DERAEDT, Lettres, vol.4 , p. 11

18 jan 1862 Poitiers MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Il arrive de Bordeaux: nouvelles de la communauté des Religieuses de l’Assomption. – Il a vu l’évêque de Poitiers, mais pas M. Gay. – Il est attristé de leurs dernières conversations: « Sommes-nous destinés à nous faire souffrir ainsi l’un l’autre? »

Informations générales
  • DR04_011
  • 1720
  • DERAEDT, Lettres, vol.4 , p. 11
  • Orig.ms. ACR, AD 1297; D'A., T.D. 23, n. 697, pp. 44-45.
Informations détaillées
  • 1 CRITIQUES
    1 VIE RELIGIEUSE
    1 VIE SPIRITUELLE
    2 FRANCOIS DE SALES, SAINT
    2 GAY, CHARLES-LOUIS
    2 GIBERTON, MARIE-MARTHE
    2 GOUY, MARIE DE JESUS DE
    2 HAY, MARIE-BERNARD
    2 HILAIRE, SAINT
    2 PEROUSE, JEANNE-MARIE
    2 PIE, LOUIS
    2 PIERRE, SAINT
    2 VAILHE, SIMEON
    3 BORDEAUX
    3 LYON
    3 MANS, LE
    3 NIMES
    3 POITIERS
    3 TOULOUSE
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Poitiers, le 18 janvier 1862.
  • 18 jan 1862
  • Poitiers
  • Evêché de Poitiers
La lettre

J’arrive de B[ordeau]x(1), ma bien chère fille. J’espérais presque trouver ici une lettre de vous, mais peut-être avez-vous été retenue à Lyon plus que vous ne pensiez. La maison de B[ordeau]x irait bien, si Soeur M. de Jésus(2) n’y était pas et si Soeur M.-B[ernard], au lieu de passer des heures et des heures avec les Soeurs, priait un peu plus et se reposait plus avec le bon Dieu et moins avec ses filles. Soeur Jeanne-Marie et Soeur M.-Marthe sont dans les plus parfaites dispositions. Il n’en faut pas plus pour que la maison marche admirablement, quand Soeur M. de Jésus en repartira. Celle-ci me fait l’effet d’être si parfaitement à côté de la question soit dans ses plaintes, soit dans sa justification, que j’ai cru inutile de disputer avec elle. Soeur M.-B[ernard] en a d’elle par-dessus les yeux. Je la crois un membre non seulement inutile mais dangereux pour B[ordeau]x. Quant à elle, elle est parfaitement résolue de n’avoir aucune confiance en sa supérieure locale par un motif assez plausible, c’est que celle-ci passant un temps énorme à se dégonfler avec ses Soeurs, dit sur le compte des unes et des autres des choses qui finissent par être désagréables. Soeur M. de J[ésus] ne veut pas s’exposer à ce que par le fait de son ouverture on en dise jamais sur elle. Le reproche fait sur ce chapitre à Soeur M.-B[ernard] me semble fondé, mais elle est pour le moment si bien disposée qu’il me paraîtrait dangereux de lui faire des observations directes. Le meilleur est, ce me semble, de lui conseiller de donner plus de temps à la prière.

J’ai passé ma matinée à causer avec l’évêque de Poitiers. Je n’ai pu voir M. Gay, quoique je sois allé le chercher(3).

Laissez-moi vous dire combien je suis attristé de nos dernières conversations. Est-ce que nous sommes destinés à nous faire souffrir ainsi l’un l’autre? Si telle est la volonté de Dieu, il n’y a qu’à courber la tête, mais il me semble qu’en travaillant pour sa gloire, nous pouvons bien chercher à écarter certains nuages qui finiraient par troubler notre vue dans l’accomplissement de nos devoirs.

Adieu, ma chère fille. Je désire bien ne pas vous être froid, je vous l’assure, et tout ce qui me fournira l’occasion de vous être aide, appui, soulagement, sera bien bonne chose pour moi, croyez-le bien(4).

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Le P. d'Alzon a quitté Nîmes le 15 janvier au soir. D'après la *Chronologie* du P. Vailhé, dont nous n'avons pas retrouvé la source, il se serait arrêté à Toulouse avant de se rendre à Bordeaux.
2. Soeur Marie de Jésus était économe du couvent des R.A. de Bordeaux.
3. Apprenant que le P. d'Alzon devait prêcher au Mans la neuvaine préparatoire à la fête de saint François de Sales, l'abbé Gay l'avait invité au nom de Mgr Pie à prêcher le 19 janvier à la cathédrale de Poitiers pour la fête de saint Hilaire (lettre de l'abbé Gay du 2 janvier). Le P. Vailhé (*Chronologie*) précise qu'il parla sur saint Pierre. Nous n'avons pas réussi à retrouver sa source.
4. Mère M.-Eugénie répondra le 21 janvier:
"Vous êtes bien bon, mon père, de ressentir tant la souffrance que j'ai éprouvée à Nîmes. Si vous en voyez bien la cause, elle ne vous mécontentera pas. Il me semble, quelque contraire que ce soit à mon mauvais naturel et à ce que vous avez jusqu'ici rencontré en moi, que je suis parvenue à m'établir vis-à-vis de vous dans une amitié *humble*. Or plus la hauteur naturelle a été mise de côté, plus il est resté de place à la sensibilité. J'ai cru en m'ouvrant aller à vous avec toute l'expansion d'un coeur chrétien et c'est la manière dont vous l'avez reçue qui m'a brisée, probablement parce que je ne l'ai pas comprise. Je n'ai point cherché de refuges imparfaits à cette impression, elle s'est donc produite tout simplement, mais elle n'a rien altéré en moi et il me semble que ni N.S. ni vous ne devez en être mécontents. Mais priez souvent pour moi; mon cher Père..."