LETTRES AU MAITRE DES NOVICES – Sage, ECRITS SPIRITUELS

Informations générales
  • ES-0150
  • LETTRES AU MAITRE DES NOVICES
  • Des principes de la Congrégation
    PREMIERE LETTRE - De l'avènement du royaume de Dieu en nous
  • Sage, ECRITS SPIRITUELS
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 ACTION DU CHRIST DANS L'AME
    1 ADVENIAT REGNUM TUUM
    1 AMOUR DE DIEU POUR SA CREATURE
    1 ASCESE
    1 BIEN SUPREME
    1 BUT DE LA VIE
    1 BUT DES AUGUSTINS DE L'ASSOMPTION
    1 DESIR DE LA PERFECTION
    1 DIEU CENTRE DE LA VIE SPIRITUELLE
    1 DROITS DE DIEU
    1 EPREUVES SPIRITUELLES
    1 GENEROSITE
    1 GRACES
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 LACHETE
    1 LIBERTE
    1 LUTTE CONTRE LE MONDE
    1 LUTTE CONTRE LE PECHE
    1 MAITRE DES NOVICES ASSOMPTIONNISTE
    1 PECHE
    1 PROGRES DANS LA VIE SPIRITUELLE
    1 PRUDENCE
    1 PURIFICATIONS SPIRITUELLES
    1 RECONNAISSANCE
    1 REGNE
    1 SACRIFICE DE LA CROIX
    1 SAINTS DESIRS
    1 SATAN
    1 SENTIMENT DES DROITS DE DIEU
    1 SOUMISSION SPIRITUELLE A JESUS-CHRIST
    1 SOUVERAINETE DIVINE
    1 TRAVAIL
    1 VERTU D'OBEISSANCE
    1 VERTU DE FORCE
    1 VIE CONTEMPLATIVE
    1 VOCATION
    1 VOIE UNITIVE
    1 ZELE POUR LE ROYAUME
    2 FRANCOIS D'ASSISE, SAINT
La lettre

Mes très chers Frères,

Les principes de notre Congrégation se trouvent, à proprement parler, dans notre devise : Adveniat regnum tuum. Cette parole de l’Oraison dominicale renferme toute perfection pour nous, la vie apostolique et le zèle dans nos rapports avec le prochain.

Je veux m’arrêter aujourd’hui à ce qui concerne notre propre sanctification.

I

[[ Regnum Dei intra vos est, nous dit l’Apôtre : le royaume de Dieu est au dedans de vous-mêmes. ]] Il n’est pas nécessaire d’aller le chercher ailleurs. Quel est donc ce royaume de Dieu? C’est l’état de relations intimes où nous devons arriver, selon ce que Dieu est et selon ce que nous sommes. Mais Dieu, infiniment parfait, est immuable. Ce n’est pas de son côté que peut avoir lieu le changement, c’est du nôtre, en ce sens que nous dépouillant tous les jours de nos défauts, de nos habitudes coupables, nous nous rendions moins indignes de ces communications ineffables que Dieu ne dédaigne pas de faire par sa grâce aux âmes qui, dans la sincérité et la générosité de l’effort, s’appliquent à lui donner une puissance absolue sur elles-mêmes.

A mesure que l’âme se purifie par la destruction des taches qu’elle aperçoit, Jésus-Christ, la véritable lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde, lui manifeste d’une manière plus admirable et les perfections de Dieu, et ce qu’elle lui doit, et lui donne en même temps une énergie plus grande pour accomplir ses devoirs mieux connus. L’âme connaissant mieux ce qu’il lui est ici-bas donné de savoir de Dieu, de ses perfections, désire connaître toujours davantage, s’embrase d’un amour plus grand, proclame avec plus de bonheur ses droits, et s’abandonne plus entièrement à son empire souverain.

