DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.412

5 feb 1861 Nîmes MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

A propos de leurs dernières lettres: tous deux ont pu se tromper, même si tous deux parlent devant Dieu. – « Croyez que pour ne pas être en tout de votre avis, mon coeur n’en est pas moins tout vôtre ». – Thérèse de Rocher va entrer au début du carême. – Il lui en prépare une autre.

Informations générales
  • DR03_412
  • 1563
  • DERAEDT, Lettres, vol. 3, p.412
  • Orig.ms. ACR, AD 1284; D'A., T.D. 23, n. 664, pp. 12-13.
Informations détaillées
  • 1 RELATIONS DU PERE D'ALZON AVEC LES ASSOMPTIADES
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 ROCHER, ADRIEN-MAURICE DE
    2 ROCHER, THERESE-AUGUSTINE DE
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    3 NIMES
  • A la Mère Marie-Eugénie de Jésus
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Nîmes, 5 février 1861.
  • 5 feb 1861
  • Nîmes
La lettre

Ma chère fille,

Vous me dites, dans les quelques mots que le P. Hippolyte m’a remis, de votre part, que je me méprends sur les motifs qui ont dicté votre dernière lettre(1). Hélas! j’ai pu me tromper en vous écrivant en toute simplicité, comme vous avez pu vous tromper en m’écrivant selon votre conscience. Etablissons que nous parlons tous les deux devant Dieu, mais que ni vous ni moi ne sommes infaillibles. Il restera à chacun devant Dieu la responsabilité de ses actes, sans que nous ayons tant à nous faire souffrir. L’auteur de l’Imitation ne dit-il pas que nous croyons souvent avoir des pensées droites, et qui ne sont pourtant pas selon la volonté de Dieu? C’est triste à penser; mais quand on le pense de soi, on se maintient dans la défiance, quand on le pense des autres, on se maintient dans la charité; car alors on peut désirer être d’un avis commun, mais la divergence d’opinion n’enfante rien de pénible que la triste conviction que nous pouvons être tous à côté du vrai.

Ainsi mettez que je puis me tromper, mais que vous pouvez vous tromper aussi; que nous agissons parfaitement en conscience l’un et l’autre. J’avoue qu’avec cela moi je reste parfaitement en paix, sauf le désir d’être de votre avis ou que vous soyez du mien. Seulement dans cette circonstance, tout en me mettant à votre disposition pour ce que vous me demandez, je doute que vous puissiez me faire changer de manière de voir.

Adieu, ma chère fille. Croyez que pour ne pas être en tout de votre avis, mon coeur n’en est pas moins tout vôtre.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Thérèse de Rocher va entrer du consentement de son père au carême. Je vous en prépare une autre dont vous serez bien heureuse, mais je n'ai pas la permission de parler.1. Le 3 février, répondant à la lettre du P. d'Alzon du 1er, Mère Marie- Eugénie avait écrit: "Je reçois votre lettre, je ne puis que vous dire que vous vous méprenez sur les motifs de la mienne. Je l'avais écrite devant Dieu... Je ne puis me repentir de l'avoir fait puisque cela a été exclusivement un acte de conscience et que le coeur ne doit jamais se plaindre de ce qui lui vient de cette source-là. Je retire de tout coeur ce qui a pu vous être *douloureux*, je voudrais ne l'avoir pas rencontré. J'accepte tous les arrangements que vous faites pour nous; l'avenir est assez long encore pour que j'espère pouvoir vous prouver encore que ce n'est pas dans un sentiment d'égoïsme que je les ai fait naître, et que ce n'est pas dans un sentiment de domination que je me suis permis de vous avertir... O mon père, comment se fait-il que des personnes qui se veulent tant de bien puissent se faire du mal."