CIRCULAIRES – Sage, ECRITS SPIRITUELS

Informations générales
  • ES-0255
  • CIRCULAIRES
  • HUITIEME CIRCULAIRE
  • Sage, ECRITS SPIRITUELS
Informations détaillées
  • 1 TEXTES OFFICIELS DE LA FONDATION DES ASSOMPTIONNISTES
    1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 AMOUR DE JESUS-CHRIST POUR LES HOMMES
    1 ANIMATION PAR LE SUPERIEUR
    1 APOTRES
    1 BON EXEMPLE
    1 CHARITE ENVERS LE PROCHAIN
    1 COMMUNION FREQUENTE
    1 CONCILE DE TRENTE
    1 CONSTITUTIONS DES ASSOMPTIONNISTES
    1 CORDIALITE
    1 CRITERES D'ADMISSION AU NOVICIAT
    1 DESIR DE LA PERFECTION
    1 DESOBEISSANCE
    1 ENFER
    1 ESPRIT DE L'ASSOMPTION
    1 ESPRIT SURNATUREL A L'ASSOMPTION
    1 EXAMINATEURS DES CANDIDATS ASSOMPTIONNISTES
    1 EXAMINATEURS DES RAPPORTS
    1 EXPULSION
    1 EXTENSION DU REGNE DE JESUS-CHRIST
    1 FIDELITE A L'ESPRIT DE LA REGLE
    1 FOI BASE DE L'OBEISSANCE
    1 FORMATION A LA VIE RELIGIEUSE
    1 FORMATION DE JESUS CHRIST DANS L'AME
    1 FORMATION DES JEUNES AUX VERTUS
    1 FORMATION DES NOVICES
    1 FORMATION DES POSTULANTS
    1 FORMES MONASTIQUES DES ASSOMPTIONNISTES
    1 FRANCHISE
    1 HYPOCRISIE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 JESUS-CHRIST DOCTEUR
    1 JESUS-CHRIST MODELE
    1 JEUNES RELIGIEUX
    1 LUTTE CONTRE LE PECHE
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 MAITRE DES NOVICES ASSOMPTIONNISTE
    1 MATIERES DE L'ENSEIGNEMENT ECCLESIASTIQUE
    1 NATURALISME
    1 NOTRE RAISON D'ETRE
    1 NOVICES ASSOMPTIONNISTES
    1 NOVICIAT DES ASSOMPTIONNISTES
    1 OUBLI DE SOI
    1 POSTULANTS ASSOMPTIONNISTES
    1 PRATIQUE DE LA PAUVRETE
    1 PROLETARIAT
    1 PROPRETE
    1 PROVIDENCE
    1 PRUDENCE
    1 PSYCHOLOGIE
    1 RAPPORT TRIMESTRIEL
    1 RAPPORTS SUR LES NOVICES
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 REFORME DU CARACTERE
    1 REGULARITE
    1 RELIGIEUX ANCIENS
    1 RESCRIT SUR LE NOVICIAT DES ASSOMPTIONNISTES
    1 RESPECT
    1 RESPONSABILITE
    1 SAINTE COMMUNION
    1 SCANDALE
    1 SUPERIEUR GENERAL DES ASSOMPTIONNISTES
    1 SUPERIEURS ASSOMPTIONNISTES
    1 SURVEILLANCE PAR LE SUPERIEUR
    1 TRAVAIL DE L'ETUDE
    1 TRIPLE AMOUR
    1 VERTU DE PAUVRETE
    1 VERTUS RELIGIEUSES
    1 VIE DE PRIERE
    1 VIE DE SILENCE
    1 VIE RELIGIEUSE
    1 VIGILANCE
    1 VOCATION SACERDOTALE
    2 PICARD, FRANCOIS
    3 PARIS
    3 VIGAN, LE
  • Nîmes, 8 novembre 1874.
La lettre

Mes très chers Frères,

J’aborde une des plus graves questions que nous puissions traiter, la plus grave peut-être, puisque toute la ferveur, la vie même de notre famille en dépend. Je veux vous entretenir du noviciat. Je partagerai ce que je vous en soumettrai en quatre points principaux. Je parlerai:

1° Du noviciat en général.

