DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.245

13 jun 1860 Nîmes PUYSEGUR_JEAN

La sagesse de sa lettre le remplit d’aise. – Il vaut mieux servir le pape que l’empereur. – Il le recommandera à Mgr de Mérode et au cardinal d’Andrea.

Informations générales
  • DR03_245
  • 1394
  • DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.245
  • Cop.ms. ACR, AN 140; D'A., T.D. 39, n. 94, pp. 46-47.
Informations détaillées
  • 1 ARMEE PONTIFICALE
    1 MONARCHIE
    1 QUESTION ROMAINE
    1 REPUBLIQUE ADVERSAIRE
    1 SOUVERAIN PROFANE
    2 D'ANDREA, GIROLAMO
    2 LAMORICIERE, LOUIS DE
    2 MERODE, XAVIER DE
    2 MONTALEMBERT, CHARLES DE
    2 NAPOLEON III
    2 PIE IX
    2 PUYSEGUR, ANATOLE DE
    2 PUYSEGUR, JEAN DE
    2 PUYSEGUR, MADAME ANATOLE DE
    2 ROUVIERE, GUSTAVE
    3 MONTPELLIER
    3 PARIS
  • A Monsieur Jean de Puységur
  • PUYSEGUR_JEAN
  • [Nîmes, le 13 juin 1860](1).
  • 13 jun 1860
  • Nîmes
La lettre

Mon cher ami,

Je reçois la visite de ta mère qui m’apporte ta lettre(2); elle m’a paru l’expression de quelqu’un, qui, lorsqu’il le voudra, se tirera parfaitement d’affaire. Tu raisonnes de sang-froid, et, après tout, cela vaut mieux que de l’enthousiasme. Tu sauras bien ce que tu fais. Voici ma pensée. Si les choses doivent durer et si tu ne veux rester que quelques années au service, avec tes principes et ceux de ta famille, il vaut mieux pour toi servir le Pape que l’empereur. Si les choses ne durent pas à Rome, elles ne dureront pas, non plus, en France. Ce sera comme en 48, quand les Suisses catholiques eurent été battus; la révolution fut bien vite à Paris. Te sens-tu disposé à servir la république sociale? Il y aura quelque part un endroit où se grouperont les honnêtes gens et où un officier de troupes pontificales sera toujours honorablement reçu. Si une Restauration a lieu, – car le désordre ne peut pas toujours durer – tu rentreras en France avec une position déjà conquise, sans avoir prêté serment à l’empereur; et si les choses vont de mal en pis, tu seras après tout Gros-Jean comme devant, avec la satisfaction d’avoir combattu pour la bonne cause, là où il était le plus glorieux de la défendre(3).

Voilà ma conviction. Je souhaite qu’elle te soit bonne à prendre un parti, mais quel que soit celui que tu prennes, je peux te dire que je suis très content d’avoir un neveu qui raisonne si bien. Je t’embrasse.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Je te donnerai des lettres pour Mgr de Mérode(4) et pour le cardinal d'Andrea(5); je vais prendre d'autres renseignements.(1) La date est fournie par la mère du jeune Jean de Puységur, qui, au bas de la lettre du P. d'Alzon, ajouta ces quelques mots : "Mon cher enfant, je vais repartir pour Montpellier d'où je t'écrirai demain. Réfléchis sur tout ce que te dit ton oncle. Tiens-toi prêt à partir, si tu veux. Je te donnerai demain des explications. Ta pauvre tante est toujours très malade. Je t'embrasse. M[arie]."
Le jeune homme ne tarda pas à s'engager au service de Pie IX, parmi les zouaves.
2. Jean de Puységur, fils de Jacques-Anatole de Chastenet de Puységur et de Marie-Françoise d'Alzon était né en 1841 et avait été élève du collège de l'Assomption de 1850 à 1859.
3. Au mois d'avril déjà un ancien élève de l'Assomption, Gustave Rouvière, avait interrogé le P. d'Alzon sur la possibilité de se mettre au service du pape. Nous n'avons malheureusement pas la réponse du P. d'Alzon.
4. Mgr Xavier de Mérode (1820-1874). Ancien officier belge devenu prêtre, il se mit au service du pape dont il gagna la confiance et qui le nomma camérier secret. Il réussit à convaincre Pie IX de la nécessité de reconstituer une armée pontificale. Nommé "pro-ministre des armes" en février 1860, il alla chercher en France le général Lamoricière qu'il présenta au pape à la fin de mars 1860. Mgr de Mérode était le beau-frère de Montalembert.
5. Préfet de la Congrégation de l'Index.