DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.101

2 jun 1859 Nîmes MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

La nomination de Soeur M.-Walburge à la tête du pensionnat de Paris. – Il est au mieux avec Soeur M.-Augustine, mais cette dernière souffre à l’idée que vous pourriez lui avoir retiré votre affection. – Soeur M.-Geneviève. – La dot de Mlle Varin. – Soeur M.-Marguerite. – Un pèlerinage pour les petites filles du prieuré. – Vocations possibles de religieuses.

Informations générales
  • DR03_101
  • 1251
  • DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.101
  • Orig.ms. ACR, AD 1191; D'A., T.D. 22, n. 569, pp. 222-224.
Informations détaillées
  • 1 NOMINATIONS
    1 PELERINAGES
    1 RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    2 ATTENOUX, BERTHE
    2 ATTENOUX, CLAIRE
    2 BEVIER, MARIE-AUGUSTINE
    2 CABRIERES, ANATOLE DE
    2 CHAUVAT, MARIE-GENEVIEVE
    2 FABRE, JOSEPHINE
    2 HOWLY, MARIE-WALBURGE
    2 MAC NAMARA, MARIE-MARGUERITE
    2 RODRIGUEZ, ALPHONSE
    2 TOURNEUR, LOUIS-VICTOR
    2 VARIN D'AINVELLE, J.-B.-FELIX
    2 VARIN D'AINVELLE, JEANNE-EMMANUEL
    2 VARIN D'AINVELLE, MADAME J.-B.-FELIX
    3 PARIS
    3 SEDAN
  • A la Mère Marie-Eugénie de Jésus
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • [Nîmes], Ascension [2 juin 18]59.
  • 2 jun 1859
  • Nîmes
La lettre

Ma bien chère fille,

Soeur M.-Walb[urge] était effrayée de se voir à la tête du pensionnat de Paris. J’ai cru pouvoir, pour la calmer, lui dire la part de travail qu’elle aurait près de vous. Cela m’a paru la remettre. C’est Soeur M.-Aug[ustine] qui lui avait appris, la première, [la] future nomination. Quant à celle-ci, on vous a mal renseignée. Nous sommes au mieux, et pour le moment je l’ai amenée à avouer que vous n’avez aucun tort envers elle, qu’elle a été très injuste envers vous. Mais il y a une blessure de coeur, que j’aurai bien de la peine à guérir, s’il est vrai que vous lui ayez dit que vous ne lui aviez plus demandé son affection, du moment que vous lui aviez retiré la vôtre(1). L’idée que vous lui avez retiré votre affection lui est chose plus affreuse qu’elle ne le dit; mais cela se sent, car j’écarte ce sujet et n’en puis venir à bout. Elle y revient toujours. Elle veut faire son second noviciat, elle m’a demandé d’étudier Rodriguez. Je profite de la neuvaine de l’Ascension pour la tenir un peu ferme, mais on se trompe quand on dit que je ne la vois pas. Je lui ai parlé tous ces jours-ci, et je sortais d’auprès d’elle quand votre lettre m’a été remise.

Vous ai-je dit que je tiens le fin mot de Soeur M.Geneviève(2)? C’est purement physique. Elle perd la tête, et puis la retrouve quand on l’a bien longuement écoutée et qu’on l’a laissée dire des choses peu agréables à entendre. Il est étonnant comme le calme se fait et pour longtemps. C’est purement hystérique, mais je ne la crois pas le moins du monde coupable. La rudoyer lui fait alors un mal infini. Il me semble qu’en acceptant une fois par mois l’ennui d’une confession très détaillée, tout ira bien. En ce moment et depuis quelque temps, elle est à merveille.