2° Du Maître des novices.

3° Des novices.

4° De la formation des âmes au noviciat.

1. — Du noviciat

Le noviciat doit être désormais le nid de la Congrégation; tous les religieux doivent y revenir avec bonheur comme au lieu de leur formation religieuse. Ils doivent en rechercher la prospérité, soit en se préoccupant de préparer des sujets, soit en ménageant d’indispensables ressources.

Veuillez examiner s’il est préférable d’avoir des noviciats fondés, ou de s’en remettre à la Providence. Si les noviciats ne sont pas fondés, les propriétés foncières deviennent inutiles.

C’est une grave question de savoir s’il est bon de multiplier les noviciats. Peut-être est-il préférable de n’en avoir qu’un, au moins dans les commencements. C’est le meilleur moyen d’entretenir l’esprit d’unité, que produiront moins facilement des noviciats multipliés. Le seul avantage de plusieurs noviciats est de pouvoir faire passer un sujet de l’un dans l’autre pour l’essayer de nouveau : mais l’expérience prouve qu’un sujet qui échoue ici réussit peu ailleurs (1).

Les anciens religieux surtout doivent avoir une tendresse particulière pour les noviciats. Sans ce mêler à l’intimité du gouvernement, ils doivent prendre à coeur tout ce qui peut y supprimer les abus naissants, y développer la ferveur et l’esprit de la Congrégation. Mais, pour éviter des propos inutiles, ils doivent se contenter de transmettre au Supérieur général ce qu’ils savent (2). Celui-ci, vérification faite, usera de ces confidences avec la prudence convenable en temps opportun. Il est fort à désirer que le noviciat soit à la portée des visites fréquentes du Supérieur général, afin qu’il puisse se rendre compte par lui-même de ce qui peut être fait pour le plus grand bien, soit des novices qui l’habitent, soit de la Congrégation à laquelle de jeunes religieux fervents et intelligents sont si nécessaires.

Le temps du noviciat doit être employé à la plus sérieuse formation de la vie religieuse. Aussi, dès qu’on pourra y passer les deux ans fixés par les Constitutions, il sera très important de les imposer aux novices.

Le noviciat doit être un lieu où se pratiquent avec scrupule :

1° Le silence et le recueillement. Sans l’habitude du silence, il n’y aura jamais de vie intérieure, ni cette vie séparée du monde indispensable au religieux dont la conversation doit être dans le ciel.

2° La prière. On donnera aux novices d’autres occupations, mais l’occupation la plus importante des novices est d’apprendre à prier, afin de pouvoir trouver dans l’oraison les lumières et les forces dont ils auront plus tard, comme religieux, un si grand besoin dans les conjonctures difficiles de la vie apostolique à laquelle ils sont destinés.

3° L’obéissance. Plus la Congrégation se développera, plus le lien de l’obéissance sera nécessaire. Ce que l’on fait en ce moment par affection pour les Supérieurs devra se faire surtout par un esprit de foi, base de la véritable obéissance, et par un sentiment de charité surnaturelle quelquefois dépouillé de toute douceur. Au sortir du noviciat, les jeunes religieux devront avoir une volonté tellement pétrie, qu’ils ne tiennent qu’à une chose: faire la volonté de Dieu, manifestée par leurs Supérieurs.

4° La pauvreté la plus absolue, selon l’esprit de la règle.

5° La réforme du caractère. C’est là, sans doute, le travail de toute la vie. Il est pourtant assuré que, si cette réformation est poussée vigoureusement pendant le noviciat, les efforts seront ensuite bien plus aisés à traduire dans tous les détails de la vie.

