sentiment, devenir plus intimes, plus délicats; – Entrer avec Marie, dans l’intérieur de Jésus; – Méditer les vertus de Marie. De toutes les crétures elle s’est rapprochée le plus de son divin fils; sur ses traces, nous aussi rapprochons-nous de notre divin maître. En Marie tout s’accomplit par une action silencieuse, omnis gloria ejus ab intus. Elle reproduit en elle l’intérieur de Dieu. Arrivons aussi jusque là par un effort simple de notre intelligence, de notre volonté, de notre coeur. Allons de Marie à Jésus, par Marie approchons-nous de Jésus. Que Marie soit comme la mesure de notre amour pour Jésus. Marie a pris en elle la vie de Jésus, Jésus a pris en lui notre humanité: prendre en nous et les sentiments de Marie, et la vie de Jésus. La foi nous donnera comme un sens nouveau. Le P. Desmet(2) parle d’un lac où il a trouvé des poissons chez lesquels l’organe visuel était atrophié: vivant en dehors de l’action de la lumière, ils ne voyaient plus. Il en est de même d’un bon nombre de chrétiens. Ce sens supérieur de la piété qui développe, qui perfectionne l’action de la grâce, on le laisse s’atrophier en soi parce qu’on n’en use pas. Nous en sommes un peu là. Recouvrons le sens de la vue dans la lumière. Nos habitudes de vie, dans ce monde de l’étude, de la science, de l’érudition, sont des habitudes sèches, froides, on s’y raccornit. Amollissons-nous par une piété et plus affectueuse et plus tendre. Rentrons enfin dans notre intérieur pour y rétablir avec Marie par Jésus le sens de la vie surnaturelle que nous avons perdu, ou que du moins nous laissons se perdre en nous sans y réfléchir.

M. l’Abbé Henri est chargé des Instructions pendant l’absence de M. d’Alzon (3). – La séance est levée.

Notes et post-scriptum
1. Ps 70, 2.
2. Le ms a *Smeth*. Mais de toute évidence il d'agit du P. Pierre Desmet SI.
3. Le 11 mai, le P. d'Alzon quitta Nîmes pour Paris, où il séjourna du 19 mai au 19 juin et où il assista aux réunions du Conseil supérieur de l'Instruction publique.