DERAEDT, Lettres, vol.5 , p. 178

1 nov 1864 Nîmes MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Les funérailles de son père. – Il la remercie de lui proposer le voyage de Malaga, mais il ne croit pas pouvoir s’éloigner. – Il va lui envoyer une lettre du vice-consul de France à Philippopoli. – Propositions concernant les Oblates de l’Assomption. – Si elle ne croit pas pouvoir les accepter, il fera une petite congrégation séparée. – Je crois le temps de nos tribulations amicales à son terme. – Il serait heureux de la voir à Nîmes.

Informations générales
  • DR05_178
  • 2371
  • DERAEDT, Lettres, vol.5 , p. 178
  • Orig.ms. ACR, AD 202; D'A., T.D. 23, n. 811, pp. 142-144.
Informations détaillées
  • 1 AMITIE
    1 APOSTOLAT
    1 APOSTOLAT DE LA CHARITE
    1 ASSISTANCE A LA MESSE
    1 CADRE DE LA VIE RELIGIEUSE
    1 CHAPELLE PUBLIQUE
    1 CIEL
    1 COLLEGES
    1 CONGREGATIONS DE FEMMES DE L'ASSOMPTION
    1 D'ALZON FONDATEUR DES OBLATES
    1 DIPLOMATIE
    1 ECOLES ASSOMPTIONNISTES D'ORIENT
    1 EDIFICE DU CULTE
    1 ENFANTS DE DIEU
    1 ENTERREMENT
    1 ERECTION DE MAISON
    1 FATIGUE
    1 FUNERAILLES
    1 GLOIRE DE DIEU
    1 HABIT RELIGIEUX
    1 JUSTICE DE DIEU
    1 LOISIRS
    1 LUTTE CONTRE LE MONDE
    1 MAISONS DE CAMPAGNE
    1 MISSIONS ETRANGERES
    1 MORT
    1 OBLATES
    1 OFFICE DIVIN
    1 PARENTE
    1 PEUPLE
    1 PRIERES POUR LES DEFUNTS
    1 RECONNAISSANCE
    1 RELATIONS DU PERE D'ALZON AVEC LES ASSOMPTIADES
    1 RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 REPOS
    1 RESIDENCES
    1 SENSIBILITE
    1 SOEURS CONVERSES
    1 TIERS-ORDRE FEMININ
    1 TRANSPORTS
    1 VERTUS
    1 VIE CONTEMPLATIVE
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    1 VOILE
    1 VOYAGES
    2 ALZON, HENRI D'
    2 BAILLY, VINCENT DE PAUL
    2 CHAMPOISEAU, CHARLES
    2 GALABERT, VICTORIN
    2 PAULINE, LAVAGNAC
    2 PICARD, FRANCOIS
    2 ROUSSY, EMMANUEL DE
    3 BULGARIE
    3 ESPAGNE
    3 FRANCE
    3 LAVAGNAC
    3 LORRAINE
    3 MALAGA
    3 NIMES
    3 ORIENT
    3 PARIS
    3 PHILIPPOPOLI
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Nîmes, 1er novembre 1864.
  • 1 nov 1864
  • Nîmes
La lettre

Je suis arrivé hier soir, ma très chère fille, après avoir rendu les derniers devoirs à mon père. Je n’ose pas dire que son enterrement a été un vrai triomphe par le concours énorme de peuple qui l’accompagnait. Dieu l’a récompensé, dès ce monde, de ses vertus; et comme l’une des premières chez lui était la fuite de tout éclat, je me persuade que la récompense de la terre n’aura pas retardé celle du ciel. Priez cependant et faites prier. Qui connaît les abîmes de la justice éternelle?

Vous êtes mille fois trop bonne de me proposer le voyage de Malaga. Je vous avoue que, quand vous me parlâtes la première fois de cette affaire, l’idée me vint de me mettre au lieu et place du P. Picard; mais votre seconde lettre m’est arrivée au moment où se trouvait à Lavagnac M. Emmanuel de Roussy, mon cousin et mon filleul qui vient de passer six ou sept mois en Espagne. Il connaît Malaga et m’a donné de tels détails sur les chemins, sur ce que cette ville a de laid, que je suis tout disposé à y aller comme bonne oeuvre indispensable, mais non pas comme voyage d’agrément et de repos. Merci toutefois de votre proposition, que j’envisage par le délassement que vous avez voulu me procurer.