6° Les habitudes religieuses. Chaque Ordre, chaque Congrégation a les siennes. Nous commençons à avoir les nôtres, mais qu’elles ont besoin d’être modifiées, améliorées! Il sera indispensable de préparer des règlements particuliers que ma lettre ne comporte pas, mais dont je tiens à constater la nécessité

7° La vie de sacrifice et d’absolu renoncement à l’amour-propre. Ce qui doit nous être odieux avant tout, c’est l’esprit personnel. Qu’on s’efforce de le découvrir, de le poursuivre et de le briser par l’humilité; sinon, que les sujets soient impitoyablement renvoyés du noviciat, après en avoir référé au Supérieur général.

8° La cordiale affection des novices entre eux et le respect des anciens. Nous devons beaucoup nous aimer et beaucoup nous respecter. Tel est l’esprit que Notre-Seigneur suggérait à ses apôtres par ses recommandations les plus pressantes.

9° Enfin, l’apprentissage de toute perfection, selon l’esprit de l’Assomption. Ce dernier mot dit tout. Il n’en est pas moins vrai que nous avons notre raison d’être, et qu’il serait très dangereux de ne pas se laisser former selon les principes qui ont présidé à la naissance de notre famille. Il importe de ne pas permettre que, sous certains prétextes, on sorte des principes caractéristiques et sans l’application desquels nous ne sommes rien comme Congrégation.

II. — Du Maître des novices

Le Maître des novices est, pour le noviciat, le bras droit du Supérieur général, la responsabilité du noviciat reposant sur celui-ci, puisque c’est à lui à décider s’il agrée les postulants ou les novices, même après que les deux Commissions exigées par le Saint-Siège auront donné leur vote (3).

Aussi le Maître des novices doit-il lui rendre un compte scrupuleux de tout détail propre à lui faire connaître les sujets.

La responsabilité du Maître des novices consiste :

1° A faire des rapports fréquents et détaillés sur le noviciat et les novices, selon ce qui sera dit plus tard.

2° A former à la plus haute perfection possible les jeunes gens qui lui seront confiés.

3° A mettre la sincérité la plus intelligente dans les motifs d’admission qu’il présentera au Supérieur général pour être transmis aux Commissions des votes à l’entrée et à la sortie du noviciat.

Le Maître des novices doit être la règle vivante du noviciat, et pourtant il doit comprendre que les jeunes gens, ayant chacun son caractère, ne doivent pas se mouler d’une manière absolument servile sur le sien, mais bien plutôt sur Notre-Seigneur Jésus-Christ, dont il doit être la copie la plus ressemblante, permettant aux autres d’en imiter des traits différents, toujours dans la direction générale de l’esprit de la Congrégation.

Il adressera tous les trimestres au Supérieur général un rapport sur l’ensemble du noviciat, et un rapport sur chaque novice, selon un cadre qui sera rédigé plus tard. En attendant, comme direction dans ce travail, il peut prendre les trois points principaux indiqués à l’article sur le noviciat en général, et ceux que l’on indiquera tout à l’heure.

Les rapports pour les commissaires seront détaillés et accompagnés des pièces exigées. Le Maître des novices interrogera très consciencieusement le jeune homme qui se présente selon les questions fixées par les Constitutions; il préviendra les commissaires si les conditions sont ou ne sont pas remplies, et dira celles qui ne le sont pas.

Si quelque fait grave se produit, il en avertira qui de droit. Toutefois, à moins d’un scandale imminent, il ne renverra point du noviciat sans prévenir le Supérieur général. Il peut, sous sa responsabilité, remercier les postulants non encore admis au noviciat. Quant aux novices qui voudraient se retirer, c’est à sa prudence de voir s’ils sont réellement impropres à la vie religieuse, ou s’ils sont seulement victimes d’une tentation passagère. Il agira en conséquence, soit en ouvrant la porte, soit en retenant le plus possible avec affection.

