Périer-Muzet, Lettres, Tome XIV, p. 516.

7 jun 1849 Nîmes MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Rien ne peut me faire douter de votre amitié – *Quaerite primum regnum Dei* – Sr M.-Vincent – M. Pernet a produit un excellent effet – Je compte arriver vers le 20 – Jeunes gens à attirer à l’oeuvre pour remplacer éventuellement des professeurs qui ne donnent pas satisfaction.

Informations générales
  • PM_XIV_516
  • 0+622 a|DCXXII a
  • Périer-Muzet, Lettres, Tome XIV, p. 516.
  • Orig.ms. ACR, AD 653; D'A., T.D. 20, pp. 96-97.
Informations détaillées
  • 1 AMITIE
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 MAITRES
    1 RECHERCHE DE DIEU
    2 CARBONNEL, MARIE-VINCENT
    2 CUSSE, RENE
    2 HENNINGSEN, MARIE-GERTRUDE DE
    2 MICHEL, ERNEST
    2 PERNET, ETIENNE
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Nîmes, le 7 juin 1849.
  • 7 jun 1849
  • Nîmes
  • Institution de l'Assomption
La lettre

Je reçois votre lettre, ma chère fille, et moi aussi je veux vous dire quelques mots. Vous êtes beaucoup trop bonne de vous troubler pour la peine que vous me causez, car, après tout, celle que vous me faites peut m’être bonne; et puis, à présent, [elle] n’est pas aussi grande qu’autrefois. Voici la raison. Toutes vos révoltes, toutes vos impressions pénibles, toute votre indépendance ne m’empêchent pas de croire, autant qu’on puisse croire à quelque chose sur la terre, à votre bonne amitié; comme aussi je ne vois encore rien, dans tout ce que vous pouvez me dire, qui diminue ce que je veux être pour vous. Ce qui peut être un peu souffrant, vexant dans nos rapports, est pour moi comme le sel qui empêche la corruption. Ces diverses impressions, de votre part, nous empêchent de donner dans le fade. Je vous le répète, au point de vue de l’amitié, je ne m’en inquiète plus; c’est chose chez vous et chez moi trop fortement établie pour qu’il y ait à s’en tourmenter. Qu’est-ce donc que vous éprouvez ? C’est une de ces misères que Dieu permet pour empêcher de trouver trop de joie dans les choses créées et maintenir au coeur la liberté nécessaire pour s’élancer plus aisément vers lui. On oublie trop facilement que Dieu est l’unique but et que tout le reste n’est que moyen. Si vous aviez l’âme un peu plus unie à Dieu, le calme s’y ferait bien vite. Or au terme de votre retraite, il me semble bien important que vous recherchiez Dieu avant tout et par-dessus tout; le reste viendra par surcroît. Quaerite primum regnum Dei. En prenant les choses ainsi, il est facile de se calmer, et c’est la meilleure manière que j’ai trouvée, pour pouvoir laisser passer vos orages sans trouble pour moi, tout en sympathisant avec tout mon coeur aux souffrances qu’ils vous coûtent.

10 juin.

J’ai été dérangé. Depuis quarante-huit heures, je n’ai pas eu un moment à moi. Je n’ai pas vu Soeur Marie-Vincent; elle m’ a pourtant fait dire qu’elle viendrait me voir. Le bruit du délai de son départ se répand et produit le plus mauvais effet. On condamne ses soeurs, mais on la blâme de sa faiblesse. J’ai cru bien faire de lui envoyer la lettre de Soeur Marie-Gertrude, qui vous témoigne le désir de retourner à Paris précisément pour partager vos dangers. C’est, en effet, ce qui me semble le fait d’une bonne religieuse.

Je suis très satisfait de M. Pernet : il a produit un effet excellent sur plusieurs de nos jeunes maîtres. Tous les sept sont extrêmement contents de lui, je vous remercie de l’avoir envoyé; je remarque chez lui de l’ouverture, de la franchise, de la bonne volonté, un esprit sérieux, clair, peu d’imagination. Je ne crois pas que la portée de son esprit soit bien étendue, mais il me produit l’effet d’un homme solide.

Je pense toujours partir de demain en huit; j’arriverai le 20, je repartirai le 2 juillet. Que vous seriez bonne, si d’ici là, vous pouviez prendre quelques informations par M. Michel sur des jeunes gens que nous pourrions attirer à l’oeuvre ! Quoique je n’aie pas un besoin absolu de sujets, je ne serais pas fâché cependant qu’on pût prouver à nos jeunes professeurs qu’il est possible et facile de se passer d’eux. Rien ne me paraît important, comme de persuader à ces jeunes imberbes leur peu d’importance, d’autant que quelques-uns se laissent [aller], depuis quelque temps, à un esprit qui ne me convient en aucune façon. Il me faudrait surtout un professeur de mathématiques pour remplacer M. Cusse qui tous les jours s’éloigne un peu plus de notre esprit.

Je ferme ma lettre. Impossible d’aller plus loin; seulement voyez une note à la quatrième page. J’ai la mort dans l’âme : on me donne la certitude que l’un des maîtres, que j’estimais le plus, est un voleur. Priez pour ce malheureux.

Adieu. Tout vôtre en Notre-Seigneur.

Notes et post-scriptum