Puis, il faut bien le dire, je suis nécessaire ici. Voyez la rapidité avec laquelle je suis revenu de Lavagnac, où, en temps ordinaire, j’eusse bien fait de rester quelques jours de plus. Quelque peu sensible que je sois, je suis brisé, et peut-être un motif comme la mort de mon père était suffisant pour me faire rester quelque temps de plus loin d’ici. En conscience, je n’ai pas cru le pouvoir. C’est la même cause, qui, probablement, me tiendra toute l’année éloigné de Paris.

Je vous envoie ou vous enverrai demain une lettre de M. Champoiseau(1), vice-consul de France à Philippopoli. Examinez sa lettre. Quant à moi j’ai pour proposer mon affaire quelques éléments précieux, dont je voudrais profiter. Voici les propositions que je vous fais.

1° Donner aux Oblates de l’Assomption quelque chose de définitif, un peu au-dessous des Soeurs de choeur et au-dessus des Soeurs converses. Ce serait comme les Tertiaires dominicaines, vivant en communauté.

2° Je les prendrais pour les collèges en France(2), pour les écoles du peuple en Bulgarie et en Orient.

3° Leur costume, hors de vos maisons, serait noir comme celui de vos converses, avec le voile de laine ou le voile noir, à votre choix. Pas de manteau, mais votre grand voile noir pour sortir. La distinction me semble assez tranchée et je vois, en même temps, assez de points de contact extérieurs.

4° J’ai tout de suite à ma disposition trois filles, dont deux très capables, Pauline en tête; je lui ai parlé longuement à Lavagnac.

5° Si vous ne croyez pas devoir accepter des Oblates dans ces conditions, veuillez me le dire tout simplement, parce que je ferai alors une petite Congrégation séparée; mais l’exemple des Dominicaines tertiaires me prouve que nous pouvons, il me semble, faire quelque chose d’analogue(3).

Comme vous, je crois le temps de nos tribulations amicales à son terme. Croyez-moi, soyons unis et ne nous défions pas par perplexité, ou fierté, ou tout autre motif. Marchons en confiance comme des enfants de Dieu, qu’il a rapprochés pour en recevoir une gloire commune.

Adieu, ma fille. Je m’arrête un peu vite. Si vous pouviez disposer de quelques jours, à la fin de novembre ou à la fin de décembre, ce serait bien bon, plus tôt si vous pouvez; seulement, prévenez-moi.

Notes et post-scriptum
1. Le 21 octobre, le P. Galabert a envoyé au P. d'Alzon une lettre de M. Champoiseau à faire parvenir aux Dames de l'Assomption. C'est le P. d'Alzon lui-même qui, le 28 septembre, avait suggéré au P. Galabert de faire écrire M. Champoiseau.
2. C'est ce que le P. Bailly souhaitait pour Nîmes (v. *Lettre* 2327, n. 1).
3. Le 3 novembre, Mère M.-Eugénie répondra que de son côté elle désirait beaucoup l'oeuvre des Oblates ou tertiaires. "Je vois beaucoup de bien que nous ne pouvons pas faire et dont elles pourraient s'occuper. Je pense que le côté de vie contemplative à laquelle nous sommes appelées doit nous faire sortir de moins en moins, et qu'elles, au contraire, rempliraient toutes les missions qui demandent une entière liberté de sortir tous les jours au besoin, d'aller à la messe dans les églises publiques, de former de petites communautés de deux ou trois, de s'employer à de bonnes oeuvres diverses et de faire librement leurs affaires et leurs achats au dehors..." Après quelques considérations sur l'habit qui devrait être plus commode que celui des Dames, Mère M.-Eugénie demandait au P. d'Alzon quand il pensait donner un commencement d'existence à sa petite communauté de tertiaires. Si elle le savait, elle tâcherait d'aller à Nîmes vers cette époque. Enfin, elle confiait à son correspondant une idée qui lui était venue: celle "de tâcher cet hiver de me faire donner par une vieille cousine à moi une maison dans un village de Lorraine avec 13 hectares de jardin, pré, etc. où je voudrais voir des tertiaires. C'est un pays où elles trouveraient beaucoup de vocations et où elles pourraient se former à quelques bonnes oeuvres de village en vue des missions. Mais surtout, mon Père, qu'elles n'aient point d'office; c'est ce qui s'opposerait le plus aux oeuvres extérieures."