Sauf de rares exceptions, il présidera aux exercices, toujours au Chapitre des coulpes, presque toujours aux récréations. Ses instructions seront fréquentes, ses avis multipliés, soit sur les manquements à la Règle, aux Constitutions, aux prescriptions particulières, soit sur les vertus, l’esprit, la tenue d’un bon religieux, soit sur la ferveur et la sainteté qui doivent pénétrer l’ensemble de la vie et les moindres actions d’un homme appelé à la perfection.

Il s’efforcera de gagner le coeur de ses novices, non par une affection amollissante, mais par une charité surabondante, puisée comme à la source dans l’amour de Notre-Seigneur pour les âmes et en particulier pour ses disciples.

Il vivra avant tout de la vie surnaturelle, et n’agira que d’après les pensées et les motifs inspirés par la foi. Son modèle, en un mot, sera Jésus-Christ vivant au milieu de ses apôtres et les formant à la vie évangélique.

Il aura autant que possible les aides nécessaires, selon le nombre des novices.

Question : Convient-il que, dans un noviciat nombreux, il y ait, en dehors du Maître des novices, un Supérieur qui serait plus spécialement chargé des choses extérieures (4)?

III. — Des novices

Nous sommes tous intéressés à chercher et à préparer des héritiers spirituels de notre oeuvre. Quelques fondateurs d’Ordres ou de Congrégations préféraient attendre ceux que la Providence leur enverrait. Pour nous, nous nous rappellerons que le Concile de Trente a enjoint aux évêques de préparer les vocations ecclésiastiques, leur a indiqué les règles générales pour atteindre ce but, et que Notre-Seigneur a appelé ses premiers apôtres et leur a dit : Non vos me elegistis, sed ego elegi vos. En présence de ces deux grandes autorités, un Concile général et la conduite de Notre-Seigneur, nous nous efforcerons de comprendre avec quel zèle et quelle prudence on doit chercher, préparer, choisir définitivement les vocations religieuses. On les cherche hors du noviciat, on les prépare pendant le noviciat, on les choisit au terme du noviciat. L’on peut affirmer que la préparation des vocations, soit dans les collèges, soit dans les Alumnats, soit par la direction des jeunes gens dans le monde, est une oeuvre excellente; seulement, il faut s’appliquer à faire de bons choix, et l’on ne saurait apporter à ce travail trop de vigilance, de circonspection et d’esprit de foi.

Les Constitutions ont déjà indiqué les conditions fondamentales requises du jeune homme qui se présente au noviciat. Mais je ne crains pas d’insister ici sur quelques points essentiels:

1° L’esprit surnaturel, ou du moins des dispositions à l’acquérir. Plus que jamais nous avons à lutter contre le naturalisme. Si nous ne nous appliquons pas à former des hommes capables de combattre pour les idées surnaturelles, nous pouvons nous déclarer par avance vaincus, puisque nous renonçons à notre raison d’être.

2° La sincérité. On ne saurait trop déplorer l’absence de sincérité chez quelques aspirants à la vie religieuse. Pourquoi nous viennent-ils? Est-ce une forme d’avenir qu’ils n’ont pas suffisamment analysée? Ils y trouvent des avantages dont ils comptent jouir, sans accepter certaines dures conditions qu’ils voudraient pouvoir repousser. De là ces combinaisons intimes et très humaines qu’ils se persuadent avoir cachées parce qu’ils se sont tus, mais qu’un oeil expérimenté a bien vite découvertes, et pour lesquelles il faut être impitoyable, parce que du manque de sincérité à l’hypocrisie il n’y a qu’un pas.