Soeur M.-Walb[urge] vous dira tout ce que j’appréhende pour le pensionnat. Madame Varin vous donnera sa fille, au mois de novembre au plus tard. Elle lui donnera presque toute la fortune de son père, mais pour le moment seulement les rentes. C’est de 8.000 à 10.000 francs de pension. Toutefois elle l’engage à faire une ou deux bonnes oeuvres dans le pays. J’avoue que je ne puis l’en détourner. D’autant plus qu’Isaure est très disposée, d’une part à ne rien laisser à sa famille, d’autre part, est effrayée de ce qu’elle entend dire de la rapacité des couvents. Enfin Madame Varin donnera beaucoup, plus qu’elle ne serait obligée de donner d’après les dispositions prises par son mari, lequel lui laissait la jouissance de la moitié de sa fortune personnelle. Il importe qu’Isaure pendant quelque temps ne fasse que toucher ses revenus, parce qu’ils sont placés sur des mines, dont les revenus s’accroissent chaque année d’une façon fabuleuse. Mais enfin ce qu’elle donnera pour commencer sera toujours très beau(3).

On commence à se douter autour d’elle de ce qui se prépare. Son cadeau de cartons d’autel a ouvert les yeux. Madame Varin est toujours admirab1e.

Quant à Soeur M.-Marguerite, je ne sais que dire. Supposez Joséphine avec quelqu’un que vous ne connaîtriez pas. Grâces à Dieu pourtant, vous savez où en sont les choses. Toutefois je pense qu’il faudra un jour lui faire quitter Sedan(4). L’abbé de Cab[rières] est blessé du départ de Soeur M.-Walb[urge], et blessé contre vous. Ne le demandez pas trop à celle-ci.

Pour intéresser les petites filles du prieuré, j’ai eu l’idée d’un pèlerinage. On vous fera la demande de permettre à une religieuse d’y venir, ne vous hâtez pas de dire non(5). Quoique je puisse me passer de la religieuse, à l’époque du départ de Soeur M.-Walb[urge] cette permission pourra faire prendre un autre courant aux idées.

Berthe Atténoux pourrait bien vous venir. Je suppose que Claire(6) se dirigera vers Saint-Vincent de Paul.

Adieu, ma fille. Je vais bien prier le Saint-Esprit pour vous.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Mère M.-Eugénie avouera qu'il lui est impossible de dire si elle a jamais dit cela à Soeur M.-Augustine, tant ses explications dans lesquelles "elle tournait et retournait les choses en tout sens" étaient longues et pénibles. "Ce qu'il y a de sûr, écrit-elle, c'est que ce qu'elle dit là n'a jamais été dans ma pensée, et ce n'est pas du tout l'expression de ce qui s'est passé en moi" (lettre du 26 juin). Dans la même lettre elle dira: "Croyez que je vous suis bien reconnaissante de vous être chargé de cette bonne fille, que toutes les lettres que je reçois me montrent gaie et contente, grâce à sa tendresse pour vous".
2. Religieuse du prieuré de Nîmes.
3. Mère M.-Eugénie se félicite du soutien que la fortune d'Isaure pourra apporter à son oeuvre, mais elle ajoute: "Une des bonnes oeuvres d'Isaure ne pourrait-elle être de faire vivre votre noviciat?" (lettre du 4 juin).
4. Mère M.-Eugénie se demandait si elle ne devait pas retirer définitivement de Sedan Soeur M.-Marguerite qu'elle venait de rappeler à Auteuil et dont elle jugeait excessif l'attachement pour l'abbé Tourneur, curé de Sedan (lettre du 1er juin). Le P. d'Alzon ne sait que lui conseiller, car il ne connaît pas cet abbé. "Que penseriez-vous, lui dit-il, de l'attachement de Joséphine Fabre pour moi si vous ne me connaissiez pas?"
5. "Je serais bien contrariée de la sortie d'une de nos soeurs pour le pèlerinage des petites filles. Cela fera mauvaise impression pour nos autres maisons d'adoration", répondra Mère M.-Eugénie le 4 juin.
6. Claire Atténoux, soeur de Berthe.