DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.125

Mon cher ami,

Il faut envoyer au plus tôt le P. Hippolyte et le Fr. Vincent aux eaux de Cauterets(1). Nous nous saignons pour cela. Voyez avec Mlle Fabre si elle peut vous avancer l’argent nécessaire. J’espère bien le trouver, quand même on n’aurait pas tout ce qu’il faut pour partir, il faudrait qu’ils pussent se mettre en route. Nous nous arrangerions pour leur envoyer des ressources(2). Ainsi, qu’ils partent lundi matin. Quant au jeune de Cabrières, proposez le Fr. Raphaël(3).

Mon voyage s’est exécuté dans les meilleures conditions. Je suis à Clichy, mais je puis être obligé d’aller à Auteuil à chaque instant. Nous commencerons notre retraite le lendemain de l’Assomption(4). J’ai vu M. Chaillot(5); il est parti hier soir.

Adieu et tout vôtre en N.-S.

E.D'ALZON.

1. Depuis quelque temps déjà, la santé du Fr. Vincent Chaine et celle du P. Hippolyte donnaient des inquiétudes. Le P. d'Alzon vient à peine de quitter Nîmes pour Paris qu'il reçoit du P. Galabert communication des résultats de l'examen auquel le Dr Combal de Montpellier les a soumis tous deux. "Cet examen, écrit le P. Galabert, lui-même docteur en médecine et qu'on appelle d'ailleurs familièrement au collège "le docteur", cet examen a confirmé mes soupçons sur l'état du bon P. Hippolyte et mes convictions sur celui du Fr. Vincent": tous deux souffrent des poumons, le second plus gravement que le premier, et le médecin estime indispensable leur envoi aux eaux de Cauterets (lettre du 4 août).
2. A Nîmes on n'a que des dettes mais...: "Les Religieuses de l'Assomption ont prêté 700 francs au P. Hippolyte pour son voyage; elles en auront besoin dans les premiers jours d'octobre. Mlle Fabre lui a fait don de 100 fr. Cette bonne fille n'avait que 400 fr. à sa disposition, elle voulait nous prêter le tout et offrait même de signer quelques billets jusqu'à concurrence de la somme nécessaire. Nous avons cru ne pas devoir accepter une offre si obligeante; mais elle a tenu à nous offrir ces 100 fr. afin de contribuer en quelque sorte à la guérison du P. Hippolyte." (Lettre du P. Galabert du 12 août). Le P. Hippolyte et le Fr. Vincent passèrent quatre semaines à Cauterets, du 11 août au 9 septembre.
3. Le Fr. Vincent aurait dû passer une partie de ses vacances dans la famille de Cabrières.
4. La retraite des religieux de Clichy que le P. d'Alzon va prêcher lui-même.
5. L'abbé Chaillot venait d'assister au Concile provincial d'Angleterre où le cardinal Wiseman l'avait invité pour lui servir de canoniste et de théologien (Galabert à Picard, 22 juillet). De Paris, il se proposait de se rendre à Nîmes, mais il serait arrivé après le départ du P. d'Alzon. Le P. Picard réussit à le retenir (lettre du P. Picard, 31 juillet).