3° Le don de soi. Il n’est pas nécessaire que, dès le premier jour, ce don de soi-même soit complet. Mais le postulant qu’on voit calculer, combiner, essayer de poser des conditions, demander des exceptions et des exemptions inutiles, est un sujet peu enviable, et, si au bout de très peu de temps, deux ou trois mois au plus, il ne commence pas à faire bon marché de tout: retranchements, sacrifices, humiliations, froissements de la part des Supérieurs et des compagnons de noviciat, il doit être irrémissiblement remercié. Ou il ne comprendra jamais la vie religieuse, et il est incapable; ou il n’aura pas le courage de faire, et c’est un ouvrier trop paresseux, trop lâche pour nous: le mieux est de s’en débarrasser au plus tôt.

4° Je ne reviens pas sur les examens de capacité à faire subir avant le noviciat. Seulement, établissons bien que les jeunes gens élevés hors de chez nous doivent avoir désormais pour entrer au noviciat l’intelligence et l’instruction de nos rhétoriciens a une transition à ménager, mais il est à souhaiter qu’elle soit très rapide, et que, à cet égard, les exceptions soient promptement supprimés.

5° Qu’il soit entendu que le Maître des novices surveillera avec le plus grand soin la tournure d’esprit des postulants et des novices, à la récréation, partout où ils peuvent parler, pour découvrir les esprits faux, bizarres, indisciplinables, disputeurs, taciturnes, entêtés; il faut les écarter comme de vrais démolisseurs des Congrégations.

6° Il exigera par-dessus tout l’acceptation humble, cordiale des reproches, la souplesse sous la direction imprimée, la confiance envers les Supérieurs, l’affection joyeuse envers les Frères, l’estime de leur vocation, le désir d’en acquérir l’esprit au plus haut degré par l’amour de Notre-Seigneur, de la Sainte Vierge et de l’Eglise.

IV. — De la formation des âmes

Saint Paul disait: Imitatores mei estote, sicut et ego Christi. Telle doit être la devise du Maître des novices, travaillant à pétrir des religieux. Quelle vigilance persévérante ne doit-il pas exercer sur lui-même, sa vie étant le livre vivant que les novices auront sans cesse sous les yeux!

La formation des âmes au noviciat implique :

1° La pratique exacte, intelligente, aimée de la Règle. Pratique exacte, sans quoi pas de vie religieuse; pratique intelligente, qui se puise dans l’esprit de foi, et sans laquelle la Règle n’est plus qu’un exercice machinal, au lieu de porter lumière et force dans les moments d’épreuve; pratique aimée: si l’on n’aime pas l’état religieux, pourquoi l’embrasser? C’est se précipiter de gaîté de coeur dans l’enfer, et s’exposer à y entraîner par le scandale des âmes appelées à la couronne de la sainteté.

2° La lutte contre les défauts. Nous en portons tous le germe, mais l’étude de nous-mêmes, la vigilance, la prière, la pénitence, l’humilité surtout, sont d’importants moyens de les diminuer, sinon de les extirper complètement. Le Maître des novices, obligé de connaître les âmes confiées à ses soins, doit faire un travail particulier sur chacune d’elles, se servir des conseils donnés par les maîtres de la vie spirituelle, les aider dans leurs luttes intérieures, les soutenir quand le danger est grand, les relever de leurs chutes, en examiner les causes pour attaquer le mal à sa racine, et les soutenir principalement par la confiance en la bonté de Dieu.

3° Le désir toujours plus ardent de la perfection. La devise du novice doit être : Caritas Christi urget nos. Jésus-Christ est son modèle, et Jésus-Christ est son amour. Le noviciat est un temps de transformation, et le novice ne doit avoir qu’un désir, se transformer en Jésus-Christ: Mihi vivere Christus est, doit-il répéter avec l’Apôtre. Ah! qu’un maître des novices doit être parfait lui-même pour allumer ces flammes, les conserver et les augmenter sans cesse! Qui n’a pas le désir de la perfection ne sera jamais un vrai religieux; c’est au Maître des novices à faire croître ce désir par tous les pieux moyens mis à sa disposition, soit par ses instructions spéciales, soit par un mot dit en passant, soit par une émulation légitime établie entre les membres du noviciat, soit par des pratiques plus difficiles, non à imposer mais à proposer avec prudence. L’important est d’inspirer l’entrain, l’ardeur, la vie, sans quoi tout se dessèche, se glace, s’endort et finit par mourir.

