DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.158

16 sep 1859 Lavagnac ESGRIGNY Luglien de Jouenne

Condoléances pour la mort de son petit garçon, René: Dieu vous avait donné un enfant, vous lui avez rendu un ange.

Informations générales
  • DR03_158
  • 1308
  • DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.158
  • Orig.ms. ACR, AO 5; D'A., T.D. 39, n. 106, p. 205.
Informations détaillées
  • 1 DEVOTION A LA SAINTE VIERGE
    1 MORT
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    2 DU LAC, JEAN-MELCHIOR
    2 ESGRIGNY, JEANNE D'
    2 ESGRIGNY, MADAME LUGLIEN D'
    2 ESGRIGNY, RENE D'
    3 GRAU-DU-ROI, LE
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 SETE
  • A Monsieur Luglien de Jouenne d'Esgrigny
  • ESGRIGNY Luglien de Jouenne
  • Lavagnac, 16 sept[embre 18]59.
  • 16 sep 1859
  • Lavagnac
La lettre

Du Lac m’apprend, mon cher ami, que votre sacrifice est consommé(1). Dieu vous a repris ce qu’il vous avait donné pour si peu de temps. Votre silence, à ma dernière visite(2), me disait combien votre coeur était broyé, et je ne savais comment vous dire combien je souffrais avec vous. Au moins pouvez-vous vous reposer sur la pensée que si Dieu vous avait donné un enfant, vous avez fait tout ce qui dépendait de vous et de Madame d’Esgrigny pour lui rendre un ange. Il s’est envolé, à ce que m’écrit du Lac, un samedi, et l’Eglise favorise la croyance de ceux qui pensent que, ce jour-là, la Sainte Vierge obtient encore plus de grâces pour les mourants. Quelque profonde que soit la blessure faite par des coups comme celui qui vient de vous frapper, il me semble qu’il y a pourtant de la consolation à se dire: « Nous avons fait tout ce qui dépendait de nous, pour aider notre enfant à prendre place auprès de Dieu. » Malgré l’horrible brisement de la nature, l’âme s’apaise en regardant l’horizon que lui découvre la foi.

Je prie bien pour vous, mon ami, pour votre femme, pour ma petite Jeanne(3). Je ne sais si je prie pour René. Est-ce qu’il n’est pas déjà au ciel?

Adieu. Après-demain, fête de Notre-Dame des Douleurs, je dirai la messe pour vous tous.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Une lettre du 13 septembre de Melchior Du Lac avait appris au P. d'Alzon la mort "dans de grandes souffrances mais en prédestiné" du jeune René d'Esgrigny.
2. Pendant le séjour du P. d'Alzon à Paris, le mois précédent. Emmanuel d'Alzon, Luglien de Jouenne d'Esgrigny, Melchior Du Lac de Monvert: des liens d'amitié vieux de trente ans (voir *Documentation Biographique*, pp. 40-56) et que le temps n'a pas relâchés. En octobre-novembre 1859, la famille d'Esgrigny fit un séjour à Sète, puis au Grau-du-Roi. Avant de se rendre à Sète, il était prévu que les d'Esgrigny s'arrêteraient 48 heures à Nîmes où ils devaient arriver le 28 septembre. Du Lac, lui, passa trois jours à Nîmes (sans doute les 6, 7 et 8 novembre) et le 9, du Grau où il est allé rejoindre les d'Esgrigny, il tient à dire au P. d'Alzon combien les trois jours de Nîmes lui ont été doux. Quelques jours plus tard, il lui demande de faire parvenir à Mme d'Esgrigny "4 livres et 12 images qui lui manquent pour les enfants des soeurs d'ici", plus une livre de chocolat. "Tout le monde ici, dit-il, vous chérit et votre nom revient souvent dans nos causeries au coin du feu et au bord de la mer" (17 novembre).
3. Filleule du P. d'Alzon.