- ES-0622
- MEDITATIONS SUPPLEMENTAIRES
- 3. ORAISON
- Sage, ECRITS SPIRITUELS Sept méditations supplémentaires
- 1 AMOUR-PROPRE
1 APATHIE SPIRITUELLE
1 APOSTOLAT DE LA CHARITE
1 APOSTOLAT DE LA PRIERE
1 DESIR DE LA PERFECTION
1 EPREUVES SPIRITUELLES
1 ESPRIT UNIVERSITAIRE
1 HOMME DE PRIERE
1 INSENSIBILITE
1 ORAISON
1 PRIERE DE DEMANDE
1 PRIERE POUR L'EGLISE
1 REFORME DU COEUR
1 SALUT DES AMES
1 VIE CONTEMPLATIVE
1 VIE DE RECUEILLEMENT
1 ZELE APOSTOLIQUE
2 MARTHE, SAINTE
2 NICODEME
2 SAMARITAINE
[[ Oportet semper orare et non deficere; Il faut toujours prier et ne pas se lasser. ]] (Luc. XVIII, I). — Quelle n’est pas la nécessité de la prière pour le religieux, soit pour lui, soit pour les autres?
1. Nécessité de l’oraison pour le religieux
1° Nécessité de relever ma langueur habituelle. — La nature humaine est ainsi faite que, même avec les meilleures résolutions, elle défaille à chaque instant. C’est la lampe où sans cesse il faut verser de l’huile. Mon âme s’épuise et s’éteint, si un aliment renouvelé chaque jour ne vient l’entretenir. Cet aliment essentiel, c’est la prière. J’en ai, certes, assez fait l’expérience. Que suis-je devenu, si je suis resté un certain temps sans prier?
Il n’était pas nécessaire que ma prière fût émue, pleine de consolation. Après une oraison aride, je sentais, à cause même des efforts que j’y avais faits, une vie nouvelle circuler dans mon âme. 2° Nécessité de prévenir par la prière la sécheresse des études. — On a beau dire, certaines études dessèchent le coeur. On vit par l’intelligence, on vit surtout dans un monde imaginaire, on se plonge dans les sciences exactes ou physiques, on prend les questions religieuses elles-mêmes par un côté de discussion, de controverse, qui presque toujours leur enlève l’onction qui en découlerait sans cela. Il en résulte je ne sais quoi de semblable à une terre balayée par un long vent du Nord. Plus d’humidité dans le sol, plus de sève dans la végétation. Il me faut les eaux rafraîchissantes de la prière pour me donner ce qui me manque par l’effet même des études auxquelles, comme religieux, je suis contraint de me livrer.
3° Nécessité de la prière, même au milieu des bonnes oeuvres.– Les bonnes oeuvres ont leur danger; je suis tenté de les prendre par le côté humain; mon amour-propre s’en nourrit, et les jouissances qu’elles me procurent me fixent à la terre et me distraient de Dieu. Pour parer à un mal si grand, il me faut prier, prier sans cesse. Les bonnes oeuvres troublent, préoccupent, comme elles troublèrent Marthe préparant le festin du Sauveur. Quoi de meilleur que de disposer le repas de Jésus-Christ? Pourtant, l’empressement et le trouble ne furent pas approuvés par le divin Maître. De même pour moi!.
Faut-il négliger les bonnes oeuvres? Non certes, mais il faut les accomplir avec un esprit de prière.
Seigneur, que les bonnes oeuvres ne me soient jamais une dissipation, et que, sous votre regard, j’aille toujours à la vie de recueillement, même au milieu des préoccupations du bien les plus vives.
4° Nécessité de la prière au milieu des affaires. — Le religieux en a quelquefois, et de très absorbantes. Quel refuge contre les exigences de ses devoirs que la prière! Car, après tout, mon Dieu, j’ai beau être pris par des travaux plus ou moins monastiques, mon but est toujours la perfection de mon état et l’union la plus intime avec vous. Qu’est-ce qui me procurera ce bienfait sinon la prière?