De tous les moyens de ferveur, le plus puissant est incontestablement la communion; mais je ne fais qu’indiquer cette question importante, que j’ai traitée ailleurs, (5) je me borne à réveiller l’attention du Maître des novices sur la préparation de ses élèves à la communion, sur les fruits qu’ils en retirent, et sur les permissions plus rares ou plus fréquentes qu’il peut accorder.

4° La conviction profonde que, dans le temps présent, en face des classes ouvrières, du prolétariat, du paupérisme, rien n’est plus puissant pour un religieux que l’imitation de Notre-Seigneur n’ayant pas où reposer sa tête, c’est-à-dire que la pratique de la pauvreté.

5° Une très grande ouverture de coeur. Les novices y seront exercés. Les y pousser comme malgré eux aurait de graves inconvénients; mais s’ils n’ont pas de facilité à s’ouvrir, s’ils ne l’acquièrent pas promptement, ils n’auront jamais l’esprit de la vie commune; ils conserveront leur esprit propre, source plus tard de bien des misères, et surtout d’une funeste indépendance de caractère. Que l’on brise les natures susceptibles, ou que l’on s’en débarrasse.

6° Les études. Les études proprement dites ne sont pas le but du noviciat. Cependant, puisque les novices doivent être instruits sur l’Ecriture Sainte, l’histoire ecclésiastique, la théologie mystique, les cérémonies sacrées, leur maître doit profiter de ces divers travaux pour leur donner: 1° la plus haute idée du culte divin, de la récitation de l’office, de l’observation des rubriques, de l’application au chant sacré, toujours selon l’esprit de l’Assomption; 2° le désir de connaître ce qui leur convient des règles de la vie ascétique, afin de faire dans cette vie des progrès plus fructueux; 3° quant à l’Ecriture Sainte et à l’histoire de l’Eglise, il doit leur apprendre à étudier en vrais religieux, avec l’esprit non de vaine curiosité, ou sous le poids d’une coupable paresse, mais avec le désir de mieux connaître Dieu et ses oeuvres, Jésus-Christ, son amour pour les hommes, ce qu’il a fait pour le leur prouver, son action sur le monde; de connaître aussi ce qu’un religieux peut faire pour Dieu et Notre-Seigneur Jésus-Christ.

7° La surveillance du Maître des novices. Elle s’exercera à la chapelle, où la tenue des novices manifestera leurs dispositions intérieures; à l’étude, où leur posture révèlera leur paresse ou leur ardeur au travail; dans les cellules, au dortoir, où l’on peut juger de leur modestie, quelquefois de leurs moeurs; au réfectoire, où seront données de fréquentes leçons de savoir vivre; à la récréation, où les lois de la bienséance, trop souvent oubliées, seront enseignées et maintenues.

8° La formation à la propreté, à la politesse. Point capital, pour des hommes qui peut-être n’en ont pas toujours eu l’habitude. Que les novices soient exercés à des formes modestes et polies à la fois; qu’on leur fasse bien comprendre que les manières rudes et grossières sont plutôt le propre d’un caractère indompté, sans culture, beaucoup trop satisfait de lui-même pour faire jamais du bien aux autres. Que Jésus, doux et humble de coeur, soit le type des religieux aspirant à la conquête des âmes. Rien ne donne la politesse chrétienne comme la douceur et l’humilité.