Ce travail se fait d’une manière plus ou moins rapide, selon la générosité de l’âme et sa promptitude à répondre à l’appel, son ardeur pour obéir à tout ce qui lui est commandé, son courage à surmonter les épreuves qui lui sont imposées; mais si elle avance, si, pour se rapprocher de Dieu, elle se sépare des créatures et d’elle-même, elle sent Dieu s’approcher, s’unir à elle d’une manière ineffable, et c’est alors qu’est consommé, autant qu’il peut l’être ici-bas, le royaume de Dieu au plus secret de son coeur et comme dans les profondeurs de son être. Alors elle dit comme saint François d’Assise : [[ Mon Dieu, qui m’êtes toutes choses. Deus meus et omnia. ]] Mais pour arriver là, il faut beaucoup lutter, beaucoup souffrir. On avance lentement, on croit quelquefois ne pas avancer du tout, Dieu semble se retirer, Satan pousse au découragement, les résolutions prises avec les ardeurs de l’esprit ne sont pas toujours tenues par la faiblesse de la chair. Telle est la cause de tant de chutes plus ou moins graves, qui arrêtent dans les âmes les plus prévenues par la souveraine Bonté l’accroissement intérieur du royaume de Dieu.

Aussi, mes très chers Frères, je ne saurais trop vous recommander de réfléchir sérieusement avant de mettre la main à l’oeuvre. Si vous vous sentez appelés à la perfection, n’hésitez pas. Mais souvenez-vous qu’une fois la main mise à la charrue, vous ne devrez plus regarder en arrière. Une fois enrôlés dans l’armée de Jésus-Christ, fuir serait pour vous un opprobre éternel. Tous ne sont pas appelés à la même perfection, et je ne prétends pas que le royaume de Dieu impose à tous les mêmes obligations. Il y a plusieurs demeures dans la maison du Père céleste, mais le religieux qui, par la sainteté de son état, est appelé à pénétrer dans les appartements secrets du grand Roi, doit sans cesse se rappeler que, tant qu’il n’est pas arrivé au sommet de la perfection, il n’a rien fait; et qu’il peut y atteindre, puisque cette perfection n’est autre que l’imitation parfaite des vertus dont Notre-Seigneur nous a donné le modèle pendant sa vie sur la terre?

II

Le royaume de Dieu en nous est donc là dépendance la plus absolue de tout notre être, de toutes nos facultés à l’action intime de Dieu. Dieu est le maître, nous sommes les sujets: Ego autem servus tuus et filius ancillae tuæ. Si Dieu est notre roi, et s’il a le droit de nous commander selon l’étendue de sa puissance, de son intelligence et de son amour pour nous, nous sommes tenus de lui obéir selon toute l’étendue de notre reconnaissance pour ses bienfaits, de l’intelligence que nous avons de ses droits et de ses dons, et selon toute la puissance d’agir qu’il nous a départie. Que nous reste-t-il qui ne lui appartienne pas? Qu’avons-nous que nous ne devions lui consacrer très librement et très volontairement, car de tous ses dons, le don le plus précieux peut-être est la liberté, et, comme il a droit à ce qu’il y a de plus excellent en nous, c’est par notre liberté surtout que nous pouvons l’honorer le plus. Mystère admirable, où Dieu nous rend toujours plus libre, à mesure que nous le faisons régner plus parfaitement sur nous, et où la perfection de notre obéissance est le principe de la perfection même de notre liberté.

Cherchons donc, mes très chers Frères, ce royaume de Dieu, proclamons-le avec toute la plénitude et de notre liberté et de notre amour, car Dieu ne veut pas régner sur des esclaves, mais sur des âmes libres, sur des fils qu’il puisse aimer d’une tendresse paternelle et qu’il puisse, dans son royaume, faire asseoir sur son trône pour régner avec lui.

Créatures de Dieu tirées du néant par sa toute-puissance et sa miséricorde infinie tout en nous, jusqu’au moindre atome de notre corps, à la plus insaisissable de nos pensées, au plus délicat des sentiments de notre coeur, lui appartient d’une manière absolue, souveraine; chrétiens rachetés du sang de son Fils, il a droit à toute la reconnaissance dont nous sommes capables, à l’accomplissement le plus dévoué de la loi qu’il nous a révélée; religieux appelés à la perfection évangélique, nous ne devons pas seulement exécuter ses ordres, nous devons aller comme au devant de ses désirs; enfin, appelés à la gloire d’une union incompréhensible sans terme, c’est par la dépendance, l’adoration, l’amour, que toute notre vie doit être transformée ici-bas, pour mériter de partager son royaume et sa gloire pendant l’éternité.

Un but pareil est admirable, mais que d’efforts, de luttes, de combats pour l’atteindre! C’est précisément l’épreuve de toute notre vie, et c’est pourquoi ce nous est une obligation de travailler sans relâche, et de ne pas perdre un moment.

Notes et post-scriptum