Donc, Seigneur, plus je serai languissant, desséché, livré aux études, aux bonnes oeuvres, aux affaires, plus je devrai prier avec ardeur. Il s’agit de mon salut, mon Dieu, et si je ne l’accomplissais pas, à quoi bon tant travailler? à quoi bon m’être fait religieux? Ah! Seigneur, il faut m’approcher de vous, il faut monter à l’autel, y remplir les fonctions de médiateur entre le ciel et la terre. Quel moyen pour moi d’accomplir ce ministère redoutable si je ne prie pas comme vous me le demandez? Je prierai, Seigneur, et ma force pour vous servir se renouvellera dans une oraison fervente et assidue.
II. Nécessité pour le religieux de prier pour les autres
Quand je considère la grandeur du religieux voué au salut des âmes, je suis saisi de stupeur. Dieu lui dit: [[ Va et évangélise]]. Mais auparavant ce religieux a dû entendre la parole divine, il a dû considérer les âmes qui lui sont confiées, l’étendue de son ministère proportionnée aux maux qui s’étendent tous les jours davantage sur la face du monde. Aussi est-il obligé de prier, non seulement pour lui, mais pour les autres, et les caractères de cette prière résultent des divers travaux auxquels il doit se consacrer.
1° Prière pour certaines âmes en particulier. C’est un pécheur endurci dont les jours déclinent, il faut le secouer de sa torpeur. Que faire avec lui si on ne commence pas par la prière? C’est un jeune homme emporté par ses passions; pourtant il a subi certains ébranlements, une voix intérieure avertit qu’on pourrait quelque chose sur lui, mais pour le vaincre l’action humaine seule ne suffira pas, il faut l’action divine de la prière. C’est une âme désespérée, il faut la consoler; mais la terre n’a rien qui puisse guérir son mal, seul le ciel peut envoyer le baume qui cicatrisera ses plaies et endormira ses douleurs, en attendant une guérison plus radicale. C’est un enfant qu’on veut arracher au mal qui l’envahit; ah! que les efforts sont stériles s’ils n’ont pas quelque chose de plus puissant que la parole humaine, si sous cette parole il ne sent pas Dieu même qui lui parle. Pour qu’il subisse cette impression, il importe, avant de l’aborder, d’avoir beaucoup prié pour lui.
Seigneur Jésus, qui sur la terre alliez chercher les âmes une à une, qui attendiez Nicodème pendant la nuit, et la Samaritaine au bord du puits de Jacob, qui entriez dans les maisons de ceux qui vous appelaient et qui avez recommandé aux vôtres de courir après la brebis égarée, donnez-moi la science de prier pour les âmes malades afin de les guérir, pour les mortes afin de les ressusciter, et attachez à ma prière la vertu qu’avait la vôtre afin que je puisse continuer votre oeuvre par les moyens que vous m’avez indiqués!
2° Prière pour les oeuvres générales. — Il en est auxquelles l’obéissance ou la charité m’ordonnent de m’intéresser plus spécialement. Il y a là un bien d’ensemble à faire. Est-ce que je le fais? Certes, il n’est pas étonnant que je succombe à la peine, si je ne prie pas. Mais si je prie, quels obstacles ne renverserai-je pas, grâce à l’énergie que Dieu me communiquera si je le lui demande? La sainteté que j’imprimerai aux oeuvres dont je suis chargé viendra de mon zèle, et mon zèle s’allumera dans ma prière: [[ in meditatione mea exardescet ignis; Tandis que je méditais, un feu s’est embrasé ]]. (Ps. XXXVIII, 4).
Seigneur, donnez-moi d’intercéder efficacement pour les oeuvres dont je suis chargé.
3° Prière pour l’Eglise. — Que je sois dans la solitude, que je sois dans l’action, je dois prendre à coeur ce que Jésus-Christ a le plus aimé ici-bas : son Eglise. Que puis-je faire pour elle? Extérieurement, peut-être rien. Mais pour elle je puis toujours prier. Je prierai donc et je prierai de tout l’amour que je porte à Jésus-Christ. Lors même que ma parole, mon don du gouvernement, mes travaux quels qu’ils soient, seraient utiles à l’Epouse par excellence du Fils de Dieu, il n’en est pas moins vrai qu’ils le seraient bien davantage s’ils étaient animés par une fervente prière.
Seigneur, donnez-moi la prière des hommes apostoliques et faites que dans cette prière, si je ne suis pas assez apôtre, je le devienne un peu plus chaque jour.