Du reste, la politesse est une forme du respect, et le respect tend trop à disparaître pour qu’on ne le retrouve pas, dans ce qu’il a de chrétien, chez les religieux de l’Assomption. Que le Maître des novices s’applique à en donner la notion et en inspirer la pratique sérieuse pendant le noviciat. Les formes de respect sont pénibles quelquefois, il est dur de s’y courber; que les novices s’y accoutument et en fassent une mortification, une édification, un moyen d’attirer les âmes et une arme de propagande. L’ignorance des formes de la politesse ne doit pas être confondue avec un certain esprit d’impolitesse qui dénote presque toujours des penchants grossiers, la complaisance dans les jouissances vulgaires, une sotte vanité et une impossibilité de se faire tout à tous, grand obstacle à pouvoir gagner les âmes à Jésus-Christ.

Que de choses à ajouter! Mais il faut se borner. L’expérience indiquera sans doute bien d’autres avis importants. Il me semble toutefois que, à l’aide des notions émises, on peut donner un développement complet au Directoire du noviciat. Que ceci suffise donc pour le moment, et que, en partant de ce que je viens d’établir, les noviciats prennent un élan nouveau et une ferveur nouvelle.

Pour tracer une marche d’ensemble au Maître des novices, j’ajoute ici quatre tableaux à remplir selon les circonstances. Le premier l’aidera dans les questions à faire, les avis à donner, quand il fait la direction particulière des sujets. Ici, tout est facultatif; il peut retrancher ou ajouter, mais il lui est bon d’avoir des jalons pour arriver à la connaissance des âmes et procurer leur perfection. Le second tableau a pour but de fixer les articles que le Maître des novices doit traiter dans son rapport trimestriel sur l’ensemble du noviciat. Le troisième indique les points à signaler dans le rapport trimestriel sur chaque novice ou postulant. Le quatrième est le cadre du rapport à faire aux examinateurs sur chaque aspirant au noviciat ou à la profession.

Si le Maître des novices se préoccupe constamment d’acquérir les lumières nécessaires sur les questions renfermées dans ces tableaux, il est impossible qu’il ne finisse pas par connaître parfaitement les sujets confiés à sa sollicitude, et ne les fasse pas connaître, comme il importe tant, à qui de droit.

Veuillez croire, mes très chers Frères, à ma plus respectueuse affection en Notre-Seigneur.

I. — Direction des novices

QUESTIONS

1 ° Le novice se sent-il toujours la vocation religieuse? 2° Quelles sont ses tentations à cet égard?

3° Comment fait-il oraison? Observe-t-il la présence de Dieu?

4° Son attrait à l’oraison? Sujet qui lui fait le plus de bien?

5° Quelle est sa ferveur à l’office et aux exercices religieux?

6° Quels sont ses sentiments envers Notre-Seigneur, surtout à la Communion?

7° Quelle est l’énergie de son travail, en étude ou ailleurs?

8° Quel est son silence et son recueillement?

9° Quelle est son observation de la règle?

10° Quelles sont ses amitiés et ses antipathies?

11° Son esprit de propriété?

12° Ses mortifications?

13° Ses répugnances?

14° L’attrait de son zèle?

AVIS SUR

1° L’obéissance.

2° La paresse au travail.

3° L’amour-propre, l’égoïsme, la personnalité.

4° L’humilité.

5° Le zèle des âmes.

6° Les défauts du caractère.

7° Les manquements à la règle.

8° Les fautes dans les relations.

9° Les formes religieuses, la tenue, la politesse.

10° La tiédeur.

11° Le défaut de sincérité.

12° Les progrès ou la décadence.

13° Quelque fait grave, s’il s’en est présenté.

II. — Rapport trimestriel sur l’ensemble du noviciat

1 ° Quel est l’esprit général?

2° Le niveau de la ferveur s’élève-t-il?

3° Quelle est la tenue à l’office, à l’oraison, à la Messe?

4° Quelle est l’ardeur à l’étude et à l’accomplissement des emplois?

5° Comment se passent les récréations?

6° Le silence est-il observé?

