Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.161

3 dec 1856 La Thuilerie, COMBIE_JULIETTE

La neige qui tombe lui ménage un peu de solitude. -Il croit qu’elle doit se donner aux bonnes oeuvres et vivre comme une personne consacrée. -Bonheur de sa soeur Louise. -Conseils spirituels pour sa vie d’oeuvres en accord avec Mlle de Régis. -Le noviciat va bien; lui, pas trop. -Elle doit conserver sa liberté.

Informations générales
  • T2-161
  • 756
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.161
  • Orig.ms. ACR, AM 153; D'A., T.D. 37, n. 43, p. 123-124.
Informations détaillées
  • 1 AMITIE
    1 APOSTOLAT DE LA CHARITE
    1 BONHEUR
    1 CELIBAT
    1 CHARITE ENVERS DIEU
    1 EPOUSES DU CHRIST
    1 INTEMPERIES
    1 NOVICIAT DES ASSOMPTIONNISTES
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    1 VOIE UNITIVE
    2 ATTENOUX, MESDEMOISELLES
    2 COMBIE, JULIETTE
    2 REGIS, EULALIE DE
    3 AUTEUIL
  • A MADEMOISELLE JULIETTE COMBIE
  • COMBIE_JULIETTE
  • 3 déc[embre 18]56.
  • 3 dec 1856
  • La Thuilerie,
La lettre

Ma chère fille,

Votre lettre m’arrive au milieu d’une belle neige qui entoure la Thuilerie et qui, très probablement, m’empêchera de recevoir quelques visites que j’attendais. Je m’en dédommage avec vous. J’ai déjà parlé de l’oeuvre de Saint- Fr[ançois] de Sales et j’ai tout lieu d’espérer que plusieurs personnes y apporteront leur concours. Samedi, je tâcherai d’avoir la réunion de l’Assomption et les demoiselles Att[enoux] pourront vous porter le montant des souscriptions. Je ferai les commissions pour les draps de lit.

J’ai écrit, le premier, à Soeur M.-Eulalie(1); elle sera, j’espère contente de moi. Mettez beaucoup de votre coeur avec elle et croyez que vous serez dédommagée, car elle aussi en a beaucoup. Quant à vous, mon enfant, si j’avais la conviction morale que le bon Dieu me laissera longtemps sur la terre, je vous dirais: « Restez comme vous êtes et conservez votre liberté ». Avec l’incertitude de ma santé, je ne puis que vous dire: « Consultez votre coeur ». Toutefois, il m’est évident que la vie de vieille tante n’est pas faite pour vous. Peut-être alors, laissant Dieu vous conduire, ferez-vous mieux de vous donner aux bonnes oeuvres et de vivre en religieuse, jusqu’à ce que Dieu vous demande encore.

Je crois que vous ne comprenez pas la position de Louise(2). Elle a sans doute des efforts à faire, mais elle trouve son bonheur dans ses efforts et ses sacrifices. Elle me disait qu’il lui semblait vous aimer beaucoup plus, mais il m’a paru en même temps que Dieu s’était emparé de son être et que, tout en subissant certaines épreuves, elle les acceptait avec bonheur, parce qu’elle avait trouvé son centre.

Pour vous, croyez-moi, conservez le plus possible votre liberté et allez, sans trop de préoccupation, au plus parfait dans chaque action du moment. Pour que vous soyez religieuse, il faudrait vous briser sur bien des points, et vous pouvez vous y exercer avec Soeur M.-Eulalie. En vous ouvrant à elle, comme je vous y engage, vous pourrez vous faire réciproquement beaucoup de bien. C’est pour cela que je crois que vous ferez bien de garder toute votre liberté. Conservez votre calme et devenez en même temps un peu plus épouse de Notre Seigneur. Vous n’aimez pas assez notre bon Maître. Si vous l’aimiez, comme vous le devriez, vous ne feriez de votre [liberté](3) qu’une question d’amour, et alors tout serait bientôt tranché. Car qu’importe où vous seriez, puisque vous aimeriez et vous serviriez en aimant.

Je vais assez bien, mais pas trop bien. Notre petit noviciat prend tournure. Sauf que je fais un peu le paresseux, tout va sur des roulettes pour commencer.

Adieu, ma fille. Je ne puis vous dire combien profondément je vous suis attaché.

E. D’ALZON.

Plus j’y pense, plus je crois que vous devez rester libre de toute entrave de famille. Il me semble que Notre-Seigneur ne permettra pas que je meure, avant de vous avoir trouvé votre place. Vous direz à Soeur M.-Eulalie que je lui ordonne de vous faire beaucoup de bien. Je dirai la messe, pour que Dieu vous fasse connaître à toutes deux la vertu de l’amitié et l’amitié comme vertu, mardi prochain.

E.D'ALZON
Notes et post-scriptum
1. Eulalie de Régis,sous son nom de tertiaire.
2. Louise, sa soeur, en religion Soeur M.-Catherine.
3. Suppléance; le ou les mots manquent dans le ms.