DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.265

27 jul 1860 Lavagnac PICARD François aa

Son séjour à Lavagnac et le souvenir de sa soeur lui font du bien. – Il sera à Paris le 7 ou le 8 août. – Peut-être ira-t-il à Ems avec lui. – Clichy ferme. – Nîmes est en suspens. – L’évêque lui offre les missions diocésaines.

Informations générales
  • DR03_265
  • 1416
  • DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.265
  • Orig.ms. ACR, AE 95; D'A., T.D. 25, n. 95, p. 82.
Informations détaillées
  • 1 COLLEGE DE CLICHY
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 EMBARRAS FINANCIERS
    1 RECRUTEMENT SACERDOTAL
    1 SOCIETE DES ACTIONNAIRES
    1 SOUVENIRS
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 ALZON, AUGUSTINE D'
    2 ALZON, MADAME HENRI D'
    2 BATIGNE, JEAN-PIERRE
    2 LAURENT, CHARLES
    2 MILLERET, MARIE-EUGENIE
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    3 CLICHY-LA-GARENNE
    3 EMS
    3 LAVAGNAC
    3 MONTPELLIER
    3 NIMES
    3 PARIS
  • Au Père François Picard
  • PICARD François aa
  • Lavagnac, le 27 juillet 1860.
  • 27 jul 1860
  • Lavagnac
La lettre

Cher enfant,

Je ne suis que depuis deux jours à Lavagnac et déjà je m’en trouve très bien. J’ai surtout besoin de silence. Je le prends tout à mon aise, avec le souvenir de ma soeur qui me suit partout, et, en me faisant pleurer, me fait du bien, car je la crois au ciel et je suis tenté de la prier, au lieu de prier pour elle. Ma mère n’a pu se décider à venir.

Je serai à Paris le 7 au soir ou le 8 au matin. Si je ne suis pas suffisamment remis, j’irai à Ems, où m’envoie Batigue, jusqu’au 5 ou 6 sept[embre]. Si vous avez besoin de plus de temps, précédez-moi; sinon, nous irons ensemble. Vous savez que Clichy se ferme. Je m’applaudis tous les jours de ma décision. Il me semble que j’y avais mis le temps.

Nîmes est en suspens(1). Il serait trop long de vous conter cette histoire. L’évêque m’offre les missions diocésaines. N’en parlez pas trop.

Adieu. Tout vôtre du fond du coeur.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Depuis que le collège de Nîmes a été repris par une société d'actionnaires en 1857, sa situation financière ne s'est guère améliorée. Son recrutement est insuffisant et il continue à laisser des déficits. Du point de vue du P. d'Alzon, il a un défaut beaucoup plus grave encore, celui de ne donner que très peu de vocations sacerdotales ou religieuses. Le collège de Nîmes a-t-il donc un avenir? Depuis un certain temps on se pose la question. Ne vaudrait-il pas mieux l'abandonner et reprendre un autre collège à Paris, quitte à garder une maison de résidence à Nîmes? C'est ce que pense notamment la Mère M.-Eugénie, et le P. Picard partage son avis (voir *Lettres 1374 et 1380*, et notes). Aux mois de juillet et août 1860, la question a pris le devant de la scène, car le moment est venu de décider si le collège rouvrira ses portes à la rentrée scolaire. La décision est entre les mains de la société des actionnaires. Les lettres du P. d'Alzon lui-même contiennent relativement peu de chose concernant cette crise, mais en juillet et août 1860, celles qui lui furent adressées et les lettres de tiers à tiers en sont pleines. Jusqu'à la décision prise par le P. d'Alzon à la fin de juillet de fermer le collège de Clichy, le P. Laurent plaide pour sa continuation. Sur la foi de renseignements optimistes, le P. Picard s'était réjoui un moment à l'idée de "sauver notre berceau". Il a bien vite déchanté et s'est remis à préconiser l'abandon du collège de Nîmes et la venue du P. d'Alzon à Paris. Mère M.-Eugénie abonde dans ce sens, ainsi que des amis de l'Assomption de Paris, qui développent les arguments favorables à cette thèse. A Nîmes, la Commission administrative qui coiffe la société des actionnaires souhaite que le collège continue, et qu'il continue avec le P. d'Alzon et les Assomptionnistes, mais elle voudrait que la congrégation comble le déficit ou même rachète le collège avec l'argent de la vente de Clichy; mais Mère M.-Eugénie, le P. Picard, le P. Hippolyte, économe général, sont hostiles à tout sacrifice financier pour Nîmes de la part de la congrégation. La Commission décidera-t-elle la fermeture du collège ou cherchera-t-elle des fonds pour permettre son fonctionnement pendant un an encore? C'est son comportement qui indiquera les vues de la Providence sur le collège et la congrégation, estime Mère M.-Eugénie. Le P. d'Alzon pense comme elle. Sentimentalement certes, il est attaché à cette oeuvre, dont la reprise en 1843 lui était apparue comme une indication de la Providence pour la fondation de sa congrégation. Tout le poids de l'environnement nîmois le fait pencher dans le même sens. Mais si, par la voix de la Commission, la Providence l'invite à marcher dans une autre direction, il est prêt à obéir. On peut d'ailleurs abandonner le collège et rester à Nîmes. Mgr Plantier (notre lettre) ne vient-il pas de lui offrir les missions diocésaines? Rappelons ici que ni Mère M.-Eugénie, ni le P. Picard n'ont jamais préconisé un retrait complet de Nîmes: dans leur pensée, si l'on entreprenait un nouveau collège à Paris, il fallait garder une maison de résidence à Nîmes. Au moment où se jouait ainsi l'avenir de la congrégation, des préoccupations d'ordre familial assaillaient le P. d'Alzon. A partir de la mi-juin, l'état de santé de sa soeur Augustine s'était rapidement dégradé; jusqu'à sa mort survenue le 15 juillet, il a dû aller et venir sans cesse de Nîmes à Montpellier pour se tenir à son chevet et pour soutenir ses vieux parents. Le contrecoup nerveux s'est fait sentir après le décès de sa soeur, et les médecins lui ont impérativement prescrit du repos. C'est donc indépendamment de sa volonté qu'il s'est souvent trouvé loin de Nîmes, mais c'est volontairement qu'il s'est tenu à l'écart de la Commission, se contentant de dicter au P. Hippolyte quelques brèves considérations à l'intention de cette dernière. Le 6 août, interrompant le repos prescrit, il quittera le Midi pour Paris, afin d'y étudier avec ses religieux et Mère M.-Eugénie d'autres questions de première importance, étroitement liées d'ailleurs à celle du collège de Nîmes: la liquidation de Clichy, le règlement de la situation de la congrégation vis-à-vis de l'archevêché, la possibilité d'acquérir à Paris une maison de résidence ou d'y établir un collège au cas où la société des actionnaires déciderait l'abandon de celui de Nîmes. Mais quand le P. d'Alzon rentra à Nîmes le 24 août, il y avait quatre jours que les actionnaires avaient pris les dispositions nécessaires pour, selon l'expression du P. Hippolyte, "faire marcher la maison pendant un an".