Veiller auprès de Dieu, comme une lampe dans la nuit.

En levant les yeux, j’aperçus de la lumière. C’était la fenêtre de la chapelle. Isolée du château, placée sur la droite de la façade, cette chapelle communique au jardin par un monticule que j’ai moi-même fait arranger cet hiver. La fenêtre, au-dessus de la porte, se montrait au milieu des platanes. Je fis quelques pas, m’appuyai contre un de ces arbres, et regardai longtemps cette fenêtre: ĞMon Dieu, je m’en vais bientôt dormir; et vous, mon Dieu, qu’allez-vous faire? Pendant que je dors, vous m’attendez. Encore si j’allais vous voir, quand je veille. Encore si j’allais souvent vous dire que je vous aime. Je vous aime bien, mon Dieu, du moins me le semble-t-il ainsi, mais je vous aime comme ne vous aimant pas; et cependant, pour moi, pour m’attendre, vous allez passer cette nuit, seul, avec cette lampe dont la clarté me fait souvenir que vous êtes mon hôte; et moi, je n’y penserai plus dans quelques moments, et combien de nuits n’y ai-je pas pensé du tout! Pourquoi venez-vous donc? Pourquoi vos délices sont-elles avec les enfants des hommes? Est-ce moi qui contribue à faire vos délices? Mon Dieu, je voudrais passer une nuit seul avec vousğ

Lettre à Luglien de Jouenne d’Esgrigny (Lettres, t. A, p. 221).

Texte tiré d’un cahier de Mémoires d’Emmanuel d’Alzon, à Lavagnac, été 1831.