Article sur la Fête-Dieu : reposoirs.

La religion place à certains intervalles des fêtes destinées, ce semble, à rafraîchir l’esprit de l’homme épuisé par le travail, et à rendre à son cœur la flamme presque éteinte par les angoisses, tristes compagnes de notre infirmité. On dirait que dans notre exil, elle ait voulu rendre plus facile le poids des peines, en nous montrant comme l’ombre des biens de la patrie… Pour atteindre ce but, par quels ingénieux moyens ne cherche-t-elle pas à nous surprendre? A ceux qui saisissent moins la profondeur de ses mystères, à ceux que le sublime spectacle de la société dont elle nous rend tous membres, ne saurait assez émouvoir, elle a encore quelque chose à offrir, elle a les pompes et ses fêtes pour ceux dont il faut frapper le sens avant que de toucher le cœur. Et ces pompes, quand les déploie-t-elle avec plus de majesté qu’au jour de la Fête-Dieu, au jour où tous les chrétiens qui adorent le Sauveur Jésus sous l’apparence d’un pain grossier, redoublent d’ardeur pour donner à la solennité quelque chose de plus magnifique. Qu’elle est touchante en ce jour la somptuosité du pauvre, parant les dehors de sa chaumière pour honorer le passage de son Dieu, et tous les dons qu’il a reçus de Lui! Comme on aime à venir prier en ces reposoirs embellis, non par le luxe, mais par la simplicité des villageois! la tenture n’est pas riche, les ornements n’en sont pas d’une grande valeur, mais cette tenture comme ces ornements, le plus souvent arrachés à l’usage domestique, paraîtront précieux quand on pourra penser qu’ils ont servi à former l’asile sous lequel le Fils de l’homme a trouvé un monument où reposer sa tête!

Article publié dans le Correspondant, juin 1829, d’après T.D. t. VII, p. 203, 204. Cf Lettres, t. A, p. 27.

<br>