DERAEDT, Lettres, vol.4 , p. 96

30 jul 1862 Nîmes KAJZIEWICZ Jérôme cr

Leur position respective en Orient en tant que Polonais ou Français. – Plan de partage du travail missionnaire.

Informations générales
  • DR04_096
  • 1812
  • DERAEDT, Lettres, vol.4 , p. 96
  • Orig.ms. ACR, AO 222; D'A., T.D. 40, pp. 105-106.
Informations détaillées
  • 1 MISSION DE BULGARIE
    1 PROJET D'UNION AVEC LES RESURRECTIONNISTES
    1 SCHISME ORIENTAL
    1 SCHISME SLAVE
    2 BORE, EUGENE
    2 COUZA, ALEXANDRU-ION
    2 GAGARINE, JEAN-XAVIER
    2 KAJZIEWICZ, JEROME
    3 ANDRINOPLE
    3 BUCAREST
    3 CONSTANTINOPLE
    3 CONSTANTINOPLE, COLLEGE BEBEK
    3 FRANCE
    3 MOLDAVIE
    3 MONASTIR
    3 PHILIPPOPOLI
    3 RUSSIE
    3 SALONIQUE
    3 VALACHIE
  • AU PERE JEROME KAJZIEWICZ
  • KAJZIEWICZ Jérôme cr
  • Nîmes, le 30 juillet 1862.
  • 30 jul 1862
  • Nîmes
  • Evêché de Nîmes
  • *Le R.P. Jérôme*
La lettre

Bien cher et bien révérend Père,

Ne vous tracassez nullement des difficultés qui peuvent surgir de notre future union. Si Dieu ne la veut pas, il y aura eu cela de bon, dans le projet que je vous ai communiqué, que vous aurez pu voir toute mon affection pour vous et pour les vôtres. Quand même nous travaillerions séparément, vous sur les Bulgares proprement dits, nous sur les Grecs et sur les Roumains(1), nous aurions une foule de points de contact par lesquels nous nous prêterions un appui réciproque. Je tiens seulement à vous faire observer que vous pouvez comme membres de la famille slave, acquérir une influence immense, mais aussi que, à cause de cette qualité même, vous êtes exposés à bien des persécutions de la part de la Russie, dont l’influence toujours croissante pourrait devenir un vrai danger pour vos oeuvres dans l’Orient. Nous, au contraire, sans compter bien positivement sur l’appui de la France, nous avons l’espoir qu’une oeuvre française aura toujours une certaine valeur dans ces pays, précisément parce que, derrière nous il y aura un protecteur forcé dans un gouvernement qui peut être révolutionnaire en France, mais qui n’a de valeur là-bas que par le catholicisme. Cette position vaut la peine qu’on y réfléchisse.

Vous ai-je dit que le Père Gagarin(2) m’avait fait proposer indirectement de fonder un collège avec lui? J’ai refusé pour plusieurs motifs, entre autres parce que j’ai su qu’il avait tenté quelque chose dans les provinces danubiennes soumises au prince Couza. Or le secrétaire de ce prince actuellement à Paris, a dit à nos Pères que dès qu’on avait su qu’il était Russe, on l’avait prié de se retirer. On nous affirme en même temps, qu’avec une certaine connaissance de l’italien et du latin, on peut se faire parfaitement entendre en Moldavie et en Valachie. Si donc nos deux congrégations ne devaient pas s’unir, je vous laisserais Monastir, Andrinople et surtout Philippopoli, où, d’après des renseignements très détaillés que j’ai reçus, il y a beaucoup à faire et où les Bulgares paraissent dominer; je vous demanderais de nous laisser Boukharest et Constantinople.

A Boukharest il faudrait un séjour d’un ou deux ans avant d’avoir la chance de faire le moindre bien, mais un missionnaire catholique qui y mènerait pendant un certain temps une vie régulière, finirait par y acquérir une influence immense. Je serais sûr d’être soutenu dans ces pays par une foule de moyens, et c’est pour cela que je vous prie de me permettre de penser plus particulièrement à cette ville. Quant à Constantinople, alors même que nous ne nous unirions pas, je pense qu’il y aurait place pour tous. Je vous prie de remercier M. Boré(3) de ses offres aimables; je ne pense pas que pour le moment, il me soit possible de lui envoyer personne, mais cela viendra plus tard. Je ne vous demande pas non plus de m’envoyer un Bulgare puisque, si nous nous unissons, vos religieux seront nos meilleurs maîtres, et que si nous ne nous unissons pas, il sera tout naturel de vous laisser le soin d’évangéliser la partie slave des populations danubiennes.

Adieu, mon bien cher Père, veuillez croire à ma plus grande affection.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. "Je suis bien aise que vous êtes arrivé au même projet que je vous présentais chez Lavigerie", écrira le P. Jérôme le 9 septembre. Dès le départ, les Résurrectionistes ont voulu se réserver l'apostolat parmi les Bulgares et le P. d'Alzon leur laissa le champ libre, comme le confirme encore la dernière phrase de notre lettre. Puisqu'il faut s'en prendre "au schisme photien tout entier", le P. d'Alzon trouve tout naturel que, dans la division des tâches, les Bulgares soient réservés aux Pères polonais.
2. P. Jean-Xavier Gagarin S.I. (1814-1882). Russe de naissance, il se convertit au catholicisme en 1842, entra dans la Compagnie de Jésus et consacra sa vie au rapprochement de l'Eglise catholique et des Eglises orthodoxes et spécialement slaves. Il fut l'un des fondateurs en 1857 de la revue *Etudes*.
3. Le 16 juillet, M. Boré, supérieur du collège de Bébek, avait demandé au P. d'Alzon d'envoyer un prêtre à Salonique: il y aiderait les Lazaristes tout en apprenant les langues et en se préparant à sa mission.