7° Quel est l’ensemble de la tenue et de la politesse?

8° Les novices sont-ils énergiques devant un devoir pénible?

9° Sont-ils ouverts avec leur Maître?

10° Sont-ils sincères?

11° Y a-t-il parmi eux des tripotages? Les aiment-ils?

12° Les humiliations sont-elles acceptées, et comment?

13° Demande-t-on des pénitences et des austérités?

14° Les novices ont-ils de la cordialité entre eux?

15° Ont-ils l’obéissance prompte?

16° La Règle est-elle observée par force ou avec joie?

17° Le noviciat respire-t-il de l’entrain? Y sent-on de la vie surnaturelle et religieuse ?

Observations particulières

III. — Rapport trimestriel sur chaque novice

1° Quels sont les motifs de la vocation du postulant ou novice?

2° Quel est son caractère?

3° Son défaut dominant? Le combat-il? Avec quel succès?

4° Son intelligence?

5° Son instruction ?

6° Ses progrès dans l’étude?

7° Sa santé?

8° Sa position de famille ?

9° Ses progrès dans les trois vertus relatives au voeux?

10° Sa piété, sa ferveur ou sa tiédeur?

11° Sa pratique de la Règle?

12° Ses formes religieuses?

13° Sa tenue aux exercices?

14° Sa politesse?

15° Son genre aux récréations?

16° Ses amitiés et ses antipathies?

17° Son esprit de foi?

18° Est-il édifiant?

19° Est-il humble, mortifié?

20° Est-il ouvert et sincère?

Observations particulières

Nota. — Le Maître des novices n’a pas besoin de répondre chaque trimestre à chaque question: S’il n’est pas suffisamment éclairé, il ne met rien. S’il n’a pas de nouvelles observations à faire, il se contente d’écrire: comme au rapport précédent.

IV. — Rapport aux examinateurs

1° Le postulant ou le novice a-t-il été interrogé scrupuleusement sur les points fixés par les Constitutions?

2° Quelles réponses a-t-il faites?

3° A-t-il fourni les pièces exigées?

4° Quel temps de postulat a-t-il fait?

5° Quel temps de noviciat et où?

6° Quels sont les motifs de sa vocation?

7° Peut-on dire qu’il a l’esprit religieux?

8° Quelle est sa santé?

9° Quel caractère a-t-il?

10° Quel est son défaut dominant? Le dompte-t-il?

11° Pratique-t-il exactement la Règle?

12° Quel est son attrait spécial?

13° Quelle est son intelligence?

14° Quelles études a-t-il faites?

15° Quels sont les résultats de ses études depuis son entrée?

16° Est-il fait pour la vie de Communauté?

17° Est-il généreux pour les sacrifices?

18° A-t-il les principes de la Congrégation?

19° Quelle est sa tenue aux exercices?

20° Son éducation, sa politesse dans les relations?

21° Aime-t-il la Congrégation? S’y fait-il aimer?

22° Comment pratique-t-il les vertus relatives aux voeux?

23° Fait-il facilement ses rendements de compte?

24° Que penser de sa sincérité ?

Observations particulières

E. d'ALZON.
Notes et post-scriptum
(1) <>
(2) A la même réunion on a rappelé le principe de la rigoureuse séparation des novices : les profès n'ont pas le droit d'aller au noviciat sans une permission spéciale: <>.
(3)Voir Collectanea (MCMXX)p.6: Rescriptum de Constitutione Novitiatus (11 decembris 1857).
(4) Le Père d'Alzon va demander au P. Picard à l'occasion de ces réunions d'assumer la charge de Maître des novices. Un tel choix souligne l'importance que le P. d'Alzon attachait à cette charge. Du fait de cette nomination le noviciat va se transférer du Vigan à Paris.(5) Voir les méditations sur Notre-Seigneur à l'Eucharistie, pour le temps de la Fête-Dieu (Note du P. d'Alzon).